Le printemps 2024 marquera le lancement d’un nouveau cycle de rencontres dédié aux vergers et aux petits fruits bio dans toute la Wallonie. Cette initiative s’inscrit dans le cadre de la campagne « Vers une Wallonie sans pesticides, nous y croyons !« , débutée en 2018 avec la mise en lumière des alternatives aux pesticides en prairies. Les années suivantes ont exploré les méthodes alternatives en agriculture bio, notamment dans les cultures de céréales, de légumes plein champ et de pommes de terre.
Pourquoi se Pencher sur les Alternatives en Fruitiers ?
Les vergers et les cultures de petits fruits demeurent fortement tributaires des pesticides. En 2017, ces cultures représentaient les plus grandes surfaces traitées en Wallonie, avec des quantités de substances actives bien supérieures à d’autres cultures. Pour donner une idée, un verger de pommiers peut nécessiter jusqu’à 17,6 traitements fongicides et 10,5 traitements insecticides/acaricides. L’utilisation globale de substances actives en culture de fruits est 5,6 fois plus élevée que celle en culture de légumes.
Une étude de l’Institut Scientifique de Service Public (ISSEP) démontre également que les concentrations de pesticides dans l’air ambiant sont les plus élevées dans les zones caractérisées par une densité importante de fruitiers. Cela souligne l’urgence de mettre en avant des alternatives.
Défis Actuels et Conséquences sur l’Environnement
La diminution des insectes auxiliaires, due à l’utilisation intensive de pesticides, crée un défi majeur pour les arboriculteurs. La production de petits fruits est également confrontée à de nouveaux ravageurs, comme la drosophile suzukii, engendrant des perturbations majeures dans les cultures. Pour y faire face, de nombreux arboriculteurs se tournent vers des produits chimiques, contribuant à une spirale d’utilisation de produits toujours plus puissants et destructeurs.
Illuminer les Alternatives Existantes en Production de Fruits !
Face à ces enjeux, il est essentiel d’informer arboriculteurs et particuliers sur les aménagements possibles pour faire de leurs cultures des réservoirs de biodiversité. Il est temps de réintroduire les populations d’auxiliaires pour une lutte biologique efficace et l’équilibre de nos écosystèmes.
Le projet « Vers une Wallonie sans pesticides » se consacre désormais à mettre en avant les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse en vergers et cultures de petits fruits. Ces rencontres, prévues pour 2024, réuniront des producteurs bio partageant leurs techniques, des producteurs traditionnels, des entrepreneurs de parcs et jardins, des consommateurs curieux, et des experts du domaine.
Restez à l’affût : le programme des rencontres sera dévoilé en début d’année 2024 sur le site de Nature et Progrès ainsi que sur les réseaux sociaux. Rejoignez-nous pour découvrir les alternatives concrètes qui façonnent un avenir sans pesticides pour nos vergers et petits fruits !
La 38ème édition du Salon Valériane s’est tenue début septembre. L’occasion pour Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature & Progrès (ASBL organisatrice du salon) de tirer quelques conclusions et d’imaginer l’avenir du bio.
« Créer le monde que nous voulons est un mode d’action bien plus subtil, mais plus puissant que détruire celui dont nous ne voulons plus. »
Cette phrase est de Marianne Williamson. C’est effectivement ce qu’a voulu mettre en avant Nature & Progrès à travers la thématique du salon de cette année : « Nourrir notre futur : choisir l’autonomie ! » Forte de sa base de 5000 membres et de son réseau de producteurs, notre communauté montre quotidiennement sans fioritures qu’il est possible de jardiner, produire, manger bio ; ou encore d’habiter, s’habiller, prendre soin de soi – et des autres, se déplacer de manière « éco-responsable » comme on dit… Avec un mot-clé au centre de cela : l’autonomie. Parce que l’autonomie est plus proche du mot liberté que du mot autarcie…
Non, l’autonomie, ce n’est pas viser l’autosuffisance en faisant tout soi-même. En tout cas, pas à l’échelle individuelle. L’autonomie, c’est retrouver la liberté de décider, de maîtriser, non pas la nature, mais ce que l’on met dans notre assiette, nos matériaux de construction, nos cosmétiques, etc. Faire soi-même, oui, si on en a envie. Uniquement avec le plaisir de faire ce que l’on aime ; sans la pression d’acquérir toutes les compétences pour tout faire car comme l’a écrit Toby Hemenway : « faire soi-même c’est bien, mais faire ensemble c’est nettement mieux ».
À l’instar du cahier des charges bio européen, c’est aussi un petit groupe d’architectes et d’artisans membres de N&P qui s’est soucié de manger sainement dans un habitat sain. Cela a donné naissance au terme d’éco-bio-construction et son envol au salon Bois & Habitat. Durant le salon Valériane, sur l’espace partagé « Energie – Habitat – Mobilité », les visiteurs ont eu accès à une mine d’information pour tendre vers l’autonomie dans ces domaines. Ce stand est aussi l’occasion d’affirmer notre volonté de rendre accessible à tout un chacun une isolation des bâtiments de qualité dans un esprit collaboratif.
L’autonomie collaborative, c’est un leitmotif pour les producteurs, transformateurs bio de Nature & Progrès. Que ce soit par rapport aux intrants, à l’alimentation du bétail, aux circuits de commercialisation, ils et elles visent l’autonomie car elle signifie s’affranchir des dépendances :
S’affranchir de la dépendance aux énergies fossiles pour produire les intrants chimiques,
S’affranchir de la dépendance au soja OGM d’outre-Atlantique, responsable de la déforestation amazonienne,
S’affranchir de la dépendance de l’agro-industrie si elle n’est pas capable d’être juste et respectueuse de celles et ceux qui nous nourrissent sainement.
Retrouver une forme de liberté ; une liberté de choix et un pouvoir de décision.
C’est peut-être ce qui distingue la bio du bio… Comme l’agroécologie, l’autonomie est au cœur de la bio selon Nature & Progrès. L’autonomie, serait-ce cela être au-delà du bio ? …
La Wallonie, c’est plus de 2000 fermes bio (soit 16% des fermes wallonnes). Elles représentent près de 13% des surfaces agricoles. Avec un objectif de 25% en Europe et 30% en région wallonne, en début de mandature, nos dirigeants ont compris l’importance de cette agriculture pour notre santé et celle de la terre. Nous ne pouvions que nous réjouir de ces intentions. En tant que veille et unique association de consommateurs qui allient aussi les producteurs, nous regardons au-delà des plans et des législatures. Ce qui nous intéresse, ce sont en effet le nombre de fermes 100% bio et l’intérêt des consommateurs pour les produits bios wallons. Or, cet intérêt – malgré certaines sirènes – cet intérêt, comme nous le rappelait monsieur le ministre Borsus lors de la conférence de presse de la semaine bio, il est toujours bien présent d’après les premiers chiffres d’achats de 2023. Aujourd’hui, il nous semble donc indispensable d’aller un pas plus loin en inscrivant 30% de bio local dans les assiettes des citoyens en 2030. Et pour y arriver, peut-être faudrait-il y dédier 30% de moyens spécifiques ?
Le greenwashing en matière d’alimentation se fait de plus en plus pernicieux. La bonne nouvelle, c’est qu’il semblerait que le marché ait jugé que le développement économique n’est plus possible sans respecter les valeurs d’un mouvement social comme le bio. Le problème, c’est qu’ils le font en se limitant à lâcher des slogans faciles tels que « produits locaux », pour n’en citer qu’un, ce qui crée l’amalgame dans la tête des consommateurs. C’est bien sûr plus facile de jouer sur la communication que de cadrer tout cela dans un cahier des charges contrôlé et certifié. Évidemment, s’ils le faisaient, ils feraient du bio. Parce qu’à partir du moment où il n’y a pas ce type de garantie, les opportunistes peuvent dévoyer des termes aussi nobles que celui d’agroécologie en passe de remplacer celui d’agriculture raisonnée. Or dans ce cas, l’utilisation de pesticides chimiques est toujours la panacée – et la Belgique est plutôt mauvaise élève en la matière. La bio n’a jamais été « agressive » en matière de communication puisque son authenticité suffisait à faire la différence. Mais peut-être que comme l’illustre à merveille un dessin de Yapaka, la sortie de sa niche du bio ferait peur à certains.
Olivier De Schutter identifie le fait « que les gens soient plus convaincus par une bonne communication que par des faits avérés » comme un réel frein à la transition (dans tous les domaines). Tous ces mécanismes de greenwashing brouillent les cartes, en particulier en matière de pesticides. Car, s’il fallait jouer le jeu de la transparence, la bio serait gagnante à tous les coups. C’est pourquoi nous plaidons pour qu’il y ait des moyens proportionnels aux ambitions qui soient spécifiquement étiquetés et dédiés au bio pour allier communication et transparence (faits avérés et communication séduisante basée sur celle-ci).
Citons également l’eurodéputé Christophe Clergeau à propos des nouvelles techniques génomiques (les NGTs). Selon lui, si la proposition de déréglementation de ces nouveaux OGM passe, « nous ouvrons la boîte de Pandore ». Nous sommes là face à un phénomène qui va complètement à l’inverse de l’autonomie ; sous prétexte de chantage mensonger que nous avons besoin de ces techniques pour diminuer l’usage des pesticides. Or, jusqu’ici, les OGM n’ont fait que renforcer des résistances aux pesticides.
Et en parlant de résistance, l’INRAE (équivalent du CRAw en France) a officiellement répertorié tout récemment des cas de résistance au glyphosate en grandes cultures. Elles étaient connues en vigne, les voilà en 1ère mondiale sur le ray-gras et le vulpin. Nous plaidons donc bien évidemment pour qu’il ne soit pas ré-autorisé !
Si nous sommes si intransigeants sur ces substances, c’est qu’au-delà du danger qu’elles représentent, nous savons que les alternatives existent et qu’elles sont appliquées depuis des dizaines d’années avec un réel succès agronomique et humain ! Nous le voyons tous les jours avec notre réseau de producteurs. Et nous voulons aussi que vous le sachiez, que cela ne soit plus ignoré.
Nous terminerons cette carte blanche avec un texte écrit par Dominique Parizel, rédacteur en chef de la revue Valériane : « La meilleure qualité possible dans les assiettes de tous est le projet de la bio telle que la défend Nature & Progrès. S’agit-il seulement d’argent ? Ou bien plus de choix et de modes d’organisation adéquats, de regards à ne pas détourner devant l’adversité ? La bio n’est pas un business. La bio, c’est la vie. La bio, c’est nos vies. »
Discours par Julie Van Damme – Réécriture par Elsa Lefort
Des pommes de terre et des légumes plein champ sans pesticides chimiques de synthèse, c’est possible !Une brochure rassemble les alternatives aux pesticides récoltées durant lesrencontres en ferme BIO, sondages,…Celle-ci était résuméelors de la matinée de restitution à Louvain-la-Neuve le 28 avril 2023.
