Cela fait vingt ans que Nature & Progrès agit pour protéger les abeilles des dégâts occasionnés par l’utilisation des insecticides néonicotinoïdes, malgré l’entêtement du secteur betteravier et des autorités. Au terme de nombreuses actions, ces insecticides tueurs d’abeilles ont finalement été interdits par l’Europe. Mais la Belgique a honteusement dérogé à cette interdiction pendant trois années consécutives…
PAN Europe et Nature & Progrès ont alors demandé à la Cour de justice de l’Union européenne de clarifier les règles d’octroi de dérogations pour les pesticides ayant été interdits en Europe. Le 8 septembre dernier, l’avocate générale à la CJUE a fait part de ses conclusions sur l’affaire aux juges européens et aux parties. S’il est suivi par les juges européens, cet avis pourrait conduire à une réduction spectaculaire des dérogations et à une meilleure protection de la santé des citoyens et de l’environnement.
Pour Nature & Progrès, l’Etat belge use et abuse de la possibilité de dérogation ouverte par l’article 53 du règlement européen n°1107/2009 encadrant la mise sur le marché des pesticides au point d’autoriser des insecticides expressément interdits en plein champ depuis 2018. Plus largement, depuis des décennies, les Etats membres de l’Union européenne prolongent artificiellement, au détour de dérogations, l’utilisation de pesticides hautement toxiques et interdits dans l’Union. Et ce, avec la bénédiction de la Commission européenne !
Devant la nécessité de clarifier certaines dispositions clés du Règlement Pesticides, le Conseil d’Etat s’est tourné, à notre demande, vers la Cour de Justice de l’Union européenne. Le 17 mars 2022, une audience importante a ainsi eu lieu à Luxembourg.
En effet, l’Avocate générale pose des conditions strictes pour l’autorisation des pesticides interdits :
L’autorisation d’urgence d’un pesticide interdit ne peut être octroyée qu’à titre exceptionnel
Un danger habituel, c’est-à-dire qui survient fréquemment, ne constitue pas un cas exceptionnel : il n’est donc plus possible d’autoriser « exceptionnellement », année après année, des insecticides néonicotinoïdes interdits pour lutter contre les pucerons en betteraves sucrières
L’octroi de ces dérogations doit être précédé d’un « examen diligent et impartial », qui implique une « obligation d’apprécier de manière critique et tenir compte également des informations pertinentes provenant d’autres sources (que celles fournies par l’industrie) »
Le danger pour la production agricole et le risque pour la santé et l’environnement doivent être mesurés avec la même méthode d’évaluation. Il faut des indices sérieux et concordants, ce qui n’a clairement pas été respecté par la Belgique qui a pris les dires de l’industrie pour argent comptant.
La protection de la santé et de l’environnement a plus de valeur que la garantie de compétitivité de l’agriculture. A cet égard, l’Avocate générale confirme qu’il y a un standard différent pour la santé humaine (y compris des animaux domestiques et d’élevage et donc des abeilles d’élevage) et la protection de l’environnement (y compris la santé des animaux sauvages). Toute atteinte à la santé humaine ne peut être tolérée qu’en cas de « dangers particulièrement graves » tels que des « risques concrets pour la sécurité alimentaire ». Cela conforte aussi notre position : dès qu’il y a un risque pour la santé humaine ou les pollinisateurs, des intérêts économiques ne peuvent pas l’emporter.
Les étapes à venir
Nous espérons obtenir l’arrêt de la Cour de justice de l’UE en décembre 2022 ou janvier 2023. Cet arrêt sera ensuite transmis au Conseil d’Etat, qui devrait rendre sa décision d’ici juin 2023.
Enfin ! Le Ministre Clarinval reconnait qu’un risque pour les abeilles lié à l’utilisation du sulfoxaflor en plein air ne peut pas être exclu !
La Belgique s’aligne sur la Commission européenne qui annonçait en avril dernier son intention d’interdire le Sulfoxaflor en plein champ, limitant ainsi l’usage de cet insecticide de type néoniconitinoïde aux cultures sous serre permanente. Jusque-là, le Ministre avait exprimé son « non-soutien » à la proposition de restriction européenne jugeant celle-ci « inutilement sévère », en dépit du fait que les experts européens aient reconnu en 2019 qu’il n’existait pas d’usage sûr du sulfoxaflor en extérieur pour les abeilles domestiques et bourdons.
Si c’est une très bonne nouvelle, en premier lieu pour toutes les butineuses, le délai de grâce accordé aux fabricants n’exclut pas de nouvelles pulvérisations en plein air en 2023, comme ce fut le cas cette année. Les insecticides CLOSER et SEQUOIA ont été autorisés pendant 120 jours comme moyen de lutte contre les pucerons en betteraves sucrières.
L’interdiction du sulfoxaflor en extérieur ne sera effective en Belgique qu’à partir du 20 mai 2023.
Un nouveau rapport de l’ONG Heath & Environnement Alliance (HEAL) révèle que les preuves scientifiques des effets cancérigènes du glyphosate ont été écartées de l’évaluation scientifique qui fondera un éventuel renouvellement de son autorisation de mise sur le marché européen. L’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) avait conclu le 30 mai dernier que la classification du glyphosate comme substance cancérogène n’était pas justifiée. L’avis de l’ECHA sur la classification des dangers du glyphosate est une étape fondamentale dans le processus de renouvellement de cette molécule. Sur la base de cette évaluation, la Commission européenne et les États membres décideront du renouvellement de la licence du glyphosate pour 5 années supplémentaires. L’enjeu est de taille puisque la législation européenne sur les pesticides prévoit que les substances classées comme « cancérogènes présumés pour la santé humaine » soient retirées du marché. Dans le cadre de cette procédure de réévaluation du glyphosate, HEAL a examiné 11 études fournies par l’industrie en 2019 dans le cadre du dossier d’homologation. L’ONG, avec l’aide de deux experts indépendants, a constaté l’apparition de tumeurs sur les animaux testés appuyant clairement la classification du glyphosate comme « cancérogène probable » au niveau international. En 2015, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) de l’OMS, une référence en matière de recherche sur les causes du cancer, était parvenu à cette conclusion après avoir consulté plus d’un millier d’études.
Le glyphosate est le pesticide le plus utilisé au monde
Le Dr Peter Clausing, toxicologue et co-auteur du rapport, a déclaré : « Les animaux exposés au glyphosate ont développé des tumeurs avec des incidences significativement plus élevées par rapport à leur groupe témoin non exposé, un effet considéré comme une preuve de cancérogénicité par les directives internationales et européennes. Pourtant, les évaluateurs des risques de l’UE ont rejeté toutes les conclusions sur les tumeurs de leur analyse, concluant qu’elles se sont toutes produites par hasard et qu’aucune d’entre elles n’était réellement liée à l’exposition au glyphosate. » Les graves lacunes scientifiques et les distorsions dans l’interprétation des normes scientifiques européennes et internationales mises en évidence dans le rapport de HEAL remettent également en question la validité de l’évaluation en cours et de ses conclusions. Le Dr Angeliki Lyssimachou, responsable principale de la politique scientifique à HEAL, prévient que la non-reconnaissance du potentiel cancérigène de la substance marquerait un retour en arrière dans la lutte de l’Europe contre le cancer. Helene Duguy, avocate spécialisée dans les produits chimiques chez ClientEarth, a déclaré : « Certains des plus grands scientifiques du monde ont fait le lien entre le glyphosate et le cancer – et pourtant l’ECHA refuse d’étiqueter ce pesticide nocif comme cancérigène. Malheureusement, ce n’est pas la première fois que l’ECHA ne justifie pas de manière transparente et claire son rejet des preuves scientifiques indépendantes. C’est incroyablement inquiétant étant donné l’engagement et le devoir de l’UE de protéger ses citoyens et l’environnement des substances les plus dangereuses ». Malgré les nombreuses preuves de ses effets négatifs sur la santé humaine et l’environnement, le glyphosate reste le pesticide le plus utilisé au monde, et représente un tiers de toutes les ventes d’herbicides, soit 48.000 tonnes par an, dans l’Union européenne. L’exposition aux pesticides à base de glyphosate a également été liée à des effets néfastes sur le développement humain, la reproduction et les systèmes hormonaux, selon des preuves issues de la littérature scientifique indépendante.
