Pesticides à Bruxelles : des organisations se mobilisent aux côtés de la Région Bruxelles Capitale

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17 décembre 2024

Communiqué de presse

Pour protéger la santé et l’environnement des Bruxellois·es, Nature et Progrès, PAN-Europe, We Are Nature Brussels et la Société royale apicole de Bruxelles et environs (SRABE) ont décidé de se mettre aux côtés de la Région de Bruxelles-Capitale, attaquée par Belplant pour avoir adopté un arrêté visant à mieux encadrer l’utilisation des pesticides.

Suite à l’Ordonnance du 20 juin 2013, les pesticides chimiques étaient déjà interdits dans la Région de Bruxelles-Capitale (RBC) dans certaines zones fréquentées par le grand public (espaces publics, crèches, écoles, maisons de repos, zones Natura 2000, etc.). Le 6 juin dernier, le gouvernement de la RBC a adopté, en troisième lecture, un arrêté plus ambitieux qui étend l’interdiction de principe à tout le territoire de la RBC, y compris aux jardins et parcs privés ainsi qu’aux surfaces agricoles consacrées à la production végétale, étant entendu qu’une période transitoire de six ans est octroyée pour ces dernières.

L’association Belplant, qui représente Bayer, Syngenta et d’autres producteurs de pesticides, a intenté un recours en annulation contre cet arrêté devant le Conseil d’État. Pour la RBC et les quatre organisations qui se sont portées parties intervenantes volontaires dans un recours déposé ce lundi 16 décembre, ce recours est non fondé et contraire au droit européen.

 » Il existe une directive sur l’utilisation durable des pesticides, la Directive SUD. Celle-ci impose des obligations   concrètes, dans le chef des Etats membres pour protéger l’environnement et les citoyens de la contamination des  pesticides, dont les risques ne sont plus à démontrer. La RBC a adopté un arrêté ambitieux visant à implémenter cette Directive sur le territoire hétérogène et spécifique que constitue la RBC. Mais force est de constater que cela dérange l’industrie. » précise Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer chez Nature et Progrès et auteure du recours.

La spécificité de la région bruxelloise, densément peuplée mais également composée de superficies agricoles et de nombreux espaces verts est une réalité qui n’a pas échappé à l’association « We Are Nature. Bruxelles », également partie intervenante dans cette procédure. 

 » L’usage répété des pesticides mortifie les sols, qui deviennent imperméables aux eaux de pluie, augmentant ainsi le risque d’inondation à Bruxelles. Les pesticides empêchent également les sols de jouer leur rôle de puits de carbone et de régulateurs de la température dans une ville déjà saturée par la bétonisation. Les terrains non construits doivent absolument être maintenus comme tels et rester des sols vivants. Ils sont nécessaires pour la biodiversité, pour notre santé, et pour nous adapter aux effets du changement climatique » soutient Jean Baptiste Godinot, président de l’association « We Are Nature Brussels.

Les obligations en matière de restriction de l’utilisation des pesticides et de réduction des risques liés aux pesticides, imposées par la Directive SUD ne sont que très faiblement mises en œuvre par les Etats membres. Nonobstant les plans de réduction des pesticides, leur commercialisation ne diminue pas réellement et des pesticides dangereux et toxiques sont encore présents sur le marché. La RBC dont la route vers le « Zéro pesticide » avait été amorcée en 2013 fait figure d’exemple dans la Directive SUD. 

Pour Martin Dermine, directeur de PAN Europe:  « L’utilisation de pesticides génère des nuages de produits chimiques qui voyagent parfois sur de longues distances. Les Bruxellois peuvent s’enorgueillir que leur région soit la première au sein de l’Union européenne à respecter une directive vieille de 15 ans, en prévenant sa population de l’exposition aux pesticides et en protégeant son environnement ». 

La RBC a déjà déposé son mémoire en réponse à la requête en annulation de Belplant, mais pour les organisations intervenantes, l’intérêt de l’acte attaqué est tel qu’elles demandent au Conseil d’État d’être parties prenantes à la cause, aux côtés de la RBC.