En 2021 et 2022, Nature & Progrès a organisé une série de rencontres en ferme pour parler des alternatives aux pesticides chimiques de synthèse en culture de pommes de terre et légumes plein champ pour prouver qu’il est possible de se passerdes pesticides. Les agronomes de l’association sont donc parties à la découverte de 15 fermes BIO (ou en conversion BIO) à travers la Wallonie. Les témoignages d’alternatives aux pesticides ont été rassemblé dans une brochure. De plus, les rencontres en ferme ont mis en lumière que la biodiversité est unallié pour une Wallonie sans pesticides.Il nous faut donc la protéger.
Les différentes rencontres en ferme et sondages mettent en lumière le fait que les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse existent, sont durables et peuvent être économiquement viables à condition qu’elles soient bien pensées. Les 15 producteurs rencontrés et installés aux quatre coins de la Wallonie présentaient chacun différentes manières de travailler : en système de polyculture-élevage ou en grandes cultures, en labour ou non-labour, etc. Malgré leurs différences, ils sont unanimes sur le fait que produire sans pesticides chimiques de synthèse est possible, moyennant bien sûr une réflexion poussée autour des pratiques à mettre en œuvre à cette fin. Mais, n’oublions pas le pouvoir ultime des consommateurs au travers de leurs actes d’achat dans la voie vers une Wallonie sans pesticides. La part de l’agriculture biologique augmente chaque année en Wallonie. Pour que le système soit pérenne, la demande doit évoluer au même rythme que l’offre.
Mieux vaut prévenir que guérir
La clé du succès, pour toute culture – incluant même les cultures à pression phytosanitaire très importante, réside dans la combinaison de différentes méthodes préventives. Ces moyens préventifs doivent être réfléchis bien en amont de l’implantation de la culture. Les techniques curatives doivent être considérées comme des méthodes de rattrapage et mises en place lorsque les méthodes préventives n’ont pas suffi à éradiquer la menace.
Comme nous avons pu le voir, certaines pratiques sont réfléchies à l’échelle de la rotation (longueur et diversification de la rotation, choix des intercultures, place des différentes cultures dans la rotation, etc.), d’autres à l’échelle du parcellaire agricole (morcellement des parcelles, implantation de haies, etc.) et d’autres à l’échelle de la culture (avant et après semis : choix de la variété et de la période de semis, choix de cultures associées, etc.).
Intervenir au rythme de la nature
Afin de faire les bons choix, l’agriculteur se doit d’être au plus proche de sa terre. Par exemple, connaître les conditions microclimatiques du sol de ses parcelles (humidité, composition-granulométrie, présence d’une croûte de battance, etc.) est crucial pour choisir la bonne opération de désherbage mécanique et le bon moment de passage (d’autant plus que les fenêtres météorologiques favorables sont souvent très courtes). Avoir une bonne idée des conditions météorologiques et environnementales permet également d’anticiper l’apparition d’une maladie comme le mildiou. Savoir identifier les adventices, ravageurs et maladies, et avoir une bonne idée du cycle de vie de chacun de ces organismes est par ailleurs essentiel pour lutter efficacement et sans pesticides chimiques de synthèse. Les systèmes d’avertissement contre certaines maladies (mildiou, etc.) et certains ravageurs (pucerons, etc.) proposés par les centres pilotes peuvent être d’une grande aide dans la réflexion du producteur.
Intégrer au maximum la biodiversité
Être au plus proche de sa terre, c’est également intégrer au maximum la biodiversité aérienne et souterraine dans son exploitation. Pour ce faire, il est essentiel de réaliser des pratiques agricoles qui visent à l’augmenter : s’abstenir du labour si les conditions le permettent, éviter de compacter les sols, fertiliser avec du fumier composté, semer des engrais verts mellifères en intercultures, implanter des structures naturelles qui accueillent les auxiliaires, etc. La biodiversité est considérée comme un allié pour l’ensemble des agriculteurs dans leur lutte contre les menaces. Même si les méthodes sont globalement communes, chaque producteur procède à sa manière. Ainsi concernant les itinéraires de désherbage mécanique, chacun choisit les opérations les plus adaptées en fonction de différents facteurs : les conditions microclimatiques de ses parcelles, les caractéristiques de son sol, le degré d’ensalissement de ses cultures, les adventices dominantes, la disponibilité des machines sur l’exploitation, etc. Aucune opération n’est meilleure qu’une autre :il est question de s’adapter à sa terre et à ce qui y pousse. La plupart des producteurs rencontrés clamaient : « Les investissements et le travail fournis aujourd’hui, notre terre nous le rendra plus tard ! ». Les moyens mis en place aujourd’hui, par exemple en termes d’enrichissement du taux d’humus du sol et de réduction de la pression d’adventices vivaces par le biais de la mise en place d’engrais vert et de prairies temporaires, etc., doivent être vus comme des investissements sur le long terme. Les pratiques biologiques, respectueuses du sol et de la biodiversité, représentent un gage de durabilité.
Tous ensemble : agriculteurs, citoyens, experts, encadrants, politiques, etc. développons et diffusons les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse pour continuer à cheminer ensemble sur la voie vers Une Wallonie sans pesticides !
Louvain-la-Neuve, le 28 avril 2023 : Nature & Progrès, organise un évènement de restitution des alternatives aux pesticides en cultures de pomme de terre et légumes plein champs, à l’UCL. Cet évènement vise à résumer les méthodes observée en fermes BIO en 2021 et 2022.
Quatres personnes ont pris la parole durant cet évènement : Catherine Buysens (Agronome chez Nature & Progrès), Gilles Parotto (Représentant du Cabinet de la Ministre de l’Environnement Céline Tellier), Julien Piqueray (Natagriwal), et le Professeur Stephan Declerck (UCL). Julien Piqueray a présentédes outils pour favoriser la biodiversité dans nos systèmes agricoles et le ProfesseurStephan Declercka expliquél’importance de la vie du sol et en particulier les champignons mycorhiziens.
L’événement a attiré une soixantaine de personnes, notamment des agriculteurs, des journalistes, des étudiants et des experts du domaine agricole/environnement.
Le rapport « La Belgique, le royaume des pesticides » dresse un état des lieux critique de la situation dans notre pays en matière de pesticides et dénonce certaines pratiques de l’administration fédérale en charge de l’évaluation et de l’autorisation des pesticides, incompatibles avec le règlement européen sur les pesticides qui impose un haut niveau de protection de la santé de la population et de l’environnement. De plus, de telles pratiques viennent contredire l’objectif de réduction des pesticides prévu dans l’Accord de gouvernement.
Pour tenter d’expliquer pourquoi notre pays est l’un des plus mauvais élèves en termes d’utilisation de pesticides en Europe, PAN Europe et Nature & Progrès Belgique se sont penchées sur les pratiques défaillantes de la Direction générale Animaux, Végétaux et Alimentation du SPF Santé Publique, sous la tutelle du ministre fédéral de l’Agriculture.
La belgique, mauvaise élève
• Un tiers des autorisations sont octroyées à des pesticides classés cancérigènes, toxiques pour la reproduction, nocifs pour les bébés nourris au lait maternel, et/ou toxiques pour certains organes à la suite d’expositions répétées ou d’une exposition prolongée • 26 % des autorisations de pesticides en Belgique sont données à des produits classés cancérigènes et/ou toxiques pour la reproduction, soit plus de 400 autorisations • 16 % des pesticides autorisés en Belgique sont susceptibles d’altérer les fonctions sexuelle et reproductive et impactent potentiellement le développement du foetus • 16 fongicides toxiques pour les bébés nourris au lait maternel sont autorisés en Belgique • 10 % de pesticides « très toxiques » parmi les pesticides « amateurs » autorisés en Belgique • Un quart des pesticides autorisés en Belgique sont des pesticides hautement toxiques (candidats à la substitution) qui devraient être remplacés par des alternatives plus sûres • Plus de 300 pesticides commercialisés en Belgique contiennent au moins une substance active identifiée comme hautement toxique au niveau européen • 34 % des fruits et légumes belges contaminés par au moins un pesticide hautement toxique entre 2011 et 2019 – dont 87 % des poires et 53% des pommes contaminés en 2019 – soit une augmentation de 53% en 9 ans • La Belgique est le 8ème pays ayant le plus dérogé à une interdiction de pesticides au niveau européen pour protéger la santé et l’environnement entre 2019 et 2022 • Le nombre de dérogations d’urgence en Belgique a augmenté de plus de 350 % entre 2011 et 2020. A titre de comparaison au niveau européen, le nombre d’autorisations d’urgence a augmenté de plus de 300% entre 2011 à 2018 en Europe contre plus de 400% en Belgique pour la même période.
L’inaction belge en matière de substitution des pesticides les plus dangereux Du fait de la reconnaissance au niveau européen de leur extrême dangerosité pour la santé et l’environnement, le règlement européen sur les pesticides conditionne la disponibilité de certains pesticides à l’absence de produits moins toxiques ou d’alternatives non chimiques.
Mais plutôt que d’organiser leur disparition progressive en promouvant les méthodes de protection des cultures plus soutenables, l’administration belge soustrait arbitrairement depuis 2015 de nombreux pesticides hautement toxiques à cette obligation de substitution, et ce, en contradiction totale avec les dispositions légales européennes (Article 50 du Règlement (CE) n° 1107/2009). Autrement dit, l’administration belge permet aux entreprises agrochimiques de continuer à vendre ces produits toxiques sans rechercher d’alternatives plus sûres. Pour cela, il leur suffit, par exemple, de faire une demande d’autorisation incluant au moins une petite culture, représentant actuellement 85 % des autorisations concernées. Cette pratique est contraire aux lois européennes.
Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature & Progrès Belgique : « Avec ce système, les agriculteurs ont une marge de manoeuvre réduite, l’administration fédérale ne leur permettant pas d’avoir accès à des alternatives efficaces et sûres, pour leur production mais aussi pour leur santé. »
Des dérogations d’urgence en augmentation de plus de 350 % depuis 2011 Lorsque l’Union européenne interdit un pesticide en raison de ses effets nocifs sur la santé ou l’environnement, elle permet aux Etats membres de déroger à cette interdiction sous certaines conditions et pour une période de 120 jours. Cependant, le SPF Santé a régulièrement recours à cette procédure de dérogation d’urgence alors même que des alternatives existent.
L’administration a notamment utilisé cette disposition pour prolonger l’utilisation de pesticides tels que le fongicide Mancozèbe et l’herbicide Asulam, en sursis ou interdit au niveau européen pour leur toxicité excessive. Ce faisant, l’administration contourne la procédure ordinaire et ne favorise pas la recherche de solutions alternatives.
« En multipliant les recours abusifs aux dérogations d’urgence, non seulement l’administration ne favorise pas la recherche de solutions non-chimiques mais elle donne un faux message aux agriculteurs : il n’existerait soi-disant pas d’autres solutions que les pesticides chimiques de synthèse pour protéger leurs cultures. », précise Isabelle Klopstein, chargée de campagne de sensibilisation à Nature & Progrès.
Non seulement les demandes de dérogations ne sont pas fournies en fonction du respect de la législation sur les situations d’urgence mais une évaluation approfondie, qui permettrait un haut niveau de protection de la santé humaine, animale et de l’environnement est, d’après les documents étudiés, complètement absente des pratiques de l’administration.
Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe indique : « L’administration accepte les arguments avancés par les demandeurs de dérogations sans exiger d’études chiffrées ou des résultats d’études en champs pour étayer ces arguments. Il suffit apparemment de mentionner le mot-clé « non-rentable » ou « résistance » pour que la dérogation soit accordée. »
Bruxelles, le 27 mars 2023 : Nature & Progrès, PAN Europe ainsi que Canopea organisent un colloque à la chambre des représentants. Ce colloque vise à identifier un certain nombre de dysfonctionnements dans les procédures d’autorisations de pesticides, tout en mettant en avant des solutions pour une agriculture plus respectueuse de l’environnement et de la santé des citoyens et des agriculteurs.
Cinq personnes ont pris la parole durant ce colloque : Isabelle Klopstein (Chargée de campagne de sensibilisation chez Nature & Progrès), Martin Dermine (Directeur exécutif de Pesticide Action Network (PAN) Europe), Heleen de Smet ( chargée de plaidoyer et porte-parole de Bond Beter Leefmilieu (BBL)), Sarah de Munck (chargée de mission Santé chez Canopea) et Charles-Albert de Grady (agriculteur à Horion-Hozémont en province liégeoise et membre fondateur de la coopérative ORSO). La première partie était orchestrée par Séverine de Laveleye (Ecolo, Députée de la Chambre des représentants de Belgique) et a bénéficié de l’intervention de Marc Fichers (expert pesticides chez Nature & Progrès). La seconde partie par Marie Arena (PS, eurodéputée).
L’événement a attiré une cinquantaine de personnes, notamment des députés, des journalistes et des membres et représentants d’ONG et associations environnementales.
Le 19 janvier dernier, la Cour de Justice de l’UE a clarifié que les Etats membres ne pouvaient pas fournir de dérogation pour l’utilisation de pesticides expressément interdits en Europe. Le même jour, le SPF Santé publique a communiqué sur l’octroi d’une nouvelle dérogation pour l‘Indoxacarbe, un insecticide hautement toxique interdit en EU depuis 2022. Deux courriers envoyés par les 2 associations et demandant au Ministre Clarinval d’annuler ces dérogations sont restés sans réponse. Les 2 organisations assignent le ministre en justice pour non-respect de la loi.
Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature & Progrès Belgique :« La santé des citoyens et la qualité de leur environnement doivent être une priorité pour nos politiques, surtout quand on sait que de nombreuses alternatives existent à l’usage de pesticides hautement toxiques. Notre action vise à faire respecter l’arrêt de la Cour.« .
Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe indique: « Il a été clairement établi que la Belgique exerce un lobbying au niveau européen pour restreindre la portée de l’arrêt de la Cour aux seuls néonicotinoïdes. Or, la Commission européenne a récemment confirmé que pour elle, cet arrêt porte sur l’ensemble des pesticides interdits en UE. Le Ministre Clarinval place une nouvelle fois notre pays dans le camp des pays pro-pesticides, qui favorisent les intérêts de l’agrochimie aux dépens de la santé des citoyens et de l’environnement.«
En 2018, la Commission européenne a interdit les néonicotinoïdes afin de protéger les pollinisateurs. En 2019, suite à l’octroi d’une dérogation pour l’usage de néonicotinoïdes en betteraves, Nature & Progrès Belgique et PAN Europe ont intenté un recours devant le Conseil d’Etat. Ce dernier a accepté d’envoyer des questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’UE afin de clarifier les possibilités d’utilisation des dérogations. Cette dernière a rendu un arrêt le 19 janvier 2023, dans lequel elle indique que fournir une dérogation pour un pesticide expressément interdit pour protéger la santé humaine et l’environnement n’est pas légal.
L’Indoxacarbe est un insecticide interdit d’utilisation en UE depuis mars 2022. Il est particulièrement toxique pour la faune sauvage et les pollinisateurs et présente un risque pour les eaux souterraines. Les études disponibles indiquent une toxicité excessive pour les consommateurs et les travailleurs.
Nature & Progrès Belgique et PAN Europe ont envoyé une première lettre au Ministre Clarinval le 30 janvier 2023 portant à son attention le fait que l’arrêt de la Cour concerne également la dérogation sur l’Indoxacarbe et lui enjoignant d’annuler cette dérogation qui prendra effet en mai 2023.
PAN Europe a eu accès à un courrier envoyé par la Belgique à la Commission européenne et aux autres Etats membres dans lequel le SPF promouvait une interprétation très restrictive de l’arrêt, à savoir, permettant de continuer à fournir des dérogations pour des pesticides hautement toxiques, autres que les néonicotinoïdes. Le 6 mars dernier, la Commission européenne a confirmé devant le Parlement européen que l’arrêt concernait l’ensemble des pesticides interdits en UE, ainsi que dans un courrier envoyé à PAN Europe.
En l’absence de réponse de la part du Ministre Clarinval, Nature et Progrès Belgique et PAN Europe ont envoyé une lettre de mise en demeure au Ministre le 24 février 2023 lui rappelant ses obligations et annonçant une action en justice.
Le 17 mars, les 2 associations ont assigné le Ministre en justice afin de lui imposer de respecter l’arrêt, afin de protéger la santé des citoyens et l’environnement.
Informations générales
Pesticide Action Network (PAN) Europe œuvre au niveau européen pour faire évoluer les législations et leur mise en œuvre trop favorables aux pesticides, et possède une réelle expertise dans le domaine des règlementations. Nature & Progrès Belgique, par son réseau d’agriculteurs Bio, a développé une expertise importante en matière de recensement et de démonstration des alternatives aux pesticides.
En dépit de l’arrêt historique rendu par la Cour de Justice de l’Union européenne (UE) en janvier, la Belgique refuse de retirer l’autorisation d’un pesticide interdit dans l’UE. Ce lundi 27 février, Nature & Progrès et PAN Europe ont donc mis en demeure le ministre fédéral de l’agriculture Mr Clarinval. Si la Belgique ne se conforme pas à l’arrêt et à la réglementation sous 15 jours, les organisations saisiront les tribunaux compétents pour qu’elles condamnent cette décision ou toute nouvelle décision contraire à cet arrêt de la Cour.
Le 19 janvier 2023, la Cour de Justice de l’Union européenne a en effet confirmé que le recours à l’article 53 du Règlement européen sur les pesticides pour autoriser des produits contenant des substances actives expressément interdites dans l’Union européenne était illégal, quelle que soit la méthode d’application du produit. Le même jour, la Belgique annonçait l’autorisation temporaire d’un insecticide à base d’indoxacarbe, une substance active dont le renouvellement a été refusé par la Commission européenne en novembre 2021. L’évaluation européenne de cette substance avait notamment relevé un risque élevé pour la santé des consommateurs et des travailleurs ainsi que pour l’environnement.
«Fin janvier, nous avons adressé un courrier au ministre lui demandant d’annuler, sans délai, la dérogation fournie pour l’usage de l’indoxacarbe. Ce courrier étant resté sans réponse, la mise en demeure s’impose pour faire respecter en Belgique l’arrêt de la Cour de l’Union européenne », précise Isabelle Klopstein, chargée de campagne de sensibilisation à Nature & Progrès.
Le 15 février, le journal Politico a révélé que la Belgique faisait pression auprès de la Commission européenne pour que celle-ci ne reconnaisse pas toute la portée de l’arrêt de la Cour et laisse les Etats-membres continuer à autoriser des pesticides interdits au titre de l’article 53. Selon ces Etats-membres, l’arrêt ne s’appliquerait qu’à l’autorisation de pesticides interdits pour traiter des semences (et non pour les autres utilisations).
En outre, le 15 février, le Ministre Clarinval a trompé le Parlement fédéral en affirmant que la dérogation pour l’utilisation de l’indoxacarbe était légale, allant ainsi à l’encontre de l’arrêt de la Cour. Il a également cité sélectivement l’arrêt pour justifier la position de la Belgique en faveur de l’utilisation de pesticides interdits. Nous citons : « Le paragraphe 48 de l’arrêt en objet mentionne les termes devrait primer. Le conditionnel indique que, si la protection de la santé et de l’environnement est effectivement primordiale, elle n’est pas la seule à devoir être prise en considération. C’est sur un subtil équilibre entre la protection de la santé et de l’environnement et la protection des productions végétales que les dérogations d’autorisation sont bâties. » Fin de citation. Pourtant, l’arrêt est très clair : aucun compromis entre protection de la santé et de l’environnement d’une part et les rendements agricoles de l’autre ne peut avoir lieu. Si un pesticide est interdit pour protéger la santé et l’environnement, il ne peut y avoir de dérogation.
La mise en demeure de la Belgique envoyée au Ministre Clarinval demande donc l’annulation de la décision de la Belgique autorisant l’utilisation de l’indoxacarbe dans les 15 jours. Cette décision sera un test crucial pour la capacité de l’Union Européenne à faire respecter les règles de sécurité pour la santé humaine et animale ainsi que pour l’environnement en matière de pesticides.
La Belgique a octroyé 13 dérogations entre 2019 et 2022 pour l’utilisation de substances interdites dans l’UE, faisant de ce pays le 8ème plus mauvais élève des 27.
Informations générales
Pesticide Action Network (PAN) Europe œuvre au niveau européen pour faire évoluer les législations et leur mise en œuvre trop favorables aux pesticides, et possède une réelle expertise dans le domaine des règlementations. Nature & Progrès Belgique, par son réseau d’agriculteurs Bio, a développé une expertise importante en matière de recensement et de démonstration des alternatives aux pesticides.
Bruxelles, le 7 février 2023 : 420.757 signatures de citoyens européens de 18 Etats membres, recueillies en 6 mois ont été remises aux autorités européennes devant le Parlement européen à Bruxelles, sur fond d’un jeu scénique basé sur la roue de la fortune.
Après la présentation de la raison d’être de cette pétition européenne, des demandes précises ont été formulées à la Commission européenne par des représentants d’une coalition européenne d’ONGs comprenant des associations belges dont Nature et Progrès et Canopéa. S’en sont suivies les déclarations de représentants de la Commission, Madame Irene Sanchez (chef unité Biotechnologie, DG Santé) et Monsieur Klaus Behrend (chef unité Pesticides, DG Santé) et des parlementaires européens, Madame Anja Hazekamp (GUE/NL) et Messieurs Eric Andrieu (Socialistes & Démocrates) et Martin Hausling (Verts).
La problématique
Les multinationales monopolistiques fusionnées sous les bannières Corteva, Bayer/Monsanto et Chemchina qui commercialisent à la fois pesticides, organismes génétiquement modifiés (OGM) et semences, sous brevets, veulent imposer sur le marché leurs nouveaux OGM produits par de nouvelles technologies. Ceci en dehors de toute traçabilité et de tout étiquetage « OGM » et de tout contrôle strict de leur impact sur la santé et l’environnement prévu dans la législation actuelle. Ces multinationales forceraient ainsi les aliments génétiquement modifiés à se retrouver dans nos champs et nos assiettes, sans que nous ne le sachions.