Le 15 juin 2022, Nature & Progrès, PAN Europe et l’équipe de Secrets Toxiques ont participé à une conférence/débat au Parlement européen à Bruxelles sur les carences et les failles du système d’homologation des pesticides et sur les leviers d’actions des députés européens, notamment judiciaires, pour faire appliquer la loi.
Le règlement européen sur les pesticides (Règlement n° 1107/2009) prévoit de fortes exigences pour l’approbation de ces produits chimiques de synthèse et de leurs composants déclarés. Il vise à préserver l’environnement et la santé des effets néfastes liés à l’utilisation des pesticides. Pourtant, de nombreuses études scientifiques fournissent des preuves d’un lien entre ces produits et l’effondrement de la biodiversité et certaines maladies chroniques. Dans de nombreux pays européens, l’exposition aux pesticides est reconnue comme étant à l’origine de maladies professionnelles. Ces constats invitent à identifier les failles dans la mise en œuvre des conditions d’homologation des pesticides au niveau européen et à les résoudre.
Au niveau européen, les substances actives sont autorisées par la Commission européenne sur base d’avis de l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Les conditions et critères d’évaluation fondant ces avis scientifiques doivent répondre aux exigences de la législation européenne sur les pesticides.
Or, la pratique révèle des carences majeures dans les évaluations scientifiques de l’EFSA :
des effets à long terme des pesticides sur la santé humaine
des effets causés par l’interaction entre une substance active donnée et, entre autres, les autres constituants du produit : l’effet cocktail
de la toxicité des co-formulants, parfois plus toxiques que les substances actives déclarées
de la toxicité des pesticides sur les espèces non ciblées, directement ou indirectement exposées aux pesticides dans leur environnement naturel, tels que les amphibiens et les reptiles
Par exemple, concernant les effets à long terme de la formulation représentative, la Commission européenne ne peut légalement autoriser une substance active que si une ou plusieurs utilisations représentatives d’au moins un produit pesticide contenant cette substance n’a pas d’effet nocif sur la santé humaine ou l’environnement à court ou à long terme. L’EFSA doit donc inclure ses avis une analyse du danger à long terme de cette formulation représentative. Etant donné qu’une telle analyse n’est pas incluse dans le règlement de la Commission définissant les documents requis pour l’approbation de mise sur le marché, peut-on vraiment considérer que la Commission européenne et l’EFSA se conforment aux exigences du règlement pesticides ?
Le Parlement européen pourrait demander l’annulation de l’approbation d’une substance active devant la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) au motif que l’évaluation de la toxicité à long terme n’a pas été correctement effectuée – ce que les ONG ne peuvent pas faire. Devant le manque de transparence sur les méthodes, données et résultats des analyses de toxicité des pesticides – celles-ci n’étant pas publiées – un tel recours permettrait de contrôler réellement la manière dont les tests de toxicité à long terme sont effectués.
Réécoutez les différentes interventions au Parlement européen (vidéo entière et passages coupés) :
3:40 – L’évaluation des effets à long terme des pesticides sur la santé humaine (en anglais) Dr Andy Battentier, directeur de campagne Secrets Toxiques
16 :10 – L’évaluation de l’écotoxicité des pesticides sur les espèces non ciblées (en français) Salomé Roynel Chargée de la politique et des campagnes sur l’évaluation des risques liés aux pesticides à PAN Europe
31 :05 – L’intégration de la littérature scientifique dans le protocole d’évaluation (en anglais) Dr Angeliki Lysimachou Chargée de politique scientifique Health and Environment Alliance (HEAL)
45 :58 – La décision de la CJUE du 1er octobre 2019 : un repère fondamental pour l’évaluation des pesticides (en français) Guillaume Tumerelle Avocat de Secrets Toxiques et Générations Futures
1 :24 :40 – Intervention de Martin Dermine, Chargé de la politique de l’environnement et de la santé à PAN Europe (en français)
1 :30 :43 – Intervention de Marc Fichers, Secrétaire général de Nature & Progrès Belgique (en français)
La Belgique octroie quatre nouvelles dérogations pour l’usage de produits pesticides à base de flupyradifurone, l’un des insecticides de type néonicotinoïde nouvelle génération mis sur le marché en 2015.
Ces produits sont déjà autorisés en plein air pour la production de houblon ou de fruits (raisin, pomme, poire, etc.) et sous serre pour certains légumes (courgette, aubergine, etc.) ou petits fruits (fraise, framboise, mûre, etc.). Pourtant, la dérogation – dite d’urgence phytosanitaire et relevant de la législation européenne sur les pesticides – permet d’étendre l’application de flupyradifurone à plusieurs variétés de choux (chou-fleur, chou-rave, chou de Bruxelles, chou brocoli, etc) pendant une période de 120 jours comprise entre le 1er juin et le 28 septembre 2022.
Une substance neurotoxique
Tout comme le sulfoxaflor, dont l’homologation européenne est en sursis, le flupyradifurone est une substance neurotoxique perturbant le fonctionnement du système nerveux de l’insecte ravageur ciblé (ici, le puceron et la mouche blanche) pour l’éradiquer, avec, au passage, des effets collatéraux sur d’autres insectes non visés et inoffensifs pour les cultures traitées, en particulier les pollinisateurs. Comme ce fut le cas pour les néonicotinoïdes de 1ère génération (imidaclopride, thiaméthoxame, clothianidine et fipronil) dorénavant interdits au niveau européen, les preuves scientifiques de la toxicité du flupyradifurone pour les abeilles s’accumulent.
La littérature scientifique a déjà identifié des perturbations majeures consécutives à une exposition au flupyradifurone avec un impact sur :
le comportement alimentaire (consommation de nectar) et de butinage,
la thermorégulation
Et la motricité de ces précieuses butineuses…
…diminuant ainsi encore davantage leur chance de survie. Pour certaines abeilles sauvages, en particulier l’abeille Megachile rotundat, le flupyradifurone présente une toxicité aigüe plus de 15 fois supérieure à celle des abeilles domestiques. Plus de 1.400 espèces d’abeilles sauvages sont des Megachile rotundat et beaucoup d’entre elles butinent les cultures et les fleurs sauvages à proximité des parcelles agricoles. De nombreuses plantes attractives pour les abeilles domestiques sont également visitées par les Megachile, qui pourraient donc être exposées à des doses de flupyradifurone présentant une toxicité aiguë, tant dans les champs agricoles qu’en dehors.