Pour Christine Baetens, administratrice de la Société Royale Apicole de Bruxelles et Environs (SRABE),   » il a été clairement démontré que les pesticides sont extrêmement toxiques pour les abeilles et les autres pollinisateurs. Ils modifient leur comportement et affectent leur capacité de reproduction. Or, les abeille sont les véritables chevilles ouvrières de l’agriculture, grâce à leur rôle de pollinisateur. Une initiative comme celle de la RBC de restreindre l’utilisation des pesticides les plus toxiques est une nécessité. « 

Il appartiendra au Conseil d’État de se prononcer sur l’intérêt des quatre associations à intervenir dans ce contentieux et de juger de la recevabilité de leur requête.

Pour le reste, la procédure en annulation suivra son cours habituel : échanges d’écrits, avis de l’Auditeur, audience, etc. Un arrêt du Conseil d’État sur le bien-fondé de la requête en annulation n’est pas attendu avant l’été 2026. D’ici là, les pesticides autres que ceux à faible risque seront interdits, sauf dérogation, et une période de transition spécifique sera prévue pour les agriculteurs, que la RBC entend accompagner dans cette transition.

Un tournant dans l’histoire des pesticides PFAS : flufénacet, flutolanil ; aujourd’hui autorisés, demain interdits ?

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3 décembre 2024

Communiqué de presse

Ces 4 et 5 décembre, les Etats membres de l’Union européenne décideront du sort du flufénacet, un pesticide PFAS, largement utilisé depuis 2004, qui se dégrade en acide trifluoroacétique (TFA). Classé récemment comme « perturbateur endocrinien » et présentant un risque élevé de contamination des eaux à l’acide trifluoroacétique (TFA), la Commission européenne (CE) prend ses responsabilités et propose le non-renouvellement de cet herbicide dont les ventes ont atteint 63 000 kilos rien qu’en 2021 en Belgique. Cette dernière a indiqué qu’elle suivra la CE. Le flutolanil, fongicide utilisé notamment pour les pommes de terre et également émetteur de TFA, devrait connaitre la même destinée.

La pollution des eaux de surface et des eaux potables, y compris les eaux minérales, par le TFA est dénoncée par PAN Europe et ses membres, dont Nature et Progrès, depuis plusieurs mois.[1] En Wallonie, les analyses de la Société wallonne des eaux (SWDE) faisant suite à ces rapports montrent des concentrations moyennes de TFA allant de 500 à 1 500 nanogrammes/litre. En Flandre, les niveaux sont encore plus préoccupants : selon les données récentes de la VRT, certaines eaux potables atteignent jusqu’à 9 000 nanogrammes/litre. [2]

Le TFA, un métabolite extrêmement persistant des PFAS, serait principalement issu des pesticides PFAS dans les zones rurales, selon plusieurs études scientifiques[3] et l’Agence allemande pour l’environnement (UBA). Actuellement, 37 substances actives PFAS sont autorisées en Europe, dont le flufénacet et le flutolanil sur l’avenir desquels les Etats membres devront se prononcer demain. Toutes ces substances se décomposeraient en ce métabolite dénommé TFA. À ce jour, seule l’osmose inverse permet de neutraliser le TFA. Alors que les sociétés de distribution d’eau potable risquent de devoir faire face à des investissements exorbitants, in fine à la charge du contribuable, pour maintenir les taux de TFA en dessous des seuils acceptables ; les entreprises d’eau minérale, elles, ne disposent d’aucune alternative pour faire baisser le niveau de TFA dans leur eau.

Or, elles ne sont pas épargnées. A ce titre, la concentration impressionnante de TFA dans les eaux de Villers, révélée aujourd’hui par PAN-Europe, [4] à proximité de zones agricoles a de quoi interpeller. Les agriculteurs et les producteurs d’eau minérale subissent finalement les conséquences de l’industrie à la source de ces polluants. Les autorités qui  ont, jusqu’ici, autorisé la dissémination, en négligeant entre autres, de se soucier de ce métabolite ont la responsabilité de légiférer urgemment.  

Mais cela pourrait évoluer. D’éminents scientifiques tirent la sonnette d’alarme sur la menace de l’accumulation irréversible de TFA dans l’environnement. Ils soulignent la nécessité de « mesures contraignantes » pour réduire les émissions de TFA [5]. Récemment, l’Allemagne, pour donner suite à une étude produite par Bayer révélant le caractère reprotoxique du TFA, a demandé de classifier le TFA comme Reprotoxique de catégorie 1B, conformément au Règlement EC n°1273/2008 [6], faisant du TFA un « métabolite pertinent », écrit la CE dans sa proposition de non-renouvellement du flufénacet. Une telle classification pourrait être lourde de répercussion pour l’avenir de tous les pesticides PFAS.