En juillet 2018, la Cour de Justice de l’Union européenne a arrêté que ces nouveaux OGM étaient des OGM à part entière et devaient, de ce fait, continuer à relever de la Directive actuelle 2001/18/CE relative aux OGM. La solution préconisée par le lobby des multinationales et acceptée par la Commission et certains Etats membres a alors été de concevoir, pour ces nouveaux OGM, une nouvelle Directive beaucoup plus laxiste. Cette proposition de nouvelle Directive, qui sera publiée par la Commission aux environs du 7 juin 2023, réduira fortement les frais des compagnies relatifs aux tests d’innocuité pour la santé et l’environnement actuellement requis et aux autres informations à fournir pour évaluer l’opportunité de mettre ces nouveaux OGM sur le marché. La procédure d’autorisation serait aussi plus rapide.
Les arguments des lobby
Pour arriver à leurs fins, des arguments de lobby infondés ont été avancés par l’industrie, tout comme il y a plus de 20 ans, avant l’adoption de la Directive 2001/18/CE. A présent, les promesses jamais tenues depuis 20 ans sont souvent encore les mêmes. Mais elles sont transposées dans le contexte des inquiétudes et crises du jour.
Les arguments de l’industrie contestés ont trait à la prétendue innocuité du processus technologique nouveau, à la soi-disant résolution des problèmes dus aux changements climatiques, à la réduction prétendue de l’utilisation des pesticides, à l’amélioration affirmée de la durabilité de l’agriculture, à la sécurité alimentaire par la promesse non tenue depuis plus de 20 ans d’amélioration du rendement, à l’impossibilité prétendue de détection analytique des nouveaux OGM.
Les risques
La déréglementation des nouveaux OGM, prônée par les multinationales précitées, et l’exploitation maximale par celles-ci des failles de la réglementation relative aux brevets concourent à la privatisation progressive de toute la filière alimentaire mondiale afin de maximiser et de pérenniser les profits de ces compagnies. Ces stratégies risquent de faire disparaître peu à peu le secteur de la sélection variétale conventionnelle, technique performante dépourvue de manipulation génétique. Car (1) Les brevets sur les produits « nouveaux OGM » s’étendent aux plantes produites par la sélection conventionnelle qui présenteraient les mêmes nouvelles caractéristiques ou traits innovants et, de plus (2), des brevets sur des gènes d’intérêt de variantes génétiques sauvages sont aussi accordés à l’industrie qui, ayant fait un séquençage de l’ADN et repéré des gènes d’intérêt, revendique ici une « invention intellectuelle ». Ces brevets couvrent alors l’utilisation de ces variations génétiques naturelles. La sélection conventionnelle se retrouve dès lors privée du recours libre à la biodiversité des plantes naturelles afin de les améliorer, sans recours à la biotechnologie.
Nous tenons toutefois à préciser que nous ne nous opposons pas à la dispersion dans l’environnement des nouveaux OGM mais estimons impératif de les soumettre, avant mise sur le marché, à un contrôle strict des risques pour la santé et l’environnement. Leur traçabilité parfaite et leur étiquetage doivent également être assurés afin, notamment, de préserver le droit de choisir des agriculteurs et des citoyens-consommateurs. Nous nous opposons fermement à l’octroi abusif de brevets et, par-là, à la main mise sur la diversité variétale naturelle et la sélection variétale conventionnelle, garantes de la résilience bien nécessaire à l’agriculture.
Aujourd’hui, la Cour de justice de l’UE (CJUE) a publié un jugement préliminaire sur des questions posées par le Conseil d’Etat belge, suite à une plainte de Nature & Progrès Belgique, PAN Europe et un apiculteur belge. La Cour a déclaré que le fait de prévoir des dérogations pour le traitement des semences avec un pesticide interdit et leur utilisation n’est pas conforme au droit européen. Cet arrêt met un terme à près de la moitié des dérogations accordées par les États membres aux pesticides interdits.
Hans Muilerman, en charge des produits chimiques à PAN Europe a déclaré : « PAN Europe se bat contre cette mauvaise administration depuis de nombreuses années. Cette décision historique de la Cour de justice de l’UE met fin à 10 ans d’abus de la part des États membres, avec la bénédiction de la Commission européenne. Grâce à notre action, l’environnement de l’UE deviendra un endroit plus sûr. »
En 2019, Nature & Progrès Belgique, un apiculteur individuel belge et PAN Europe ont déposé une demande d’annulation devant le Conseil d’Etat belge. Cela faisait suite à une dérogation accordée par la Belgique au lobby du sucre pour l’utilisation d’insecticides néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles sur les betteraves sucrières. Les plaignants ont suggéré à la Cour belge de poser des questions préjudicielles à la CJUE afin de clarifier les limites de la loi en matière de dérogations.
Marc Fichers, Secrétaire Général de Nature & Progrès Belgique a déclaré : « Ce succès aura un effet à l’échelle de l’UE, pour protéger les abeilles et les insectes dans toute l’UE, ainsi que la santé des citoyens. Les dérogations avec des semences traitées aux néonicotinoïdes sont désormais définitivement interdites. Ce jugement est un soulagement et montre que l’environnement et la santé comptent plus que les intérêts de certaines entreprises de sucre et de pesticides !«
La Commission européenne, la France, la Grèce, la Hongrie et la Finlande ont rejoint la procédure devant la Cour de justice de l’UE. La Belgique, ainsi qu’une entreprise belge de pesticides (SES Vanderhave) et le lobby du sucre belge sont également intervenus pour protéger leurs intérêts.
Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe, a ajouté : « Au cours de la procédure, il a été très choquant de constater que la Commission européenne a continué à protéger les abus du système par les États membres. La Commission a soutenu l’octroi de dérogations pour des pesticides prétendument interdits par l’UE et hautement toxiques pour la santé humaine et l’environnement. Il était évident que la Commission était du côté de l’agrobusiness, plutôt que de la santé des citoyens et de l’environnement ! Les avocats de la Commission européenne ont même affirmé devant les juges européens que les États membres n’accordent une dérogation que lorsqu’il n’existe aucune alternative, ce qui est contraire à la réalité !«
PAN Europe a récemment publié un rapport sur les dérogations accordées par les États membres aux substances pesticides interdites par l’UE : 236 dérogations de ce type ont été accordées au cours des 4 dernières années. Les néonicotinoïdes représentent près de la moitié de ces dérogations (47,5%). Le rapport souligne que les États membres n’évaluent pas la nécessité de ces dérogations et leur conformité avec le droit européen, favorisant ainsi l’agrobusiness au détriment de la protection de la santé des citoyens et de l’environnement.
Me Antoine Bailleux, notre avocat, a ajouté : « Cet arrêt constitue un énorme pas en avant pour la préservation de la biodiversité en Europe. La Cour de justice a clairement indiqué que les pesticides interdits au niveau de l’UE pour des raisons sanitaires ou environnementales ne peuvent être introduites par des moyens détournés au niveau des États membres, ce qui était devenu une pratique courante. Elle a également confirmé que la protection de la santé et de l’environnement l’emporte sur l’objectif d’amélioration de la production végétale. »
Martin Dermine a conclu : « C’est un grand jour pour les pollinisateurs européens et pour notre environnement. La législation européenne sur les pesticides donne la priorité à la santé des citoyens et à l’environnement, mais son application au niveau européen et national laisse à désirer. Ce verdict est un rappel que les administrations et les politiciens sont soumis au respect de la loi, et non aux intérêts de l’industrie des pesticides, ou des lobbies agricoles industriels. »
Informations générales
Les insecticides néonicotinoïdes ont été autorisés dans l’UE dans les années 90. Après 20 ans de dommages sur les populations d’insectes de l’UE, la Commission européenne et les États membres ont partiellement restreint leur utilisation en 2013, aux cultures qui ne sont pas attractives pour les pollinisateurs. Une série d’États membres de l’UE ont immédiatement émis des dérogations pour continuer à les utiliser malgré l’interdiction. En 2018, suite à l’interdiction de toutes les utilisations extérieures, le nombre de dérogations a même augmenté de manière significative.
« La Cour souligne également l’obligation pour tous les États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une lutte contre les organismes nuisibles à faible apport en pesticides, en donnant la priorité aux méthodes non chimiques chaque fois que cela est possible. Une telle obligation implique que les utilisateurs professionnels de pesticides se tournent vers les pratiques et les produits disponibles présentant le plus faible risque pour la santé humaine et l’environnement pour faire face à un problème parasitaire. »
Comment favoriser la biodiversité, produire une eau exempte de résidus de pesticides et avoir une agriculture rentable ? C’est à cette question que Nature & Progrès a voulu répondre dans le cadre du projet Plan Bee.
Encourager un système agricole exempt de pesticides chimiques de synthèse en parallèle à l’implantation de mesures accueillant la biodiversité et de ressources florales est primordial ! L’intégration de cultures mellifères/entomophiles (sarrasin, bourrache, moutarde, fleurs sauvages, etc.) dans les assolements agricoles testée sur les terrains Plan Bee s’est avérée rentable tout en nourrissant nos pollinisateurs et auxiliaires des cultures qui sont des solutions pour pouvoir se passer des pesticides.
Comme elles sont de bons indicateurs de notre environnement, durant 3 ans, des abeilles mellifères & solitaires ont sillonné 5 sites d’étude Plan Bee, des sites de captage d’eau de la Société Wallonne des Eaux. Elles ont permis d’évaluer l’état de l’environnement proche et éloigné en matière de pesticides et ressources florales. Elles offrent ainsi aux acteurs de la protection des ressources en eau, une méthode de signalisation des sites à risques de contamination par les pesticides.
Objectif 1 : augmenter l’(agro)-biodiversité
L’objectif principal du Plan Bee est d’étudier la faisabilité agronomique, apicole et économique d’implanter des cultures mellifères sans pesticides sur de grandes surfaces pour produire du miel et des produits dérivés tout en favorisant l’entomofaune sauvage. Une collaboration apiculteurs/agriculteurs a été développée pour diversifier les produits agricoles. Les cultures mellifères peuvent être valorisées en semences, farines, huiles, condiments, engrais verts, etc. Les arbres, haies et autres vivaces constituent aussi des ressources pour la production de miel et l’accueil de la faune. La demande de miel étant plus grande que l’offre en Wallonie, il est important de favoriser ces cultures mellifères et l’apiculture wallonne. De plus, des grandes zones non-agricoles comme les sites de captages d’eau peuvent aussi être des lieux de biodiversité et servir de ressources alimentaires pour les abeilles.
Résultat : Ces premiers essais sont encourageants ! Nature & Progrès continue à œuvrer afin de développer l’agriculture biologique, les alternatives aux pesticides et diversifier les produits agricoles par l’implantation de cultures mellifères.
Objectif 2 : évaluer l’état de l’environnement à l’aide des abeilles
Le second objectif du Plan Bee était d’étudier l’état de notre environnement à l’aide des abeilles mellifères et osmies (abeilles solitaires). Un environnement sain est indispensable pour leur survie. Les abeilles mellifères ont un rayon de butinage de l’ordre de 3 km alors que les osmies ont un rayon de butinage de 300 m. Les secondes nous donnent donc l’état de l’environnement sur une plus petite distance. Quelles fleurs les abeilles ont-elles butinées [1] ? Quels sont les résidus de pesticides relevés par les abeilles sur les différents sites Plan Bee ? [2] Les résultats ont ensuite été comparés avec les analyses de résidus de pesticides retrouvés dans les eaux de captage [3] et dans le sol [4]. Cela a permis de déceler les contaminants auxquels une population (humaine, d’abeilles) est effectivement exposée. En ce compris les « effets cocktails » de ces contaminants dont les risques toxiques sont évalués individuellement alors que leurs effets devraient être analysés ensemble.