Flupyradifurone : les preuves scientifiques sont nombreuses
En permettant la pulvérisation de ces produits en plein champ et sans aucune mesure de réduction des risques (autre qu’une zone tampon de 20 mètres), l’Etat belge choisi d’ignorer les nombreuses preuves scientifiques disponibles alors qu’il devrait au contraire soigneusement évaluer toute nouvelle étude afin de compenser les lacunes du système actuel d’évaluation des risques pour préserver la biodiversité et les abeilles. Il aura fallu environ 25 ans pour interdire au niveau européen les utilisations de l’imidaclopride, du thiaméthoxame, de la clothianidine et du fipronil. Avec l’arrivée de nouveaux néonicotinoïdes, quelle chance reste-t-il aux abeilles quand l’Etat belge continue d’octroyer chaque année des dérogations temporaires à l’interdiction européenne pour ces anciens néonicotinoïdes ?
La Commission européenne va interdire l’épandage en plein champ de produits pesticides à base de sulfoxaflor. Cette substance active de type néonicotinoïde, dont l’homologation européenne devait courir jusqu’en 2025, va être retirée du marché en raison de préoccupations concernant sa toxicité élevée pour les abeilles. L’utilisation de ce pesticide en agriculture sera bientôt limitée aux serres permanentes, au même titre que d’autres insecticides de la famille des néonicotinoïdes. Le règlement d’interdiction devrait être adopté par la Commission européenne au printemps 2022.
Par cette interdiction, la Commission européenne fait application du principe de précaution devant l’absence de données scientifiques concluantes et l’impossibilité d’exclure tout risque inacceptable pour l’environnement, en particulier pour les pollinisateurs. Jusque-là, la proposition d’interdiction de cette molécule par la Commission européenne n’avait pas pu aboutir faute d’une majorité suffisante d’Etats membres lors des votes en comité technique (Scopaff) et en comité d’appel de février et mars 2022. La Belgique s’était d’ailleurs abstenue de voter.
Nature & Progrès et PAN Europe agissent
Initialement opposé à une interdiction européenne du sulfoxaflor en extérieur, le Ministre fédéral de l’Agriculture, David Clarinval, a entre-temps renouvelé pour la saison printemps/été 2022, l’agrément en urgence de deux produits à base de sulfoxaflor pour les cultures de betteraves sucrières. Car, si en vertu de la législation européenne encadrant la mise sur le marché de produits phytosanitaires, l’autorisation et l’interdiction des molécules actives utilisées pour fabriquer des pesticides agricoles se décident au niveau européen, les Etats membres restent compétents pour octroyer l’autorisation de produits pesticides sur leur territoire. Ils peuvent notamment décider de permettre en urgence la vente et l’utilisation de certains pesticides chimiques de synthèse non autorisés lorsqu’ils jugent qu’aucune autre alternative raisonnable n’est disponible pour protéger les cultures.
En 2015, la Commission européenne avait autorisé la commercialisation de produits insecticides contenant du sulfoxaflor, alors même que depuis 2013, l’usage en plein champ d’autres néonicotinoïdes (le thiamethoxame, l’imidaclopride et la clothianidine), utilisés pour le traitement des semences et expressément interdits pour les cultures en plein champ depuis 2018, faisait déjà l’objet de certaines restrictions… à cause de leur toxicité aigüe, notamment pour les abeilles. A l’époque, la décision prise par l’autorité européenne nous était apparue pour le moins paradoxale. En effet, aucune des restrictions et mesures d’atténuation des risques applicables à l’utilisation de ces trois néonicotinoïdes n’étaient reprises dans l’acte d’autorisation du sulfoxaflor. Dès 2015, ce nouvel insecticide, de la famille des néonicotinoïdes (du fait de son mode d’action : il agit sur les récepteurs nicotiniques), pouvait donc être pulvérisé sans restriction pendant toute la période de production agricole, y compris lors de la floraison des cultures pollinisées par les insectes, et notamment les abeilles.
Un dossier en cours depuis 2015
Cela fait de nombreuses années que Nature & Progrès fait du dossier « Sulfoxaflor » une priorité. Grâce au soutien sans faille de ses membres et donateurs, l’association reste très attentive à l’évolution de la situation. Il serait en effet inadmissible que le Ministre fédéral de l’Agriculture octroie à nouveau une dérogation à l’interdiction européenne, au détriment des abeilles.
Article original publié en anglais sur le site de PAN Europe
Le 17 mars 2022, une audience importante a eu lieu à la Cour de justice de l’Union européenne à Luxembourg. PAN Europe a demandé à la Cour de clarifier les règles d’octroi de dérogations pour les pesticides interdits en Europe. Depuis des décennies, les Etats membres de l’Union européenne prolongent artificiellement l’utilisation de pesticides hautement toxiques et interdits dans l’Union, en abusant du régime des dérogations, avec la bénédiction de la Commission européenne.
PAN Europe, conjointement avec son organisation membre Nature & Progrès Belgique et un apiculteur belge, a réussi à faire en sorte que la Cour de justice européenne se positionne sur la légalité des centaines de dérogations accordées chaque année par les États membres pour des pesticides interdits par l’Union. Les juges européens ont été invités à répondre à une série de questions parmi lesquelles : est-il permis d’accorder une dérogation pour un pesticide qui ne respecte pas les fondements du droit européen : hautement toxique pour les abeilles, pour l’environnement, pour l’homme ? Autre question importante : une dérogation pour l’utilisation d’un pesticide toxique peut-elle être accordée de manière préventive, même en l’absence de preuve de danger pour une culture ? Notre avocat a plaidé notre cause et a dû faire face aux avocats de la Commission européenne, soutenu par les avocats de la France, de la Grèce et de la Belgique.
Le contexte
Depuis que l’Union européenne a harmonisé sa législation sur les pesticides, elle a toujours autorisé les États membres à accorder des dérogations aux pesticides. Les États membres ont continuellement utilisé et abusé du système. En effet, tant dans la directive 91/414 de 1991 que dans le règlement 1107/2009 de 2009, les États membres avaient la possibilité, en cas d’« urgence » et en l’absence d’alternative raisonnable, d’accorder à leurs agriculteurs des dérogations pour l’usage d’une substance spécifique pendant 120 jours. Mais ce qui devait rester exceptionnel est devenu la norme : les États membres n’ont cessé de contourner les règles. Au cours des 6 dernières années, pas moins de 3 600 dérogations ont été accordées pour l’utilisation de pesticides non autorisés dans les États membres.
Urgence vous dites ?
En fait, pour toutes sortes de ravageurs communs et récurrents, l’agro-industrie a demandé aux États membres d’accorder des dérogations concernant les pesticides toxiques interdits tels que les néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles, le chlorpyrifos nocif pour le cerveau ou le mancozèbe toxique pour la reproduction ! Et quand on regarde les demandes envoyées par les agriculteurs ou souvent par l’industrie des pesticides elle-même, on se rend compte qu’il n’y a aucune urgence ! Et que le soi-disant danger est complètement hypothétique, non prouvé, que des dérogations sont accordées pour maintenir le statu quo, empêchant les agriculteurs de passer à des pratiques moins nocives.
Pas d’alternative, vraiment ?
Dans le même ordre d’idées, dans leurs dossiers de candidature, les agro-industriels prétendent qu’aucune alternative n’existe, que c’est trop coûteux ou pas assez efficace. Mais comment diable les agriculteurs biologiques peuvent-ils cultiver la même culture de manière rentable ? Comment se fait-il que des dérogations soient accordées alors que d’autres pesticides de synthèse sont déjà approuvés pour le même ravageur ?
Alors… qu’est-ce qui ne va pas avec les États membres ?