Pour Salomé Roynel, responsable politique chez PAN Europe : « L’interdiction proposée par la CE d’interdire les deux pesticides PFAS que sont le flufénacet et le flutolanil est légalement requise.» PAN appelle tous les États membres à « suivre la loi et la science, en donnant la priorité à la protection de la santé humaine et de l’environnement et à adopter rapidement ces interdictions. »

De source sûre, la Belgique a confirmé qu’elle soutiendrait la position de la CE sur le non-renouvellement du flufénacet[7], dont le caractère de « perturbateur endocrinien » et « les risques de contamination des eaux souterraines au TFA sont élevés ». Il devrait en être de même du flutolanil, même si, dans ce cas, c’est l’absence d’étude finalisée sur les risques pour le consommateur liés à la présence de TFA dans les cultures agricoles qui est invoquée à la source de la proposition de non-renouvellement. [8]

Pour Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer : « Dès lors que la CE propose un non-renouvellement de la substance, nous n’en attendions pas moins de la part de la Belgique. La Commission semble enfin prendre le TFA en main, ce qui constitue une étape majeure dans la bataille contre les pesticides PFAS. Mais même si le flufénacet était interdit demain, après avoir été autorisé pendant 20 ans, ce revirement démontre bien que les règles d’autorisation des pesticides ne sont pas fiables. Ce n’est pas parce qu’un pesticide est aujourd’hui légalement mis sur le marché qu’on peut en conclure qu’il n’est pas nocif ou toxique. »

Toutes les analyses de résidus de pesticides, qu’elles soient effectuées dans l’air, [9] dans les chambres à coucher [10]  ou sur les personnes elles-mêmes[11] révèlent la présence de pesticides autrefois autorisés et maintenant interdits : ainsi, l’imidaclopride, le malathion ou l’atrazine, continuent de contaminer nos environnements, même après leur interdiction. 

« Il est temps que la Belgique mette toute son énergie à encourager des modes de production agricole qui se passent de polluants chimiques et qui cochent toutes les cases des défis de notre société : santé publique, biodiversité, eau, environnement, lutte contre les changements climatiques, emploi en milieu rural, etc. », conclut Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature et Progrès.

Une agriculture sans polluants chimiques doit devenir une priorité pour protéger notre santé et celle de la Terre.

[1] PFAS – Nature & Progrès

[2] Kleinste soort PFAS duikt op in Vlaams drinkwater: « Lozingen door industrie en pesticiden moeten teruggedrongen worden » | VRT NWS: nieuws

[3] Pesticides can be a substantial source of trifluoroacetate (TFA) to water resources

[4] PAN Europe

[5]  The Global Threat from the Irreversible Accumulation of Trifluoroacetic Acid (TFA), Hans Peter Arp et al, Octobre 30, 2024

[7] EU Commission proposal to ban Flufenacet

[8] Review report on Flutolanil

[9] EXPOPESTEN – ISSeP

[10] Onderzoek in slaapkamers vindt cocktail van 21 pesticiden, Tytgat ziet “geen risico’s voor gezondheid” | VILT vzw

[11] BMH-Wal – ISSeP

Notre revue Valériane fait peau neuve !

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Nous y sommes ! Notre revue est « actualisée » : nouveau look, nouvelles rubriques… On vous dit tout sur cette métamorphose !

Pourquoi maintenant ?

Après 24 ans de bons services, notre rédacteur en chef, Dominique Parizel – votre dévoué serviteur, comme il disait -, prend une pension bien méritée. Notre graphiste arrive également en fin de parcours. Deux nouveaux visages arrivent donc dans l’élaboration de votre revue ! Sylvie La Spina, agronome chez Nature & Progrès depuis déjà dix ans et auteure de plusieurs ouvrages de jardinage, a repris le rôle de rédacteur en chef de la revue. Marie Frères, graphiste (Studio Treize), rejoint ce beau projet. « C’est ma façon de rendre le monde meilleur, rendre les choses belles, contribuer au plaisir de vivre dans ce monde ».