Résultat 1 : de nombreux résidus de pesticides en régions de grandes cultures…
Des résultats marquants en termes de présence de pesticides ont été observés en comparant les sites dont les environnements sont très différents : Orp-Jauche, une région de grandes cultures où les céréales, pommes de terre, betteraves et autre légumes plein champ conventionnels sont bien présents et Ciney, une région de terres d’élevage où les prairies et cultures céréalières (de plus en plus bio) dominent.
Dans le pain d’osmies , nous avons retrouvé à des concentrations élevées principalement des résidus d’herbicides pour les différents sites, excepté à Ciney où les herbicides sont à l’état de traces. Il s’agit surtout d’herbicides appliqués en culture de betterave, pomme de terre, légumes, céréales, maïs ou fruitiers et du tristement connu glyphosate. Quelques résidus de fongicides ont été retrouvés à des concentrations élevées (à Orp-Jauche, Thiméon et Ciney) principalement là où il y avait du colza ou des céréales proches des hôtels d’étude. En termes de résidus d’insecticides, nous avons des insecticides utilisés en fruitiers ou pommes de terre qui reviennent souvent à l’état de traces ou à de concentrations plus élevées à Orp-Jauche.
Les abeilles mellifères ont butiné une diversité de plantes plus importante que les osmies étant donné leur période de butinage plus étendue et leur rayon de butinage plus élevé. Néanmoins, nous constatons que de nombreuses plantes ont été butinées par les deux. Elles ont donc pu partager leurs ressources.
Dans leur pollen et pain d’abeille , nous avons observé principalement des résidus de fongicides et herbicides à des concentrations élevées et parfois supérieures à la Limite Maximale de Résidus (LMR) autorisées dans le pollen destiné à la consommation humaine, mais également des résidus d’insecticides. Il s’agit en général des mêmes molécules que celles retrouvées dans le pain d’osmies avec en plus des pesticides appliqués en été. A Ciney, les résidus de pesticides étaient nettement moins nombreux et à l’état de traces.
–> Les osmies comme les abeilles mellifères ont été exposées à des pesticides appliqués sur des cultures attractives aux pollinisateurs mais également des pesticides appliqués sur des cultures non attractives. Cela suppose qu’en plus d’une contamination directe du pollen, une contamination du pollen butiné via des dérives de ces pesticides sur plantes voisines ou à travers des plantes indésirables s’est produite.
Résultat 2 : certains de ces résidus de pesticides se retrouvent également dans les eaux de captage
Plusieurs pesticides détectés dans les substrats d’abeilles (ou leurs métabolites) ont également été détectés dans les eaux de captage et le sol, et y sont persistants. Certains ont déjà été retirés du marché, d’autres y sont toujours. Il faudra attendre plusieurs années pour que certains pesticides appliqués dans le passé disparaissent de nos eaux de captage. Il est grand temps d’interdire ceux qui sont encore sur le marché.
Toutes les substances retrouvées dans les substrats d’abeilles ne sont pas systématiquement recherchées dans l’eau. Une analyse doit être réalisée pour voir si ceux-ci peuvent arriver jusqu’aux nappes d’eau souterraines pour éventuellement étendre les recherches. Certaines se trouvent sur la liste des 12 pesticides dangereux pour la santé de l’Homme ou l’environnement pour lesquelles l’Europe a demandé des candidats à la substitution. Le Plan Bee vient de prouver que les abeilles sont un indicateur de l’environnement intéressant pour jauger la présence de pesticides dans l’environnement et ainsi signaliser les sites à risques de contamination. Les abeilles sont nos alliées, protégeons-les !
Mettons en avant les alternatives aux pesticides !
Les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse sont déjà bien développées chez nos agriculteurs wallons. Il reste néanmoins encore de nombreuses terres à libérer et à aménager avec des ressources florales. La meilleure issue pour réduire les coûts d’assainissement de l’eau, ce sont : des producteurs faisant le pari d’une production sans pesticides et des apiculteurs qui collaborent pour augmenter les rendements, éclairés par les structures de soutien existantes et soutenus par des consommateurs soucieux de leur santé et de leur environnement.
[1] Analyses réalisées par le Centre Apicole de Recherche et d’Information (CARI) et le Centre wallon de Recherches agronomique (CRA-W) [2] Analyses réalisées par le CRA-W [3] Analyses réalisées par la SWDE [4] Réalisées par le CRA-W et l’Institut Scientifique de Service Public (ISSeP)
Le Ministre fédéral de l’Agriculture David Clarinval a enfin posé un geste pour l’environnement : fini les dérogations abusives pour les semis de betteraves à sucre enrobés de néonicotinoïdes, ces pesticides tueurs d’abeilles. Nature & Progrès et PAN Europe (Pesticide Action Network Europe) saluent la démarche mais en veulent plus. Nous attendons du Ministre qu’il mette un terme aux dérogations fournies pour l’exportation de semences traitées aux néonicotinoïdes ainsi que toute dérogation aux restrictions européennes sur les nouveaux néonicotinoïdes.
Cela fait vingt ans que Nature & Progrès agit pour protéger les abeilles des dégâts occasionnés par l’utilisation des insecticides néonicotinoïdes, malgré l’entêtement du secteur betteravier et des autorités. Au terme de nombreuses actions, trois insecticides tueurs d’abeilles (le thiaméthoxame, l’imidaclopride et la clothianidine) ont finalement été interdits par l’Europe en 2018, suivis en avril dernier par le sulfoxaflor, insecticide au même mode d’action susceptible d’occasionner les mêmes dégâts environnementaux.
La Belgique a honteusement passé outre ces interdictions, les autorisant en plein champs sous le régime des dérogations… Il était temps que le pays s’aligne sur les décisions européennes adoptées dans l’intérêt de l’environnement et des polinisateurs !
En Belgique, l’enrobage des semences de betteraves sucrières par des néonicotinoïdes est chose courante en agriculture conventionnelle pour lutter contre la jaunisse de la betterave transmise par les pucerons. Un problème évitable pour la biodiversité lorsque l’on sait que des alternatives efficaces existent.
Si un pesticide nuit aux insectes polinisateurs, qu’est-ce qui justifie que la Belgique l’autorise ailleurs ?
Si le Ministre de l’Agriculture montre le souhait de ne plus polluer le pays, il serait logique de prendre les mêmes mesures à l’extérieur. Pourtant, deux autorisations d’urgence (Thiamétoxam et Imidaclopride) vient une nouvelle fois d’être octroyée pour le traitement et l’exportation de semences traitées aux néonicotinoïdes vers des pays tiers, dont les pays européens. Comment se satisfaire d’une victoire aussi peu glorieuse ?
En 2022, SOS Faim a lancé la campagne choc « Interdits ici, exportés là-bas : mortels partout ! ». Elle se penche sur la question des exportations de pesticides interdits et le rôle majeur que joue la Belgique dans ce commerce toxique et immoral, causant, dans le monde, un désastre humain et écologique.
Qu’en est-il des autres pesticides interdits plus récemment comme le sulfoxaflor ?
Nature & Progrès et PAN Europe sont également préoccupées par la possible autorisation temporaire de cet insecticide de type néonicotinoïde utilisé en betterave, et tout aussi nocif, sinon plus car appliqué par pulvérisation. La Commission européenne a limité son utilisation aux serres permanentes en avril 2022. Le Ministre pourrait néanmoins décider d’octroyer de nouvelles dérogations au sulfoxaflor en 2023 comme il l’a déjà fait cette année. En soutenant la décision de restriction européenne, le Ministre reconnaissait pourtant qu’un risque pour les abeilles lié à l’utilisation du sulfoxaflor en plein air ne pouvait pas être exclu.
Vers des moyens de lutte alternatifs
Les dérogations, octroyées sous la pression de l’industrie sucrière pour garantir ses rendements, ont donné un faux message aux agriculteurs betteraviers : il n’existerait soi-disant pas d’autres solutions que les néonicotinoïdes pour protéger leurs cultures.
Or, les alternatives aux néonicotinoïdes sont diverses et reposent en grande partie sur la combinaison de plusieurs méthodes préventives, associées à des mesures bien connues en bio, comme celles utilisées par les producteurs de la coopérative belge Organic Sowers (Orso). Pour préparer la culture à affronter ces menaces, les producteurs d’Orso utilisent notamment la technique du faux semis, l’allongement des rotations – de cinq à sept ans – et l’intégration de cultures de printemps et d’automne. Le choix d’une variété plus résistante aux maladies est fortement préconisé – même s’il n’y a pas encore de véritables variétés résistantes, comme on peut les trouver en pommes de terre avec les variétés robustes, par exemple.
Les étapes à venir
En 2019, 2020 et 2021, Nature & Progrès et PAN Europe ont déposé 3 recours devant le Conseil d’Etat contre les dérogations successives de néonicotinoïdes interdits au niveau européen mais autorisés en Belgique. Conformément aux demandes des 2 associations, le Conseil d’Etat a demandé l’avis de la Cour de Justice de l’Union européenne pour mieux clarifier les limites du système de dérogations, et notamment la possibilité d’en fournir tous les ans ou bien de fournir des dérogations pour des pesticides supposés interdits car hautement toxiques. Après l’avis de l’Avocate générale de septembre dernier, un arrêt de la Cour est attendu pour le 19 janvier. Après ces dates, l’affaire reviendra devant le Conseil d’Etat qui devra trancher sur la validité des dérogations de néonicotinoïdes en Belgique.
Les grandes dates de l’histoire des néonicotinoïdes
2001 : les premières recherches sur la toxicité des néonicotinoïdes sur les abeilles sortent. La toxicité de l’imidaclopride est reconnue pour la première fois.
2006 : l’indifférence des pouvoirs publics belges amène Nature & Progrès à organiser une grande journée d’étude à Namur. L’association renouvelle sa demande d’application urgente du principe de précaution et de suspension immédiate de l’imidaclopride sur tout le territoire belge.
2007 : A la Direction Générale de la Santé des Consommateurs de la Commission européenne, on se dit prêt à revoir les méthodes d’évaluation, sur un avis “d’expert”. Un groupe de travail « Risques des pesticides pour les abeilles » se réunit. Trois malheureux citoyens apiculteurs se retrouvent en face de sponsors qui ne sont autres que BASF-Agro, Syngenta, BayerCropscience, etc. Les sous-groupes (dont 2 des 3 présidents sont issus de compagnies phytopharmaceutiques) comptent au moins deux participants issus desdites compagnies.
2012 : enfin, un groupe de travail de l’EFSA rédige un avis scientifique constatant que la toxicité des pesticides mis sur le marché n’a pas été correctement évaluée.
2013 : Suite à l’avis de l’EFSA sur les risques associés à l’utilisation de trois néonicotinoïdes (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame), la Commission européenne interdit le 29 avril 2013 leur usage pour les cultures attractives pour les abeilles. Collaborant désormais avec PAN Europe, Nature & Progrès se réjouit de la décision européenne. Leur utilisation par les particuliers n’est désormais plus non plus autorisée.