Les dérogations sont généralement prévues systématiquement : vous en faites la demande, vous l’obtenez ! Les États membres utilisent ce système pour prolonger l’utilisation d’un pesticide sur le marché même s’il a été interdit. Les autorités nationales compétentes sont généralement liées aux ministères de l’agriculture qui favorisent l’agriculture intensive ! Ainsi, lorsque les néonicotinoïdes sont interdits pour protéger les abeilles… ils continuent d’être utilisés dans la majorité des États membres par le biais de dérogations. Et la Commission ne fait rien ? Malheureusement non ! La Commission européenne ferme les yeux sur les pratiques des États membres et n’exerce pas son rôle de gardienne des traités, afin de protéger la santé des personnes et l’environnement.
Pourquoi PAN Europe va-t-il en justice alors ?
Quand on regarde la loi, elle énonce quelques conditions pour accorder une dérogation. Vous avez d’abord besoin d’une urgence : un danger inattendu pour lequel une réaction urgente est nécessaire. Deuxièmement, il ne peut être fourni que s’il n’existe aucune alternative. Et enfin, la loi ne dit pas qu’en accordant une dérogation, l’autorité nationale compétente est autorisée à ne pas respecter les autres dispositions de la loi qui stipulent que les pesticides ne peuvent pas nuire à la santé des personnes et à l’environnement.
PAN Europe vise à clarifier les contours de la loi et à obliger la Commission européenne et les États membres à protéger la santé des personnes et l’environnement, pas le profit de l’agro-industrie !
Quelle est la procédure légale ?
PAN Europe, Nature & Progrès Belgique et un apiculteur belge ont d’abord poursuivi l’État belge en 2019 pour avoir accordé des dérogations à l’utilisation de néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles sur la betterave sucrière. Nous avons demandé au tribunal administratif belge d’adresser des questions préjudicielles à la Cour de justice de l’UE afin de clarifier les grandes lignes des règles permettant aux États membres de prévoir des dérogations. La Cour belge a accepté notre demande pour plus de clarté et a envoyé, en février 2021, 5 questions préjudicielles à la Cour de justice de l’UE.
La France, la Hongrie, la Finlande, la Grèce et la Belgique sont intervenues dans l’affaire pour protéger le système actuel, ainsi que les producteurs belges de betteraves sucrières et l’industrie des pesticides/semences.
L’avocate générale rendra ses conclusions le 2 juin 2022 et la Cour rendra un arrêt quelques mois plus tard.
La Belgique a, par le passé, misé énormément sur l’industrie du sucre en permettant notamment le développement de La Raffinerie Tirlemontoise qui est à la tête de la majorité de la production de betterave sucrière du pays. Cette culture fleuron de notre agriculture présente néanmoins un inconvénient notoire : elle concourt à la disparition de la biodiversité, de par l’utilisation d’insecticides dangereux, entre autres pour les abeilles. Nature & Progrès et PAN Europe ont tenu à écrire au dirigeant du géant belge du sucre pour lui demander de changer de cap.
Depuis plusieurs saisons, un dangereux pesticide – le sulfoxaflor – est proposé pour être pulvérisé dans les champs de betterave sucrière (suite à l’obtention de dérogations). Il s’agit d’un néonicotinoïde de dernière génération. Il agit sur le système nerveux des insectes suivant le même mode d’action que les 3 néonicotinoïdes interdits en 2018. De plus, il est systémique : il se diffuse dans toute la plante et contamine l’ensemble des feuilles, tiges et fleurs.
C’est un dangereux pesticide pour la biodiversité. La Raffinerie Tirlemontoise qui contrôle la majorité de la production sucrière en Belgique aurait pu par sa position orienter la production pour qu’elle soit plus respectueuse de la biodiversité, nous lui avons écrit pour l’interpeller et regretter qu’elle n’œuvre pas à la disparition de ce dangereux pesticide. Nous regrettons que l’entreprise n’ait pas investi des moyens pour diffuser les techniques alternatives à l’utilisation de ces pesticides et développer comme d’autres industries étrangères la production de sucre bio. Dans notre courrier du 25/02/2022 (disponible ici), nous présentons les nombreuses études scientifiques sur la toxicité du sulfoxaflor sur les abeilles et nous encourageons à développer les alternatives.
Un danger pour les bourdons et abeilles solitaires
Le sulfoxaflor a été approuvé en 2015, avec l’obligation pour le demandeur de fournir des données confirmatives avant août 2017. L’EFSA n’a publié son examen revu par les pairs sur ces informations que près de deux ans plus tard, en mars 2019. Une année plus tard encore, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) a mis à jour ses conclusions. Un risque élevé pour les abeilles mellifères et les bourdons a été identifié dans les champs et en marge de ceux-ci, ce qui signifie que les utilisations extérieures de cette substance représentent un risque élevé pour la biodiversité.
Déjà en 2014, l’EFSA relevait dans son étude « Conclusion on the peer review of the pesticide risk assessment of the active substance sulfoxaflor » qu’un risque élevé pour les abeilles n’a pas été exclu pour les utilisations sur le terrain. De plus, un risque élevé à long terme a été indiqué pour le scénario des petits mammifères herbivores pour les utilisations sur le terrain dans les légumes. Cette étude a été complétée par une seconde, elle aussi de l’EFSA, en 2020 : « Peer review of the pesticide risk assessment for the active substance sulfoxaflor in light of confirmatory data submitted ».
Le sulfoxaflor présente également un risque important pour les bourdons et les abeilles solitaires. De nombreuses espèces de pollinisateurs sauvages sont terricoles et nidifient directement dans les terres agricoles.
Les études scientifiques le prouvent
Ci-dessous, une mise à jour des nouvelles publications scientifiques sur la toxicité du Sulfoxaflor sur les abeilles. Toutes ces publications travaillent avec des doses auxquelles les abeilles sont effectivement susceptibles d’être confrontées en plein champ :
Troubles de la reproduction chez les bourdons (ici, ici & ici)
Augmentation du pouvoir pathogène de Nosema bombi sur les larves de bourdons (ici)
Induction d’un stress oxydatif et une apoptose chez les abeilles mellifères (ici)
Modifications de l’immunocompétence des bourdons (ici)
Réduction de l’activité de butinage de l’abeille solitaire Osmia bicornis (ici)
Réduction de la survie et de la fécondité des bourdons (ici)
Effets sur l’activité d’alimentation des abeilles domestiques (ici)
Par ailleurs, il a été démontré que les résidus de néonicotinoïdes, étant solubles dans l’eau, migrent d’une parcelle à l’autre. Quand on sait que les abords des champs sont les derniers lieux de biodiversité qui présentent des floraisons en quantité, on mesure les risques pour les insectes.
Les études menées par l’EFSA n’ont pas analysé l’effet sublétal du sulfoxaflor, ce qui est assez inconcevable lorsque l’on connait les graves effets des néonicotinoïdes. Ce manquement justifie à lui seul le refus de l’usage de cette molécule le temps de réaliser des études.
Sulfoxaflor : des alternatives existent
L’autorisation du sulfoxaflor en culture de betteraves est d’autant plus regrettable que des alternatives à ce produit existent. La production de betterave biologique est en développement à l’étranger et en Belgique. Elle répond à une demande croissante des consommateurs et nous regrettons que l’entreprise sucrière n’y porte pas plus d’intérêt. Certains de nos voisins, comme la France et le Luxembourg, n’ont accordé aucune autorisation pour cette substance.
De par sa position de leader dans la production betteravière, la Raffinerie a les moyens d’orienter les modes de production. C’est pourquoi nous lui demandons de mettre tout en œuvre pour développer la culture biologique de la betterave.