Le changement de graphisme, c’est une opportunité pour revoir la maquette, mais aussi pour mettre un coup de neuf dans les rubriques de la revue. Avant tout, il fallait donner la parole à nos membres, à nos fidèles lecteurs. Une évaluation a donc été menée, à la fois sur internet et grâce à un questionnaire papier encarté avec le numéro 167. Il a permis d’identifier les améliorations à prévoir, tant au niveau graphique que du contenu. Merci à tous pour votre participation !

Nouveau look, nouvelles rubriques

Marie apporte un vent de fraicheur et de modernité dans le graphisme de la revue. Nous avons souhaité améliorer sa lisibilité, sa clarté et la rendre plus agréable encore. On mange avec les yeux, en soignant la présentation des assiettes… C’est pareil avec la lecture ! Les rubriques ont été revues pour mettre mieux en valeur le contenu très riche de notre périodique. En voici le fil conducteur:

Nature & Progrès est une association de consommateurs, jardiniers et producteurs, qui agissent au quotidien à leur niveau (« Pratiquer »), alimentés par des réflexions critiques sur la société (« Explorer »), qui s’associent pour « Agir » en vue d’une transition à l’échelle de la société, et qui vont « S’inspirer » d’initiatives positives pour œuvrer à un monde meilleur.

Quel beau résumé de notre mouvement, ne trouvez-vous pas ?

 

Nature & Progrès prône l’autonomie au quotidien. Celle-ci passe par des actions mises en place au niveau individuel : jardinage, petit élevage, cuisine, utilisation des plantes sauvages, aménagement de l’habitat… La rubrique « Pratiquer » rassemble des articles de partage de savoir et savoir-faire allant dans ce sens. Elle prévoit des espaces d’échanges entre les membres (nouvelle rubrique « Vos trucs et astuces »).

En tant que consommateurs et producteurs responsables, nous sommes en perpétuelle réflexion sur le monde. Nourrissant nos esprits par des informations objectives, la rubrique « Explorer » amène chacun à une vision critique du monde, à penser les alternatives afin d’amener une transformation de notre société pour plus de résilience.

Cette rubrique, c’est notre rubrique à tous, forces vives de Nature & Progrès ! On y retrouve des nouvelles de tous nos projets, qu’ils soient confiés à l’équipe ou menés par nos bénévoles. Chaque action de Nature & Progrès est mise en valeur à travers des articles, des comptes-rendus et un agenda commun à toute l’association. Elle présente nos forces vives et donne la parole à nos membres.

Nous ne sommes pas seuls à œuvrer pour un monde meilleur. De nombreuses initiatives de transition écologique nous entourent et nous inspirent, méritent d’être essaimées ou adaptées à nos réalités. Cette rubrique, c’est celle qui fait du bien. Bourrée d’informations positives, de solutions, d’actions concrètes, elle est la bulle d’oxygène qui donne de l’énergie. Une page est spécialement consacrée à la sensibilisation des enfants, notre avenir. On y découvre aussi des idées nouvelles développées par des personnes inspirantes, des jardins et des producteurs dans nos idéaux, des recettes, parce que « la bio, finalement, c’est surtout du bon vivre, non ? », m’a un jour confié Marc Fasol, l’un de nos rédacteurs.

Notre revue, plus proche de vous !

« Mes aliments ont un visage ». Vous rappelez-vous cette campagne chère à Nature & Progrès, que nous avons menée pendant des années pour faire prendre conscience que derrière le produit, se trouve un producteur ? Nature & Progrès aussi, a des visages ! Nous avons décidé de mettre plus en avant tous les acteurs de notre mouvement. Une photo des auteurs accompagnera dorénavant les articles, nos forces vives seront présentées, et leur opinion, partagée. Vos trucs et astuces enrichiront notre rubrique pratico-pratique. Ensemble, pour notre santé et celle de la Terre !

Un journalisme de solutions

Une étude menée en 2022 par l’Institut Ipsos a révélé que 36 % des Français évitent une actualité anxiogène, soit, à peu de chose près, tout ce qui est présenté dans les quotidiens. Les raisons évoquées sont des sujets répétitifs (43 %), un effet négatif sur l’humeur (36 %), le sentiment d’être submergé par l’abondance d’informations (29 %), la perte de confiance dans les médias (29 %), le sentiment d’impuissance face à des nouvelles déprimantes (16 %) et une difficulté à se saisir des enjeux (8 %). Les conséquences sont lourdes : résignation, désensibilisation face aux enjeux de société, désintérêt voire désengagement. Or, nous avons besoin de toutes les forces vives pour réagir, réfléchir, mettre en œuvre des initiatives, des solutions, à l’échelle individuelle ou collective, voire sociétale !