2015-2016 : la France et l’Allemagne interdisent les néonicotinoïdes. La Belgique, elle, discute toujours, forte d’un secteur betteravier pour qui le devenir des abeilles importe peu.
2018 : l’EFSA publie enfin une évaluation montrant que la plupart des utilisations de néonicotinoïdes présentent un risque pour les abeilles sauvages et mellifères. Les États membres de l’UE adoptent la proposition de la Commission interdisant 3 néonicotinoïdes : clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame. Bien entendu, une interdiction européenne d’utiliser un pesticide est toujours assortie d’une possibilité de dérogation… Le Ministre fédéral de l’Agriculture de l’époque, Denis Ducarme, autorisa dans la foulée, sur la base de la dérogation de cent vingt jours, les trois néonicotinoïdes incriminés en cultures de betteraves, chicorées, carottes et laitues… C’en est trop pour Nature & Progrès et PAN Europe. Les associations déposent une requête en annulation de la dérogation Ducarme. C’est la justice qui tranchera !
2022 : après 3 années consécutives de dérogations, en novembre 2022 une nouvelle ère s’ouvre sans néonicotinoïdes en Belgique. Affaire à suivre !
Les ONGs belge et européenne Nature & Progrès et PAN Europe ont conjointement demandé au Conseil d’Etat belge qu’il suspende immédiatement l’autorisation de deux insecticides à base de Cyperméthrine. Pour les ONGs, ces autorisations ne sont pas conformes à la réglementation européenne sur les pesticides. Les autorités belges exposent systématiquement et sans fondement légal les citoyens et l’environnement à de nombreuses substances particulièrement toxiques pour lesquelles des alternatives existent.
Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe a commenté : “La cyperméthrine est une substance réputée particulièrement toxique pour les abeilles et les espèces aquatiques, et hautement suspectée de perturbation endocrinienne chez l’humain.”
Sous la pression de plusieurs Etats membres, la substance a été renouvelée pour sept ans de plus par la Commission européenne en 2021, à la condition que sa mise sur le marché soit désormais plus strictement régulée.
Marc Fichers, secrétaire général de Nature & Progrès Belgique a expliqué : “Depuis son renouvellement européen, la cyperméthrine a été identifiée par l’UE comme appartenant à la catégorie des pesticides les plus dangereux pour la santé humaine et pour l’environnement. Ces substances ne peuvent être autorisées par les Etats membres dans un produit pesticide que lorsqu’il a été démontré qu’elles ne peuvent pas être remplacées par une ou des alternatives plus sûres pour la santé humaine et l’environnement.”
Dans les autorisations attaquées (voir les pages web phytoweb dédiées: APHICAR 100 EW et SHERPA 100 EW), les autorités belges n’ont pas pris la peine de conduire d’évaluation comparative du produit contenant la cyperméthrine et des alternatives chimiques et non chimiques disponibles. Contrairement à ce que leur impose le Règlement européen, elles ont renoncé à l’idée même d’une substitution de ces produits, qui ont à la place été autorisés sur un spectre large de culture dont des céréales, des choux et les vignes.
En raison de la toxicité de la substance, les ONGs ont déposé auprès du Conseil d’Etat une demande de suspension en extrême urgence de ces deux autorisations.
Salomé Roynel, chargée de campagne chez PAN Europe a conclu : “La procédure belge est conçue pour empêcher toute forme de substitution de ces pesticides les plus toxiques par des alternatives plus sûres. Nous demandons au Conseil d’Etat belge de sanctionner cette pratique qui est contraire à la réglementation européenne sur les pesticides et expose donc sans fondement légal les citoyens et l’environnement à cette substance particulièrement toxique, comme à tant d’autres”.
La procédure belge dénoncée par les ONGs est décrite dans des lignes directrices nationales qui, en plus de transposer les recommandations européennes, créent une série de conditions nationales dans lesquelles la Belgique pourrait se soustraire à son obligation de substitution des pesticides les plus toxiques.
En mai 2022, la Belgique s’est illustrée comme l’Etat membre dans lequel les résidus de ces pesticides les plus toxiques sont les plus fréquemment retrouvés.
Contexte
La cyperméthrine est une substance insecticide appartenant à la famille des pyréthrinoïdes. Elle est largement utilisée en agriculture pour lutter contre un large spectre d’espèces dont les pucerons, les chenilles, les charançons et les mouches.
La substance a fait l’objet d’une première approbation au niveau européen en 2005 pour 10 ans. A la suite de retards récurrents dans sa procédure de réévaluation, sa période d’expiration a été prolongée cinq fois, jusqu’à son renouvellement en 2021 en tant que substance dont on envisage la substitution.
En Belgique, la cyperméthrine est utilisée sur un grand nombre de céréales dont le froment, l’orge, l’avoine, l’épeautre et le seigle – ainsi que sur les légumes (dont les choux et les pommes de terre), la vigne et les plantes ornementales. Les autorités compétentes belges n’ont jamais appliqué la substitution ni pour cette substance, ni pour aucune autre.
La cyperméthrine a été listée par PAN Europe parmi les 12 substances les plus toxiques, pour lesquelles l’ONG réclame une interdiction immédiate.
Du nouveau en janvier 2023
Suite à la demande de suspension déposé en extrême urgence en décembre, Nature & Progrès et PAN Europe, rejoints par Bond Beter Leefmilieu, poursuivent leur requête devant le Conseil d’Etat pour que soient annulées deux autorisations d’insecticides à base de cyperméthrine, une substance létale pour les abeilles et très toxique pour les espèces aquatiques. Il s’agit aussi d’un perturbateur endocrinien pour l’être humain qui réduit les niveaux d’hormones stéroïdiennes et cause des dommages à la reproduction. Identifiée en 2021 comme très toxique par l’Union européenne, la cyperméthrine, en tant que pesticide dit « candidats à la substitution », ne peut être autorisée qu’en l’absence d’alternatives plus sûres. Or, les autorités belges n’ont ni évalué les possibilités de substitution ni démontré que des alternatives (chimiques ou non chimiques) n’existent pas ou ne sont pas adaptées. En Belgique, la cyperméthrine est notamment autorisée en pomme de terre contre le doryphore et contre le criocère des céréales. Pour Nature & Progrès, PAN Europe et Bond Beter Leefmilieu ces autorisations sont illégales et doivent donc retirées.
Le Bio inscrit son histoire dans le refus d’une agriculture chimique. En Belgique, les producteurs et consommateurs de Nature & Progrès ont été partie prenante de cette évolution. Animés par un idéal commun, ils ont alerté contre les dangers d’une agriculture chimique, fait connaitre et progresser l’agriculture biologique. Mais malgré le développement du Bio, les dérives de pesticides de synthèse s’accumulent dans l’environnement et contaminent l’air, les sols et les lieux de vie.
Si l’industrie de la chimie fabrique des produits de plus en plus toxiques (quelques dizaines de grammes à l’hectare pouvant suffire à éradiquer insectes et adventices), elle a jusque-là lamentablement échoué à innover pour contenir la migration de pesticides à risque hors des lieux de traitement.
En Belgique, l’irresponsabilité de l’industrie face aux dérives de leurs produits se combine à une administration permissive vis-à-vis des pesticides liés à des nombreuses maladies chroniques comme les cancers, ainsi qu’à des effets sur le système immunitaire, le développement cérébral, la thyroïde et les maladies neurodégénératives.
Des mesures anti-dérives qui ne protègent pas la population
L’exposition environnementale (non alimentaire) de la population wallonne aux pesticides a été analysée entre 2016 et 2018 (Propulppp et Expopesten). Les résultats de ces études ont confirmé la présence de pesticides à usage agricole dans les lieux de vie des wallons (cours d’écoles, salles de classe, jardins privés et habitations). Les enfants vivant dans des zones d’expositions sont contaminés par des insecticides perturbateurs endocriniens pouvant induire des problèmes de développement cérébral, autisme, obésité, diabète et cancers.
La campagne de biosurveillance wallonne menée en 2021 a révélé que plus de 90% des adultes et adolescents participants était contaminé par un produit de dégradation (métabolite) d’insecticides neurotoxiques susceptibles notamment d’altérer le développement cérébral du fœtus et d’affecter les apprentissages et le comportement ultérieur des enfants. Le glyphosate, interdit d’usage dans la sphère privée depuis juin 2017 (toujours utilisé par Infrabel pour désherber les chemins de fer), a été retrouvé dans un quart des échantillons. D’autres pesticides, bien qu’interdits depuis plusieurs décennies, ont également été détectés chez 20% des participants.
Comment en finir avec la dérive de pesticides hors des zones de traitement ?
Nature & Progrès s’investit pour mettre un terme à la contamination de nos paysages et de nos lieux de vie. Une cause partagée par d’autres organisations de protection de l’environnement comme nos partenaires wallons et européens : Canopea (ex IEW) et Pesticide Action Network Europe (PAN Europe). Ensemble, nous agissons sur deux plans : – auprès des autorités fédérales pour les conditions d’autorisation des pesticides les plus nocifs – auprès des autorités wallonnes pour les conditions d’utilisation de ces pesticides
Au fédéral, Nature & Progrès dénonce les conditions d’autorisations de pesticides nocifs pour la santé et l’environnement
Nature & Progrès intervient régulièrement pour dénoncer les autorisations abusives des pesticides les plus dangereux pour l’environnement et la santé et pour lesquels aucune mesure de réduction du risque n’est compatible avec les pratiques agricoles. C’est le cas du sulfoxaflor, un insecticide très toxique pour les abeilles, dont l’autorisation a été conditionnée à la gestion des plantes adventices visitées par les abeilles. Mais est-il réaliste d’attendre des agriculteurs qu’ils contrôlent la floraison des plantes adventices avant chaque pulvérisation ?
Avec PAN Europe, nous avons intenté trois actions en justice pour nous opposer aux dérogations d’insecticides interdits : les néonicotinoïdes tueurs d’abeilles. Celles-ci sont toujours en cours et ont été portées devant la Cour de justice de l’Union européenne.
Au niveau wallon, Nature & Progrès déplore une ambition de mise en œuvre très insuffisante
Bien que les grandes lignes encadrant l’utilisation des pesticides aient été définies dès 2018, Nature & Progrès déplore une ambition de mise en œuvre largement insuffisante :
les pulvérisations de pesticides sont interdites lorsque la vitesse du vent est supérieure à 20 km/heure alors que même les fabricants de pesticides les déconseillent au-delà de 18 km/heure
de même, la pulvérisation est interdite autour des lieux fréquentés par les publics sensibles mais rien n’est prévu pour les lieux d’habitation : un enfant est donc plus protégé dans une cour de récréation que dans son jardin ! De plus, les dit lieux n’ont pas encore été définis !
Conscients des manquements liés aux conditions d’utilisation des pesticides en Wallonie, nous avons contacté, dès son entrée en fonction, la Ministre wallonne de l’Environnement pour qu’elle organise la révision de cet Arrêté. A minima, nous souhaitons que soient précisées les conditions d’utilisation des pesticides et une interdiction de leur usage près des lieux d’habitation et de fréquentation par les publics sensibles.