L’Europe déroge à ses beaux principes. La Belgique, quant à elle, « déroge »… Vive la rhétorique et mort aux abeilles ! Tel semble être désormais le message de ceux qui nous gouvernent ! Voici, à présent, le sulfoxaflor. Pas exactement un nouveau venu : nous vous en parlions déjà il y a six ans ! Et pas pour vous en dire beaucoup de bien…
Le sulfoxaflor est un insecticide systémique agissant en tant que neurotoxine et ciblant principalement les insectes piqueurs-suceurs, dont les pucerons. Neurotoxique de type néonicotinoïde, le sulfoxaflor agit à très faible dose. Il se diffuse dans tous les organes des plantes traitées. Cette molécule insecticide appartient à une nouvelle famille chimique – les sulfomixines, créée de toutes pièces pour ne pas faire un « néonic » de plus. Elle est utilisée pour exterminer tout type d’insectes susceptibles de s’attaquer à différentes cultures, dont certaines sont mellifères, comme les agrumes, les fruits à noyaux et à pépins, une grande variété de légumes etc. Loin d’être spécifique, il présente des impacts désastreux sur les insectes auxiliaires : abeilles mellifères, abeilles solitaires, bourdons, syrphes… sont autant d’insectes bénéfiques au bon fonctionnement des écosystèmes et, malheureusement, également la première cible de ce neurotoxique puissant.
Il est important de le répéter : l’heure est grave ! Depuis les années nonante, 75% de la biomasse des insectes a disparu ! En cause : l’utilisation massive des néonicotinoïdes dont le sulfoxaflor. Si l’argument naturaliste ne suffit pas pour vous convaincre, il est bon de rappeler également que plus des deux tiers de ce que nous mangeons est issu, directement ou indirectement, de plantes ayant besoin d’une pollinisation par un insecte. Dans le même ordre d’idées, on prête souvent à Einstein la phrase qui suit : « si les abeilles disparaissaient de la surface du globe, l’homme n’aurait plus que quelques années à vivre. Plus de pollinisation, plus de plantes, plus d’animaux, plus d’hommes… »
Depuis 2015, de nombreuses voix s’élèvent
Nature & Progrès agit depuis longtemps contre l’application dévastatrice du sulfoxaflor pour les écosystèmes et l’humain. En 2015, année de sa première autorisation en Europe, Nature & Progrès avait déjà sollicité nos politiciens pour leur demander de prendre les mesures nécessaires afin que le sulfoxaflor ne soit pas autorisé en Belgique. En dépit de nombreuses voix opposées à son autorisation sur le sol belge, des produits pharmaceutiques à base de sulfoxaflor furent autorisés ces dernières années. Une première autorisation fut octroyée, en 2020, pour lutter contre les pucerons en betterave sucrière, pour une durée de cent vingt jours, suivie d’une nouvelle autorisation, fin 2020, étendue cette fois à un nombre important de cultures : pommes de terre, fèves, féveroles, choux.
En mars 2021, Nature & Progrès et PAN-Europe interpellèrent notre ministre fédéral de l’agriculture, au sujet de l’autorisation du sulfoxaflor dans ces cultures de plein champ. Il est grand temps, en effet, de libérer ces cultures légumières et légumineuses de ce puissant neurotoxique, sachant qu’elles représentent un nombre d’hectares conséquent, en Belgique, et qu’elles sont parmi les plus traitées. La Belgique, incapable de parler d’une seule voix, s’abstiendrait aux dernières nouvelles dans le débat européen sur son interdiction.
Il semble urgent, par conséquent, de rappeler que les alternatives à ce puissant neurotoxique existent. Et que leur efficacité n’est plus à démontrer !
L’initiative citoyenne européenne « Sauvons les abeilles et les agriculteurs » est portée par un réseau de cent quarante ONG environnementales, d’organisations d’agriculteurs et d’apiculteurs, de fondations caritatives et d’institutions scientifiques distribuées à travers l’Union Européenne. Leur but est de réconcilier agriculture, santé et biodiversité. Et cela passe par un arrêt complet de l’utilisation des pesticides ! Plus de 1,2 millions de citoyens européens ont signé leur initiative en octobre dernier.
Mettre en lumière les alternatives existantes
Chez Nature & Progrès, loin de chercher à dénoncer un système, nous mettons un point d’honneur à mettre en avant les alternatives aux pesticides chimiques de synthèse qui sont mises en pratique sur le terrain. C’est la méthodologie de notre campagne « Vers une Wallonie sans pesticides, nous y croyons » : rencontrer les agriculteurs au sein de leurs fermes et sur leurs parcelles de cultures, et se baser sur leurs témoignages de terrain pour apporter des solutions réalistes et réalisables.
1. Mieux vaut prévenir que guérir : tel est notre leitmotiv !
Nous prônons des pratiques agricoles préventives pour prévenir l’apparition d’insectes ravageurs. Ces méthodes sont variées et leur réussite tient en leur intégration combinée dans un même système de culture. En effet, l’objectif est d’atteindre des synergies entre les effets associés de différentes méthodes alternatives. Individuellement, ces alternatives pourraient être moins efficaces ou moins adaptées…
– Une pratique préventive familière en agriculture bio : la rotation des cultures
La diversification spatiale et temporelle est la clef pour minimiser la pression des insectes ravageurs et pour prévenir efficacement leur installation. En agriculture bio, la rotation des cultures et l’alternance de cultures d’été et de cultures d’hiver est l’alternative agronomique la plus efficace aux pesticides synthétiques. La rotation permet de casser le cycle de vie des ravageurs. A titre d’exemple, en cultures de légumes, réaliser une rotation entre cultures de légumes-feuilles et de légumes-racines prévient l’installation d’insectes ravageurs. Dans le même ordre d’idées, il est essentiel d’éviter de cultiver, de manière trop fréquente, des cultures de la même famille botanique sur une même parcelle.
Culture en rotation
2. La prévention passe également par des pratiques agroécologiques qui tendent à améliorer l’efficacité d’ennemis naturels pour réduire la pression des ravageurs :
– La mise en place de « cultures mixtes » et de « cultures intercalaires »
Ce principe se base sur l’association spatiale de deux – ou plusieurs – espèces culturales. Alors que la première technique – « culture mixte » – consiste à planter simultanément deux ou plusieurs plantes sur un même terrain, la deuxième – « culture intercalaire » – consiste à semer deux ou plusieurs cultures, en même temps, sur une parcelle donnée, dans des rangées séparées. A côté de leur efficacité dans la lutte biologique, les cultures mixtes et les cultures intercalaires favorisent également le maintien de la fertilité du sol et des rendements culturaux plus élevés.
Ainsi, certaines espèces végétales peuvent agir comme « cultures-pièges » ou comme ressources pour les ennemis naturels des ravageurs. Par un contrôle « top-down », les prédateurs naturels régulent ainsi l’abondance d’une population de ravageurs. Les cultures pièges fournissent un habitat aux insectes bénéfiques ou auxiliaires, comme les coccinelles, les araignées et les syrphes.
Une autre approche de lutte biologique, via les cultures-pièges, est la stratégie d’ »attraction-répulsion » qui consiste à « chasser » les insectes ravageurs d’une culture principale et à les « charmer » vers la lisière du champ. Un exemple – parmi de nombreux autres ! – est l’implantation de bandes de moutarde comme cultures-pièges pour contrôler la punaise arlequin, un insecte perceur-suceur qui se nourrit des feuilles de crucifères. L’introduction de cultures-pièges permet de limiter fortement les dommages liés aux attaques de ce ravageur sur le chou, le brocoli, les choux de Bruxelles et le chou-fleur.
Une culture intercalaire de trèfle violet : une espèce dont les racines fixent l’azote atmosphérique, qu’elles restitueront ensuite au sol. Un exemple d’engrais vert efficace entre deux cultures !