Le journalisme de solutions, défini par Reporters d’espoir, « s’emploie à analyser et à diffuser la connaissance d’initiatives qui apportent des réponses concrètes, reproductibles, à des problèmes de société, économiques, sociaux et écologiques, qu’elles soient menées par des individus, des collectifs, des entreprises, des collectivités, des associations, des acteurs publics ou privés ». Elle fait appel à une méthodologie rigoureuse, en retranscrivant faits et contexte de manière juste et critique, en mettant en avant les limites et une vision globale des enjeux. Elle présente une réalité complète, complexe et nuancée.

Voici un angle de journalisme cohérent avec nos valeurs, qui donne envie de s’impliquer, d’agir individuellement ou collectivement pour réinventer un monde résilient, plus heureux et agréable à vivre.

Être à la hauteur de l’urgence écologique

Le GIEC met en avant, dans son sixième rapport, le rôle crucial des médias pour « cadrer et transmettre les informations sur le changement climatique ». Une charte[i] a été réalisée dans ce sens par un collectif de journalistes et reprend treize points d’attention.

  1. Traiter le climat, le vivant et la justice sociale de manière transversale
  2. Faire œuvre de pédagogie, vulgariser les informations scientifiques
  3. S’interroger sur le lexique, choisir les mots et les images utilisées
  4. Elargir le traitement des enjeux, de la responsabilité individuelle à celle des politiques
  5. Enquêter sur les origines des bouleversements en cours, questionner le modèle et les acteurs économiques, financiers et politiques
  6. Assurer la transparence, apporter des informations objectives et fiables
  7. Révéler les stratégies produites pour semer le doute dans l’esprit du public
  8. Informer sur les réponses à la crise, questionner les solutions
  9. Se former en continu pour disposer d’une vision globale et actuelle
  10. S’opposer aux financements issus des activités les plus polluantes
  11. Consolider l’indépendance des rédactions
  12. Pratiquer un journalisme bas carbone
  13. Cultiver la coopération entre médias

Nous nous y reconnaissons, pas vous ? Nous avons donc décidé de rejoindre les signataires de la Charte, conscients, plus que jamais, du rôle que nous pouvons remplir dans les enjeux de notre société.

[i] En savoir plus : https://chartejournalismeecologie.fr/

 

Découvrez notre nouvelle revue par ici : https://www.natpro.be/revue-valeriane/

Quel état de santé pour notre agriculture wallonne ?

Comment se porte l’agriculture en Wallonie ?

Nous vous proposons ci-dessous quelques chiffres et constats pour lancer la réflexion.


EN RESUME

Par rapport à 1990, il y a 20 ans, la Wallonie compte 2 x moins de fermes (et 2 x moins de fermiers), des fermes 2 x plus grandes (surfaces, élevages) qui vont vers une spécialisation et une intensification.

L’accès à la terre agricole est difficile. La location, concernant 2/3 des terres agricoles, est régie par le bail à ferme, très restrictif, qui limite la mise à disposition des terres.De plus, le prix des terres augmente notamment à cause de la spéculation et du développement d’autres usages non-agricoles.

Le revenu des fermiers est très disparate, plus d’un agriculteur sur 10 est en faillite (revenu < 0 €), un sur trois ont un revenu inférieur à 10.000 €, tandis que 14,2 % des fermes ont un revenu supérieur à 50.000 euros (dont 5,8 % supérieur à 75.000 euros).

L’impact de l’agriculture sur l’environnement (pesticides, pollutions…) est important. Le développement des politiques agricoles tend à réduire ces impacts. L’agriculture biologique gagne du terrain en Wallonie (10 % des fermes et des terres).

L’agriculture wallonne n’est pas autonome, notamment les élevages qui nécessitent à l’heure actuelle d’importantes importations de fourrages (notamment le soja).

Les produits wallons ont relativement peu de plus-value, notamment en raison des normes AFSCA qui limitent la transformation à la ferme. Néanmoins, les circuits courts sont en développement et la valorisation des produits à haute qualité, notamment celle des produits biologiques, est le sujet de programmes de développement.