Inquiets par la lente avancée de ce dossier et par le risque que cette révision ne soit plus possible sous cette législature, nous avons contacté la Ministre pour l’informer de l’urgence de continuer le travail entamé par ses prédécesseurs afin de rendre effectif l’Arrêté d’utilisation des pesticides et d’enfin garantir une gestion des conditions d’utilisation des pesticides.
Nature & Progrès s’interroge sur les modalités de contrôle des mesures anti-dérives en région wallonne
Le contrôle du respect de la mise en œuvre des conditions d’utilisation est également de la responsabilité de la ministre de l’Environnement de la Région wallonne.
Nature & Progrès a donc récemment adressé un courrier à la Ministre, lui demandant des précisions sur :
les modalités du contrôle de l’utilisation des pesticides
la manière dont ces mesures de prévention sont mises en œuvre par les utilisateurs de pesticides, notamment les mesures anti-dérives et le respect des distances de traitement
la mise en œuvre de conditions de protection des zones refuges pour l’entomofaune (haie, surface semée de plantes mellifères) en bordure de parcelles traitées
les résultats des contrôles effectués auprès des utilisateurs de pesticides durant les deux dernières années
la mise en place de mesures concrètes de protection de l’environnement et de la biodiversité
Il est également temps de responsabiliser les firmes fabricants les pesticides quant à la dispersion de leurs produits dans l’environnement : si la dérive d’un pesticide ne peut être contrôlée, ce pesticide ne devrait tout simplement pas être autorisé.
En 2017, Nature & Progrès lance la campagne « Vers une Wallonie sans pesticides ». Elle vise à réunir les agriculteurs.trices, les citoyen.nes et les expert.e.s qui partagent la conviction qu’une agriculture sans pesticides chimiques est possible. Les rencontres en ferme organisées par l’association offrent un espace d’échange et de partage de connaissances autour des techniques alternatives à mettre en place pour se passer, entre autres, d’herbicides chimiques de synthèse comme le glyphosate.
Avec plus de 400 tonnes pulvérisées en Belgique en 2020, le glyphosate est l’herbicide le plus utilisé dans le pays et aussi dans le monde (l’utilisation massive de variétés génétiquement modifiées pour résister au glyphosate n’y est pas pour rien). Pourtant, de nombreuses études montrent la nocivité de cette substance pour l’être humain et pour l’environnement. En plus des risques pour la santé (l’herbicide est classé cancérogène probable depuis 2015 au niveau de l’OMS), les concentrations de glyphosate dans l’environnement endommagent la vie du sol (microbiote, vers de terre), les écosystèmes aquatiques, les abeilles et les animaux d’élevage.
Si Nature & Progrès plaide tant pour une Wallonie délivrée des pesticides, c’est parce que l’agriculture sans pesticides fonctionne : les agriculteurs Bio le prouvent au quotidien. Alors, à quand la sortie définitive du glyphosate en Belgique au profit de méthodes alternatives non chimiques pour lutter contre l’apparition de « mauvaises herbes » de plus en plus résistantes aux herbicides ?
Les « mauvaises herbes », la préoccupation principale des agriculteurs
Une mauvaise herbe, ou adventice, est une plante indésirable envahissant les cultures et les prairies. Elle concurrence les plantes cultivées et cause un préjudice économique à l’agriculteur qui s’emploie à les détruire. La gestion des « mauvaises herbes » sans herbicide est la préoccupation principale des agriculteurs qui envisagent une transition vers le Bio. En effet, le passage d’un système conventionnel – où toute repousse de « mauvaises herbes » est systématiquement éliminée par un traitement herbicide – à un système où le seuil de tolérance aux adventices est plus élevé peut faire peur.
Si dans les prairies, les grandes cultures (céréales, colza) ou l’arboriculture fruitière, la présence d’adventices peut être bénéfique (augmentation de la biodiversité, support pour le développement de la faune auxiliaire, etc.), la rigueur est de mise en maraichage ou dans la production de semences lorsque les récoltes et la transformation sont mécanisées. Dans ce cas, la « propreté » de la parcelle doit être maximale pour éviter des soucis lors de la récolte et de contamination de la production.
Pourquoi les agriculteurs conventionnels utilisent-ils du glyphosate ?
Le glyphosate est un herbicide total qui agit « efficacement » sur les adventices vivaces comme le chiendent, le chardon ou le rumex. Il est absorbé par les feuilles et véhiculé jusque dans les racines qu’il tue.
Les agriculteurs bio, en revanche, se passent du glyphosate. Ils s’appuient sur toute une série de pratiques agricoles pour gérer ces indésirables et éviter leur dispersion et multiplication : rotations longues, couverts végétaux, nettoyage du matériel agricole, fauchage avant floraison, cultures intercalaires ou intercultures, travail mécanique, pâturage, bonne gestion de la fertilisation, etc.
Concrètement, quelles sont les alternatives ?
En prairie
Une prairie correctement pâturée ou entretenue (hersage, ébousage, fauche, fertilisation, sursemis, etc.) ne laisse pas de place aux plantes indésirables et n’a donc pas besoin d’être renouvelée ! Si toutefois la prairie doit être renouvelée car trop envahie de mauvaises herbes, des moyens mécaniques existent comme le labour.
En cultures (après moisson)
Un travail mécanique du sol directement après la moisson avec un déchaumeur à dents permet aux chaumes hautement carbonés de se décomposer. Ensuite un couvert (interculture) pour combler les vides sera appliqué. Les cultures de seigle, d’avoine, de chanvre, ou de mélange de céréales couvriront suffisamment le sol pour étouffer les potentielles adventices. Dans le jargon, on les appelle des « espèces concurrentielles » parce qu’elles accaparent les ressources (lumière, azote, eau) dont les adventices ont également besoin pour se développer.
Après la récolte, les semis de radis chinois, de phacélie, de trèfle d’Alexandrie Tabor, de moutarde brune permettent de réduire la croissance des adventices. Ces espèces offrent une bonne couverture végétale (foliaire) pendant la période entre deux cultures (l’interculture). Les germes d’adventices resteront dans l’ombre et n’auront par conséquent pas assez de lumière pour se développer. En cas d’envahissement important, le sarrasin au printemps puis de l’avoine ou de la moutarde permettent d’inhiber la germination de certaines mauvaises herbes.
En cultures (pour détruire une culture précédente avant de semer)
Un travail mécanique du sol sera réalisé. Plusieurs machines sont possibles :
Déchaumeurs : entre deux cultures, les interventions de déchaumage sont assez efficaces sur le rumex. Les outils à dents recourbées permettent d’extirper les rhizomes de chiendent, relativement peu profonds, et de les faire sécher en surface. Ces méthodes ne sont cependant pas efficaces sur le chardon ou le liseron. Sur chiendent et rumex, elles peuvent s’avérer satisfaisantes uniquement si la parcelle n’est pas trop infestée.
Vibroculteur : travail superficiel du sol avec des dents vibrantes,
Herse: engin permettant un travail superficiel du sol. Des griffes grattent le sol et permettent d’éliminer les plantules de mauvaises herbes.
Cultivateur : outil qui permet d’ameublir le sol.
Charrue : travail profond du sol (seulement si fortement envahi).
Le faux semis est une méthode consistant à préparer le sol afin de stimuler la germination des semences de mauvaises herbes en dormance. Les plantules d’adventices sont éliminées de façon mécanique avant que celles-ci se reproduisent et se dispersent dans le sol.
Les rotations longues, c’est-à-dire l’alternance de différentes cultures sur une même parcelle pendant plusieurs années, sont des pratiques courantes en Bio. En plus de limiter la pression des adventices, les rotations permettent d’améliorer la structure du sol et d’enrichir sa fertilité. L’implantation de prairies temporaires pluriannuelles dans la rotation, en particulier de luzerne, et des fauches répétées épuisent les réserves souterraines des vivaces et permettent d’éradiquer efficacement ces adventices, en particulier les chardons.
En cultures, pour détruire des couverts végétaux
Roulage faca : permet un premier hachage du couvert
Le broyage : hachage du couvert végétal favorisant la minéralisation
Mulchage avec un travail superficiel du sol en utilisant un déchaumeur scalpant efficacement la surface du sol
Le labour
Les espèces gelives : utilisation de plantes sensibles au gel (exemple : moutarde) qui ne nécessitent pas un traitement chimique pour être détruites (détruit par le gel)
Le roulage classique (cambridge, crosskil,…) favorise la sensibilité des espèces au gel
En cultures (avant émergence de la nouvelle culture)
Le travail mécanique par des outils de précision est la meilleure alternative qui permettra d’éviter l’application du glyphosate sur un sol nu.
Le faux semis : méthode efficace consistant à préparer le sol afin de stimuler la germination des semences de mauvaises herbes en dormance. Les plantules de mauvaises herbes sont éliminées de façon mécanique avant que celles-ci ne se reproduisent et se dispersent dans le sol.
En cultures (localement entre les lignes des cultures)
Les cultures intercalaires : les vides entre les lignes de cultures sont comblés par une autre culture ne laissant pas de place aux plantes indésirables. La plantation, par exemple, de trèfles blancs entre les rangées de maïs est une bonne association qui permet aux mauvaises herbes de ne pas pousser et au sol d’être dans une condition idéale de fertilité.
Le désherbage mécanique avec des outils de précision éliminant les plantes indésirables entre les lignes de culture est une autre option.
Sources : certaines des explications techniques ont été recueillies auprès de Patrick Silvestre, conseiller technique en grandes cultures chez Biowallonie asbl. D’autres proviennent des propos recueillis auprès des producteurs accueillants lors des rencontres en fermes bio. D’autres informations techniques proviennent du dossier « La maîtrise des adventices : comment fait-on en bio ? », Patrick Silvestre, Itinéraire BIO 40 – mai/juin 2018.
L’Europe prolonge l’autorisation du glyphosate avec l’appui de la Belgique
Malgré les alternatives au glyphosate, la Belgique soutient son autorisation jusqu’à fin 2023. L’Europe va donc prolonger l’autorisation du glyphosate d’un an avec l’appui de la Belgique. Le fédéral a en effet approuvé la décision de prolongation de la Commission européenne malgré le malaise autour de cet herbicide et en dépit de l’avis scientifique du Conseil supérieur de la santé qui recommandait en 2020 de ne pas attendre l’expiration de l’autorisation en cours pour mettre fin à l’utilisation du glyphosate.
En 2017, en plein « Monsanto papers », le Ministre belge de l’Agriculture avait voté contre son renouvellement pour 5 ans. Il avait justifié sa position par la nécessité d’entamer une transition vers une agriculture sans glyphosate. Cette période transitoire arrivant aujourd’hui à échéance, la Belgique aurait dû s’opposer à la prolongation du glyphosate.
Nature & Progrès demande l’interdiction du glyphosate
Nature & Progrès demande aux membres du gouvernement de tenir leurs engagements, conformément à l’accord de gouvernement, et d’adopter une position cohérente et ambitieuse en soutenant activement l’interdiction du glyphosate en Belgique et dans le reste de l’Europe, et la promotion des alternatives non chimiques auprès des agriculteurs.
producteurs BIO en Wallonie (chiffre qui a doublé ces 10 dernières années)
+ 1 ha
agricole sur 8 est maintenant bio (représentant 12 % de la SAU)
15 %
de fermes sont sous contrôle bio en Wallonie, soit une ferme sur sept
Ecoutez Bernard Brouckaert de la Ferme bio de Moranfayt, producteur Nature & Progrès qui se passe du glyphosate depuis toujours !