– L’implantation de bandes fleuries et enherbées
Créer des habitats propices aux prédateurs et aux parasitoïdes (1) naturels des ravageurs peut également être réalisé par l’intermédiaire de bandes fleuries et de bandes enherbées. A grande échelle au sein de cultures plein champ, à plus petite échelle dans des cultures maraîchères ou simplement dans votre jardin, les bandes fleuries favorisent la lutte biologique contre les ravageurs en accueillant les insectes auxiliaires. Ces structures participent grandement à la biodiversité fonctionnelle, en apportant des fonctions de protection, des refuges d’hivernation, des ressources alimentaires pour les insectes auxiliaires et d’autres organismes bénéfiques. Entourer les parcelles de haies brise-vent, de bons refuges pour les insectes auxiliaires, permet également de diminuer la dispersion des ailés entre les différentes cultures.
Une réflexion en amont de l’implantation des bandes est conseillée : favorisez une diversité d’espèces à floraison précoce et étalée dans le temps, veillez à ce que les espèces choisies soient adaptées aux conditions pédoclimatiques de la parcelle, donnez la priorité à la durabilité et à la facilité de gestion des espèces, et finalement à la capacité à accueillir des pucerons spécifiques.
Bandes d’espèces mellifères
Des bandes mixtes – enherbées et fleuries – peuvent également être établies. Ces structures sont composées de graminées – par exemple, de la fétuque des prés, de la houlque laineuse, du ray-grass, etc. – qui, par leur structuration en touffes, offrent un site d’hivernation aux carabes, aux staphylins et aux araignées – des prédateurs qui raffolent des pucerons ! Les légumineuses ajoutées au mélange, telles que des espèces de trèfles, représentent également des sites d’hivernation pour les insectes auxiliaires. Finalement, à ce mélange de graminées et de légumineuses, sera ajoutée une composition d’espèces végétales qui bénéficient aux insectes adultes floricoles, comme sources de nourriture et sites d’hivernation, telles que l’achillée millefeuille, la carotte sauvage, la consoude officinale, le lotier corniculé ou encore le bouton d’or…
Un exemple de bandes fleuries mixtes : on y distingue des graminées, des légumineuses – sainfoin, lotier corniculé… – et des espèces floricoles – achillée millefeuille, vipérine…
3. « Mulcher », une méthode aux nombreux atouts
« Mulcher » consiste à placer au pied des plantes du paillage, des branches issues de la taille d’arbres, etc. En plus de freiner le développement des mauvaises herbes à proximité de la culture, le « mulch » enrichit le sol en humus, conserve son humidité, limite son érosion par le vent ainsi que sa compaction par la pluie. Sous cette couverture, le sol est également moins soumis aux températures extrêmes, ce qui préserve ses constituants. A côté de ces atouts bien connus des maraîchers et des potagistes, l’application de « mulch » de paille permettrait d’interférer avec le comportement de recherche d’hôte des pucerons, et représenterait une barrière protectrice pour la culture ainsi « mulchée » face aux attaques d’insectes piqueurs-suceurs.
– Couvrir le sol dans les vergers
Les pucerons comptent parmi les ravageurs qui causent le plus de dégâts en horticulture, en agriculture, en sylviculture et dans les jardins. Couvrir le sol d’espèces végétales-refuges de la faune auxiliaire est une autre méthode de lutte préventive. A titre d’exemple, l’implantation d’une couverture de Trifolium repens – le trèfle rampant – à la base des vergers de pêchers a pour conséquence une diminution des populations de pucerons qui est due à l’augmentation de ses prédateurs – syrphes, larves de chrysope…
Des réflexions en amont, avant même le semis !
Les choix, avant plantation, des parcelles de cultures adjacentes doivent être bien réfléchis car des migrations de pucerons, d’une parcelle de culture à une autre, peuvent créer énormément de dommages aux cultures. Sélectionner soigneusement l’habitat d’une culture avant la plantation permet, par exemple, d’éviter les dispersions du puceron du pois, dans des cultures de légumineuses qui auraient été implantées à proximité. Par ailleurs, la période de semis doit être également mûrement réfléchie au préalable : il faut privilégier un calendrier cultural dissociant les périodes de vol des périodes de sensibilité des plantes.
A titre d’exemple, une étude a montré qu’un semis précoce a permis à une variété de lentille d’étendre sa période de croissance et de donner plus de temps à la culture de se développer avant l’apparition des populations de pucerons, la rendant donc plus robuste face à l’attaque.
En tant que « consomm’acteur », que puis-je poser comme action contre le sulfoxaflor ?
Une chose est claire : les alternatives pour se passer du sulfoxaflor sont nombreuses ! Privilégions avant tout, dans nos assiettes, une alimentation issue de l’agriculture biologique et locale. Mobilisons-nous ensuite pour ouvrir les yeux à nos politiciens afin qu’ils fassent le pari d’une agriculture exempte de poisons. Il en va de notre santé, de celle de nos enfants et de la nature qui nous entoure !
Pour plus d’informations sur le sujet – et notamment quant à vos possibilités d’actions -, n’hésitez pas à nous contacter : camille.lepolain@natpro.be
(1) Un parasitoïde est un organisme qui se développe au détriment d’un autre organisme – principalement un insecte appelé « hôte » – qu’il tue lors de ce développement.
L’UNAB et ImPAACte ont réuni leur plaidoyer sur la PAC pour faire la première proposition conjointe entre un acteur agricole et la société civile, convaincus que réconcilier les enjeux agricoles, sociétaux et environnementaux est la seule voie d’avenir pour le secteur tout en étant soucieux d’avoir une nouvelle génération de jeunes agriculteurs dans nos fermes familiales en Wallonie.
Agriculteurs et citoyens, tous acteurs légitimes du processus de formulation de la PAC
Le nouveau règlement européen stipule que la société civile et autorités environnementales doivent être effectivement impliqués dans l’élaboration de la future PAC. Alors que nous avons été parties prenantes du processus PAC wallon jusqu’en mai 2021, nous avons ensuite été intentionnellement mis à l’écart. Bien que faisant formellement partie du comité d’accompagnement des simulations économiques, nous n’en n’avons jamais vu le rapport final. Nous avons dénoncé avec vigueur ce processus dans une lettre au Commissaire Agricole Janusz Wojciechowski.
Nous avons, ensemble, porté nos revendications auprès des Ministres, dans une carte blanche et lors de notre Marche pour la PAC organisée ce mardi 14 Décembre. Nous souhaitons ici expliquer aux agriculteur.trices comme aux citoyen.nes le projet co-construit entre l’UNAB et ImPAACte.
Quatre aspirations au centre des choix techniques et budgétaires
Redistribuer plus équitablement les aides entre agriculteurs, pour limiter la course à l’agrandissement et préserver une agriculture nourricière et à taille humaine
Augmenter le soutien financier au secteur bovin en difficulté économique, en modifiant les outils existants pour engager une transition environnementale et préserver les prairies permanentes
Orienter les aides vers la transition agroécologique d’un maximum d’exploitations, avec un lien explicite avec les objectifs de la DPR (30% de bio, transition) et du Green Deal européen
Proposer une PAC tournée vers l’avenir, qui donne une image positive de l’agriculture et rendre le métier attractif pour nos jeunes « la nouvelle génération d’agriculteurs ».