De nombreux produits wallons sont soumis aux marchés mondiaux. Ils connaissent dès lors une volatilité importante des prix agricoles.

 


EN DETAILS

 

La surface agricole utile en Wallonie est de 714.954 ha. Elle est répartie entre 13.306 fermes (chiffres de 2012).

La Wallonie est divisée en régions agricoles caractérisées par un sol et un climat particuliers. Chaque région agricole a ses orientations dominantes (cultures en région limoneuse, élevage en Ardenne, etc.). En effet, les rendements des cultures dépendent fortement du climat et du sol. A titre d’exemple, le froment d’hiver a des rendements moyens de 88 Quintaux/ha en région limoneuse et de seulement 58 Qx/ha en région jurassique (chiffres de 2012).

1- régions agricoles

Carte des régions agricoles de Wallonie (Source : SPW, Direction Générale de l’Agriculture)

 

Le nombre de fermes diminue : 2 fois moins de fermes en 20 ans

Entre 1990 et 2010, le nombre de fermes est divisé par deux, soit une diminution de 3,4 % en moyenne par an. Cette réduction du nombre de fermes est importante en Haute Ardenne où 7 fermes sur 10 ont arrêté leurs activités depuis 1990. Parallèlement, la main d’œuvre agricole est également réduite de moitié.

Succession des fermes : 4 agriculteurs de plus de 50 ans sur 5 n’a pas de successeur pour sa ferme ! Les petites fermes ont moins de successeurs que les grandes. On enregistre une nouvelle ferme pour 2 qui disparaissent en région limoneuse, et une pour 5 en Ardenne. Les nouvelles fermes ont une surface moyenne de 44 ha (rappel : moyenne wallonne : 53,7 ha).

 

La taille des fermes augmente : doublement des surfaces en 20 ans

Entre 1990 et 2012, la taille moyenne des fermes est passée de 25,8 ha à 53,7 ha, soit un doublement. Par comparaison, cette taille moyenne est de 24,5 ha en Flandre, 14,6 ha en Europe et 181,8 ha aux Etats-Unis. La taille moyenne des fermes est liée à la région agricole et à leur orientation.

Les petites fermes : un tiers des fermes sont actives sur moins de 25 hectares. On y compte beaucoup d’exploitations occasionnelles ou hors-sol (91 ne déclarent pas de superficie !).

Les grandes fermes : 1,5 % des fermes (203) ont plus de 200 hectares. Elles sont pour la plupart situées en région limoneuse ou en Condroz et orientées en grandes cultures.

 

La taille des élevages a aussi tendance à grandir

Le cheptel bovin par exploitation augmente : de 66 têtes en moyenne en 1990, on passe à 127 têtes en 2012, soit un doublement.

Le nombre de porcs augmente également : de 78 têtes en 1990, on arrive, en 2012, à 606 têtes en moyenne par ferme détenant des porcs !

Le nombre de poulets de chair passe de 523 par élevage en 1990 à environ 10.923 par élevage en 2012. 92 fermes élèvent plus de 10.000 poulets de chair : elles représentent à elles-seules plus de 90 % du secteur en Wallonie.

Pour les poules pondeuses, la progression est similaire avec actuellement une moyenne de 1.157 poules par élevage. Néanmoins, 40 fermes de plus de 10.000 poules représentent plus de 82 % du secteur en Wallonie.

Nous assistons à une concentration et à une spécialisation des élevages en Wallonie.

 

Une agriculture qui se spécialise et qui s’intensifie

En 2012, 85,2 % des fermes sont spécialisées et 14,8 % sont mixtes (polyculture, polyélevage, cultures et élevage…). La proportion de fermes spécialisée a augmenté depuis 2003 (81,9 %).

Selon l’agence européenne de l’environnement, l’agriculture wallonne se classe parmi les 10 régions où l’agriculture est la plus intensive d’Europe, eu égard à l’utilisation d’azote et à la production d’effluents d’élevage.

 

Pourquoi une telle évolution ?

Jusqu’où mènera-t-elle ?