« Chers citoyens, allez à la rencontre des agriculteurs de votre région et conscientisez-les ! Chers agriculteurs, bannissez ces produits et répondez à la demande des citoyens ! C’est tout bon pour notre santé et pour notre environnement.«
Le 14 octobre 2022, la Belgique a participé aux discussions européennes sur la prolongation de l’autorisation du glyphosate pour une année supplémentaire. Faute de la majorité nécessaire, la décision a été reportée. Mais l’on sait que la Belgique a voté pour la prolongation, ce qui choque Nature & Progrès ! Un second vote a lieu ce mardi 15 novembre. La Belgique restera-t-elle sur sa position sachant que le glyphosate a été classé comme « cancérigène probable » par l’Organisation mondiale de la Santé ? Faut-il d’autres preuves ? De nombreuses études récentes prouvent la toxicité de ce poison.
En juin 2022, un rapport de l’Health and Environment Alliance (HEAL) a révélé que l’évaluation de l’UE sur le glyphosate rejetait toute preuve scientifique liant ce pesticide au cancer. Des études fournies par l’industrie des pesticides elle-même soutiennent clairement une classification du glyphosate comme « cancérogène probable ». Mais malgré toutes les preuves scientifiques, les autorités de l’UE n’ont jusqu’à présent pas réussi à classer le pesticide de synthèse le plus utilisé au monde.
La situation en Belgique
En 2017, au moment du renouvellement de l’autorisation du glyphosate pour une période de 5 ans, notre ancien Ministre fédéral de l’Agriculture Denis Ducarme avait voté « contre » et plaidé pour un « phasing out ». Il avait justifié sa décision par le fait que ce temps allait être mis à profit dans le développement des alternatives. Cette période arrivant aujourd’hui à échéance, il est normal que la Belgique s’oppose à la prolongation de l’autorisation du Glyphosate.
Le vote de cette semaine concerne la prolongation de l’autorisation actuelle pour un an dans l’attente d’une décision sur sa ré-autorisation dépendante des résultats de l’évaluation scientifique toujours en cours. Prolonger l’autorisation du glyphosate jusqu’à fin 2023 serait une très mauvaise nouvelle pour la nature et la santé.
Le Ministre fédéral de l’Agriculture David Clarinval ne peut décider seul du sort du glyphosate en Belgique. Interrogé après le premier vote par des députées de la Chambre, le Ministre avait annoncé avoir respecté le protocole entre lui et le Ministre fédéral de la Santé. Nature & Progrès avait alors adressé des courriers aux autres Ministres compétents au niveau fédéral et wallon pour les informer de la prise de position du Ministre sans concertation préalable.
Le Glyphosate est déjà interdit pour usage personnel
Marc Fichers, secrétaire général de Nature & Progrès : « Preuves scientifiques et alternatives sont déjà disponibles pour interdire cet herbicide. Monsieur le Ministre David Clarinval, où en est la Belgique dans l’élimination progressive du glyphosate en agriculture promise en 2017 ? ».
En plus des risques pour la santé, les concentrations de glyphosate dans l’environnement endommagent les écosystèmes aquatiques, le microbiote du sol, les vers de terre et même les abeilles. A quand la sortie définitive du glyphosate en Belgique ? Pour rappel, il est déjà interdit pour les particuliers. Son usage est limité aux professionnels.
Les alternatives existent et fonctionnent !
Si Nature & Progrès plaide tant pour une Wallonie délivrée des pesticides, c’est parce que les alternatives existent. Les agriculteurs bio le prouvent au quotidien !
En Bio, la lutte non chimique, sans glyphosate ou autre herbicide, contre les plantes indésirables repose sur différentes méthodes préventives et communes à tout type de culture. Leur combinaison permet d’optimiser la résilience des cultures face aux adventices pour éviter le recours au désherbage, qu’il soit mécanique ou chimique. Les gestion des « mauvaises herbes » est l’une des préoccupations principales des agriculteurs en Bio même si le seuil de tolérance aux adventices est plus élevé qu’en agriculture conventionnelle. Un certain niveau de présence d’adventices peut même être bénéfique (augmentation de la biodiversité, support pour le développement de la faune auxiliaire, etc).
Nature & Progrès demande au gouvernement fédéral de tenir ses engagements, conformément à l’accord de gouvernement, et d’adopter une position cohérente et ambitieuse en soutenant activement l’interdiction du glyphosate en Belgique et dans le reste de l’Europe.
Un nombre important de scientifiques européens actifs dans la recherche en biotechnologie font activement pression pour déréglementer les nouvelles techniques d’édition des gènes. Alors que, dans le même temps, ils ont des intérêts directs ou indirects et non divulgués dans la commercialisation de plantes dérivées de ces techniques via des brevets, des demandes de brevets ou des liens avec les multinationales monopolistiques.
Ces multinationales à présent de plus en plus fusionnées entre elles sont au nombre de 3 : Corteva, Chemchina et Bayer-Monsanto. Elles commercialisent, sous brevets, à la fois pesticides, OGM et semences. Ces conflits d’intérêts sont répertoriés dans un nouveau rapport réalisé par GeneWatch et Corporate Europe Observatory (CEO). Il est publié par le groupe des Verts/ALE du Parlement européen et intitulé : « Behind the smokescreen. Les intérêts particuliers des scientifiques de l’UE qui font pression pour la déréglementation des OGM ».
Les lobbys des biotechnologies tentent de déréglementer les nouveaux OGM
La Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) a, par son arrêt du 25 juillet 2018, déclaré que tous les produits dérivés des nouvelles techniques de manipulations d’OGM, telle CRISPR la plus utilisée, sont des OGM à part entière et doivent être réglementés comme tels. Depuis lors, une campagne de lobbying encore plus intense de l’industrie biotechnologique et agrochimique a visé les réglementations européennes existantes relatives aux OGM pour en déréglementer les « nouveaux OGM » fabriqués à partir de certaines nouvelles techniques.
L’objectif du lobby est de persuader les décideurs politiques européens d’autoriser la commercialisation de plantes et d’animaux, nouveaux OGM, pratiquement sans analyse de risques pour la santé et l’Environnement, sans obligations de traçabilité, d’étiquetage pour les agriculteurs et les consommateurs ni de monitoring. Ceci afin de faciliter leur mise sur le marché et d’engranger davantage encore de profits.
Les organisations investiguées
Ont été répertoriés les conflits d’intérêts des scientifiques affiliés à l’organisation européenne des sciences végétales (EPSO), au réseau européen pour une agriculture durable par l’édition du génome (EU-SAGE) financé, entre autres, par la Fondation Bill et Melinda Gates et de la Fédération européenne des académies des sciences et des humanités (ALLEA). Ces associations se présentent pourtant comme parfaitement indépendantes. Seule l’information du domaine public fut utilisée dans ce rapport, y compris celle obtenue via des demandes d’accès aux documents soumises par CEO et qui ont par la suite été rendus publics. Toutefois, certains conflits d’intérêts, par la nature confidentielle de certains contrats de recherche, pourraient ne pas avoir été pris en compte.
Le nouveau rapport « Smokescreen » déclare que :
64 % des membres du groupe de travail de l’EPSO sur les technologies agricoles et 32 % des membres d’EU-SAGE ont un intérêt direct dans la commercialisation des plantes génétiquement modifiées. Cela signifie des avantages financiers ou un développement de carrière, soit personnellement, soit par l’intermédiaire de leurs organisations. Ils font pression pour la déréglementation des technologies génétiquement modifiées mais leurs intérêts directs ne sont pas toujours clairs pour les décideurs.
38 % des membres du groupe de travail EPSO sur les technologies agricoles et 23 % des membres du réseau EU-SAGE détiennent un ou plusieurs brevets ou demandes de brevets liés à des procédés ou produits génétiquement modifiés.
53 % des membres du groupe de travail EPSO et 15 % des membres du réseau EU-SAGE ont participé à un ou plusieurs projets de recherche avec l’industrie. Nombreux sont les scientifiques impliqués dans une entreprise de semences ou de biotechnologie, en occupant un poste ou en détenant des actions dans ces entreprises.
Certaines institutions publiques, telles le Vlaamse Instituut voor Biotechnologie (VIB), ont des liens étroits avec l’un ou plusieurs de ces groupes de pression dans lesquels ils sont très actifs. Le VIB travaille avec les entreprises de la biotechnologie agricole dans le cadre de projets commerciaux visant à « traduire les résultats de la recherche en produits ». Bayer Bioscience, Bayer Crop Science et Crop Design sont représentés à son assemblée générale.
La seule Vraie Science
Au-delà de ces conflits d’intérêts se pose aussi la question de l’accaparement de l’autorité savante dans l’espace public. « Parmi les membres du groupe de travail ad hoc de l’EPSO, 98 % ont une formation en génétique et biologie moléculaire, et c’est le cas pour 83 % des membres du réseau EU-SAGE », lit-on dans le rapport. Il n’est de plus pas évident que les domaines d’expertise pertinents pour évaluer les effets potentiellement négatifs des applications agricoles des nouvelles technologies OGM, en écologie, agroécologie, agroéconomie, toxicologie et santé publique, soient représentés dans ces organisations. Il est donc abusif pour ces organisations et ces chercheurs, conclut Nina Holland de CEO, « de prétendre représenter “la science” ou de se poser en avocat d’une “politique basée sur la science” »
Appel des politiques à la vigilance
A la suite de ce lobby intense, la Commission a annoncé via son Programme de travail 2003, la publication pour le second trimestre 2023 d’une nouvelle réglementation pour certains nouveaux OGM produits par certaines nouvelles technologies. Ceux-ci seraient alors soustraits aux conditions d’autorisation trop contraignantes de la Directive actuelle 2001/18/CE pour les multinationales. Les révélations du rapport « Smokescreen » montrent que les décideurs politiques doivent être très critiques à l’égard des affirmations de ces groupes de pression qui proclament, mais de façon non étayée par les faits ni par de nombreuses publications de scientifiques indépendants, les avantages et la sécurité des nouveaux OGM.
Les révélations du rapport « Smokescreen » montrent que les décideurs politiques doivent être très critiques à l’égard des affirmations de ces groupes de pression qui proclament, mais de façon non étayée par les faits ni par de nombreuses publications de scientifiques indépendants, les avantages et la sécurité des nouveaux OGM.
Selon l’industrie, les nouveaux OGM favoriseraient la lutte contre les changements climatiques, la réduction de l’utilisation des pesticides en conformité avec les objectifs du « Pacte Vert » de la Commission et l’instauration d’une agriculture durable. Leur technologie serait tout à fait maitrisée et leurs risques non supérieurs à ceux des plantes produites par la sélection conventionnelle ou par les mutations aléatoires dans la nature. Pourtant, il est montré que la déréglementation de ces nouvelles techniques aurait de graves conséquences socio-économiques, ainsi que des impacts potentiellement graves sur la santé, l’environnement et la résilience de l’agriculture .