L’UNAB et ImPAACte sont les seuls acteurs de la négociation à défendre un objectif de mieux rentabiliser la filière bovine tout en ayant une ambition environnementale accrue, conformément au projet européen et au projet wallon de transition, et à mettre des chiffres dessus. Nous demandons que les mesures environnementales de la PAC, qui représentaient à présent 35% du budget total wallon entre 2014 et 2020, progressent à 40% du budget total entre 2023 et 2027 (paiement vert + écorégimes + bio + MAEC + Natura 2000 – voir notre proposition budgétaire ci-après).
Redistribution des aides pour une PAC plus juste et une agriculture à taille humaine
Pour l’UNAB et ImPAACte, les paiements directs par hectare et les aides couplées par bête existants ne sont plus des outils en phase avec les besoins socioéconomiques du secteur, favorisant l’agrandissement plutôt que le maintien des exploitations à taille humaine. De plus, ces aides font augmenter le prix du foncier à la vente comme à la location. Nous demandons donc :
un plafonnement maximal pour les aides au revenu, et pour l’IZHN (qui est aussi un paiement direct)
un plafonnement à 100 primes pour toutes les aides couplées aux bovins
une augmentation du paiement redistributif de 18% à 21% du 1er pilier
un transfert dans le 2ème pilier qui met moins de pression sur le foncier et est plus ciblé sur les besoins
Soutien accru au secteur élevage et préservation des prairies permanentes
L’élevage, par la crise économique qu’il traverse, est menacé, et doit être plus et mieux soutenu pour des raisons sociales comme environnementales. La trop faible rentabilité des prairies permanentes font craindre leur déclin, et avec elles les conséquences désastreuses qui s’en suivraient en terme de relargage de gaz à effet de serre, d’érosion, et de perte de biodiversité. Les outils actuels ne sont pas en phase avec les enjeux, c’est pourquoi l’UNAB et ImPAACte proposent d’augmenter le soutien aux éleveurs viandeux et laitiers, en recentrant les outils sur les prairies permanentes et l’autonomie fourragère :
aide couplée aux bovins dans le respect du plafond européen de 13% du 1er pilier, avec un plafonnement et un lien à l’herbe (% mini de prairies permanentes ou bien plafond de charge)
aide couplée aux protéagineux pour renforcer l’autonomie alimentaire des élevages (1,5%)
écorégime prairies permanentes avec progressivité pour l’autonomie fourragère et écorégime couverture des sols aussi sur les prairies permettant d’augmenter le soutien global aux élevages bovins, avec une incitation financière forte à l’autonomie fourragère
Par ailleurs, nous plaidons pour une protection des prairies sensibles d’un point de vue environnemental via la conditionnalité (en cas de sensibilité extrême à l’érosion, de prairie inondable, ou d’enjeu majeur pour la biodiversité).
Agriculture biologique et développement d’une agriculture nourricière et relocalisée
Les moyens concrets doivent être mis en place, tant côté offre que coté demande, pour que l’objectif DPR de 30% de bio en 2030 puisse se concrétiser. Côté demande, de véritables moyens pour la promotion des produits bio et locaux doivent être mis en place, ainsi que pour la création de filières locales et durables y compris en mobilisant mieux et plus les outils disponibles dans les deux piliers de la PAC. Côté offre, malgré la demande de l’UNAB et ImPAACte, l’option de financer le maintien bio en 1er pilier n’a pas été mise sur la table des simulations économiques. En conséquence, nous plaidons pour un transfert du 1er pilier vers le 2ème pilier du montant de l’enveloppe maintien en agriculture biologique, pour financer l’ambition de la DPR de 30% de bio en 2030 dans le 2ème pilier sans préjudice au développement des MAEC pour tous les agriculteurs.
Nous demandons aussi une revalorisation des primes bio et une surprime en zone vulnérable pour répondre à l’impératif d’y améliorer la qualité des eaux (pollution excessive pour la directive cadre eau). Nous soutenons aussi la création d’un aide pour le petit maraîchage biologique, enjeu clé de la relocalisation des systèmes alimentaires.
Ecorégimes
Nous plaidons pour une augmentation progressive et réaliste du 1er pilier à la transition économique, sociale et environnementale des exploitations agricoles. Concrètement, cela signifie partir en 2023 d’une contribution de 30% du 1er pilier, comme dans la PAC actuelle (paiement vert), en augmentation jusqu’à 35% en 2027. Grâce aux écorégimes, un maximum d’exploitations doivent évoluer vers plus de résilience et d’autonomie, tout en restant productives, notamment par l’agriculture écologiquement intensive qui substitue les intrants chimiques par des services écosystémiques. Il y a 4 écorégimes prioritaires :
paiement à la prairie permanente progressif avec l’autonomie fourragère
cultures favorables à l’environnement sans pesticides et avec des zones refuges qui contribuent au maillage écologique
couverture des sols du 15 Décembre au 25 février sans travail du sol dans cette période
maillage écologique, sur base d’une liste d’éléments pertinents pour la biodiversité
Nous sommes contre le plafonnement des écorégimes car les enjeux (pollution des eaux, déclin de la biodiversité, érosion etc.) sont trop importants et lourds de conséquence pour la société dans son ensemble. Il faut pouvoir agir vite et partout.
Mesures agrienvironnementales et climatiques (MAEC)
Nous demandons à transférer les MB1 (haies), MB6 (cultures environnementales) et MB9 (autonomie fourragère) dans les écorégimes du 1er pilier, en conservant les autres dans le 2ème pilier. La priorité pour les MAEC 2023-2027 est le développement du maillage écologique, afin de redévelopper 10% de maillage en cultures et 15% en prairie d’ici 2027. Par maillage nous entendons tous les éléments ponctuels, linéaires et surfaciques qui soutiennent de manière déterminante la biodiversité, comme les haies, arbres, bandes enherbées et fleuries, aménagement pour la faune et les pollinisateurs, zones refuges ou prairies très riches en biodiversité. Celui-ci est à la fois un levier critique de la transition agroécologique, et pour enrayer le déclin de la biodiversité dans les milieux agricoles.
Ce mardi 14 décembre est un jour important. Le gouvernement wallon se réunit pour finaliser son plan stratégique « Politique Agricole commune 2023-2027 » et ainsi sceller l’avenir de l’agriculture pour quelques années. Alors, réussite ou catastrophe à venir ? Le second cas signifierait une triste situation de stand-by. Si nous continuons comme nous le faisons depuis 20 ans, l’agriculture sera maintenue dans la pauvreté et dans les difficultés.
La solution ? Elle est d’accompagner les agriculteurs afin de les rendre plus autonomes. La Wallonie doit pouvoir produire l’alimentation des wallons. Logique, non ? Or, actuellement, seulement 20 % des terres servent à produire des aliments d’origine végétale pour les wallons.
Marche pour une PAC wallonne qui réconcilie agriculture, citoyens, nature et climat
L’Unab (Union Nationale des Agrobiologistes Belges), la coalition ImPAACte (initiative de Nature & Progrès, Natagora, WWF, Inter-Environnement Wallonie et Greenpeace) ainsi que de nombreux agriculteurs et citoyens se sont réunis ce matin pour manifester dans les rues de Namur « pour une PAC de la transition ».
Le groupe a rendu visite successivement aux Ministres wallons Monsieur Borsus, Madame Tellier, Monsieur Henry, Madame Morreale et Monsieur Di Rupo pour les convaincre de prendre cette voie d’avenir pour la Wallonie. Chaque rencontre était l’occasion de rappeler leurs revendications pour une agriculture respectueuse de l’Homme et de l’Environnement.