 

Accès à la terre

La surface agricole totale diminue : entre 1990 et 2012, en 22 ans, elle a diminué de 5 %. Les raisons évoquées sont : «  le développement de l’économie (création de parc industriels), l’amélioration des conditions de vie (construction de maisons individuelles, infrastructures de service public), et la construction de voies de communication ».

Parallèlement, la location des terres agricoles via le bail à ferme est contraignante pour les propriétaires et limite la mise à disposition des terres. Elle concerne deux tiers des terres agricoles. En ce qui concerne le faire-valoir direct, le prix des terres augmente, notamment dans les régions fortement peuplées où d’autres usages entrent en compétition avec l’agriculture.

 

Une agriculture qui reste familiale ?

En 2003, la main d’œuvre non familiale représentait 9,1% de la main d’œuvre agricole. Elle augmente pour correspondre en 2012 à 13,2 % du total.

 

L’agriculteur : la corde au cou ?

La valeur de la ferme en capital explose.

Le capital mis en œuvre dans une ferme à caractère professionnel a presque doublé en 2012 (1.215.000 euros) par rapport à 2001 (658.000 euros). Cette augmentation est liée à l’accroissement en surface et en cheptel des fermes.

L’endettement augmente également.

Le capital est engagé à raison de 48 % par l’exploitant et 52 % par des bailleurs (banques / location de terres et de bâtiments). En 2001, la tendance était inverse. L’endettement augmente en raison de la valeur absolue des emprunts, et la proportion du capital pris en charge par les bailleurs a légèrement augmenté. Le taux de solvabilité diminue.

Quid du revenu ?

Le revenu du travail par unité de travail est, pour 2010-2012 en moyenne de 22.955 euros. La disparité des revenus est importante : près de 12,9 % des fermes observées ont un revenu inférieur à 0 euros, 30 % ont un revenu inférieur à 10.000 euros tandis que 14,2 % des fermes ont un revenu supérieur à 50.000 euros et 5,8 % supérieur à 75.000 euros. Pour la période 2001-2003, ces chiffres étaient plus équilibrés, avec 6,2 % de revenus < 0 et 2 % de revenus supérieurs à 75.000 euros.

L’orientation de la ferme joue énormément sur le revenu par unité de travail : en grandes cultures, la moyenne est de 55.185 euros par UT, en bovins lait, 26.315 euros par UT, et en bovin viande, seulement 18.318 euros par UT.

 

Agriculture et environnement

L’agriculture a des impacts négatifs sur l’environnement à travers l’utilisation de pesticides et d’engrais, qui causent une diminution de la biodiversité, une pollution des sols, des eaux et de l’air. Ces impacts ont tendance à se réduire suite à la mise en place de plusieurs programmes européens tels que la Directive Nitrate (Plan de Gestion Durable de l’Azote wallon), la Directive Habitats, etc.

L’agriculture biologique progresse en Wallonie. La barre des mille agriculteurs bio a été dépassée en 2012. Actuellement, environ 10 % des fermes et des terres agricoles sont biologiques ou en conversion vers le bio.

 

 Autonomie de la Wallonie : pas au top

L’élevage wallon est loin d’être autonome puisqu’un tiers (en valeur) des produits d’élevage sont réalisés à partir d’aliments qui ne sont pas produits dans les exploitations. La Wallonie importe « virtuellement » près de la moitié des terres nécessaires à son alimentation, notamment sous la forme de fourrages pour le bétail.

 

Relativement peu de plus-value sur les produits agricoles wallons

Selon IEW, la production agricole wallonne est essentiellement valorisée dans les circuits commerciaux traditionnels, avec peu de plus-value. La Wallonie dispose de peu de « produits de goût » (IGP – Indication Géographique Protégée, AOP – Appellation d’Origine Protégée) et valorise relativement peu sa production biologique malgré la demande importante pour ces produits et le développement de l’élevage biologique. L’agriculture wallonne dispose donc d’un important potentiel à exploiter dans la mise en valeur de ses produits.

 

Une agriculture soumise aux marchés mondiaux

De nombreux produits agricoles wallons sont soumis aux marchés mondiaux et à la spéculation, ce qui implique une volatilité importante des prix.

 


 

Sources :

Service Public de Wallonie : « Evolution de l’économie agricole et horticole de la Wallonie 2012 – 2013« .

Inter-Environnement Wallonie (IEW) : « Repenser notre agriculture et notre alimentation » (position IEW de septembre 2013)

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