La PAC actuelle doit changer
Le pays a de bonnes terres pour produire et les agriculteurs ont la technique nécessaire. La coalition demande à ce que la PAC soit une véritable politique et qu’elle oriente l’agriculture et l’alimentation pour qu’elles nourrissent les wallons dans le respect de l’environnement. Ils demandent :
• Des moyens pour obtenir 30% de bio en 2030 comme le prévoit la DPR ; • Le soutien financier aux éleveurs en transformant progressivement les primes au bétail vers une prime à l’herbage ; • A ramener 10% d’espace pour la nature et la biodiversité dans les milieux agricoles et les zones de cultures.
De plus, un rééquilibrage des aides en faveur des exploiteurs à taille humaine est nécessaire.
La stratégie est en discussion au Gouvernement et doit être finalisée et envoyée à l’Europe d’ici la fin de l’année. Le compte à rebours est lancé. Nous entrons ainsi dans la dernière ligne droite pour décider cette politique qui va impacter la vie de milliers d’agriculteurs mais aussi des citoyens consommateurs.
Ce vendredi 22 octobre 2021, la Belgique aura l’occasion de voter sur le devenir du Sulfoxaflor, un insecticide semblable aux néonicotinoïdes et hautement toxique pour les abeilles. Depuis 2 ans, la Commission est en discussion avec les Etats membres afin de l’interdire. Le Ministre Clarinval s’y oppose [1]. Il favorise une nouvelle fois l’intérêt de l’agrochimie sur la protection de l’environnement.
Martin Dermine, coordinateur de projet à PAN Europe indique : “Notre biodiversité est en crise et la position du Ministre Clarinval est intolérable. Un nombre important d’études renforce l’intention d’interdiction de la Commission. En effet, ce produit présente une toxicité à court et à long terme sur les abeilles et les bourdons. Les alternatives non-chimiques existent, il serait dès lors temps que le Ministre favorise ces dernières plutôt que l’industrie des pesticides !”.
Marc Fichers, secrétaire général de Nature & Progrès Belgique rajoute : “Depuis l’autorisation du Sulfoxaflor en 2015, les ministre Borsus et Ducarme nous avaient garanti que cet insecticide ne serait jamais autorisé en plein champ en Belgique afin de protéger les pollinisateurs. A l’arrivée du Ministre Clarinval, le Sulfoxaflor a été autorisé en plein champ. Et maintenant, malgré l’obligation légale de l’interdire, la Belgique s’oppose à la Commission européenne, pour tenter d’en empêcher l’interdiction”.
Le Sulfoxaflor et les abeilles
Le Sulfoxaflor a été autorisé au niveau européen pour la première fois en 2015 [2], à la condition que son producteur (Corteva) fournisse des études complémentaires de toxicité du produit. De fait, en 2019, l’Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (EFSA) a remis un avis négatif [3], indiquant qu’il n’y avait pas d’utilisations sûres de ce pesticide pour les abeilles. Depuis, le dossier revient régulièrement à la table des discussions entre la Commission européenne et les Etats membres. Lors de la dernière réunion (juillet) [4], 11 Etats Membres souhaitaient son interdiction. Neuf (dont la Belgique) s’y opposaient et sept étaient encore indécis.
Martin Dermine conclut : “Le Ministre Clarinval nous montre à nouveau le peu d’importance qu’il donne à la protection de l’environnement et de la santé. Sous ce gouvernement, la Belgique se positionne systématiquement du côté des Etats européens favorisant les pesticides au détriment de nos pollinisateurs”.
Dans le cadre du Pacte Vert Européen, la Belgique devra réduire de 50% son utilisation de pesticides d’ici à 2030. Le gouvernement fédéral s’est engagé à mettre en place un ambitieux plan de réduction des pesticides [5]. Mais rien n’a été publié jusqu’à présent.
En collaboration avec plus de 200 organisations à travers l’Europe, Nature & Progrès et PAN Europe se préparent à célébrer le succès de la deuxième Initiative Citoyenne Européenne (ICE) contre les pesticides, qui a recueilli plus d’un million de signatures à travers l’Europe. Si cette ICE est validée par la Commission européenne, cette dernière et le Parlement européen devront répondre aux demandes des citoyens pour une agriculture sans pesticides de synthèse et respectueuse des abeilles.
L’Initiative Citoyenne Européenne demande :
une réduction de 80% de l’utilisation des pesticides de synthèse d’ici 2030 et de 100% d’ici 2035 dans l’UE,
des mesures pour restaurer la biodiversité sur les terres agricoles,
un soutien massif aux agriculteurs pour une transition vers l’agroécologie.
Nature & Progrès se réjouit de cette réussite ! Marc Fichers, secrétaire général indique : « En 2017, Nature & Progrès a lancé sa campagne Vers une Wallonie sans pesticides, qui vise à éliminer les pesticides en Wallonie au profit des alternatives. L’association est heureuse de voir que la démarche a été suivie avec l’ICE pour recouvrir, cette fois, l’entièreté de l’Europe. »
La Belgique, 2ème pays à atteindre son quorum
Une ICE est acceptée par la Commission européenne si elle atteint plus d’un million de signatures validées. La Belgique peut se féliciter du résultat ! En effet, notre pays a été le second Etat européen à atteindre son quorum de 15.750 en février 2020. Ce chiffre était nécessaire pour faire de notre pays le deuxième pays européen à atteindre le quorum obligatoire dans 7 Etats permettant la validation de l’initiative.
Ça fait 50 ans que l’agriculture biologique se passe des pesticides. Marc Fichers indique : « Nous demandons dès maintenant à ce que les moyens financiers alloués à la recherche des pesticides chimiques de synthèse soient utilisés pour le développement des alternatives. En effet, pourquoi l’argent public devrait servir à chercher comment optimiser les pesticides alors que les citoyens n’en veulent plus ? ». Nous devons œuvrer ensemble à faire supprimer de ce pas ces pesticides cancérigènes, reprotoxiques et génotoxiques de notre environnement. Pour ce qui est des autres, nous devons développer les alternatives rapidement !
Martin Dermine, chargé de mission à PAN Europe et l’une des principales organisations à l’origine de cette ICE, déclare : « Les citoyens belges ont massivement soutenu cette Initiative Citoyenne : la Belgique est, proportionnellement, le deuxième contributeur de voix ! Paradoxalement, la Belgique est le deuxième consommateur européen de pesticides mais nos citoyens rejettent en masse l’utilisation de pesticides de synthèse dans nos campagnes et demandent un plan de transition de notre agriculture intensive vers l’agroécologie. Il est temps que nos décideurs politiques prennent conscience de la volonté populaire de mieux protéger notre santé et notre environnement.«
Pesticides : la Commission va devoir écouter les citoyens
Les ICE réussies imposent à la Commission européenne d’analyser et de répondre aux demandes des citoyens, tandis que le Parlement européen recevra les 7 membres du comité des citoyens lors d’une audition et aura la possibilité de rédiger et de voter une résolution basée sur les demandes des citoyens. Les organisateurs ont 3 mois pour remettre les signatures aux autorités nationales compétentes pour validation. Les autorités ont ensuite 1 mois pour valider les signatures.
Pesticides dans nos chambres : il nous reste 10 jours pour leur tourner le dos… avant qu’il ne soit trop tard !
Une étude lancée par l’Initiative Citoyenne Européenne (ICE) Sauvons les abeilles et les agriculteurs a révélé qu’à travers l’UE, la poussière des chambres à coucher des résidants ruraux contient un nombre important de résidus de pesticides. Sur 21 pays testés, la Belgique détient, de loin, le triste record de contaminations. Il nous reste 10 jours pour signer l’Initiative Citoyenne Européenne qui vise à éliminer les pesticides. Il n’existe pas d’autre moyen de les réguler que de les supprimer totalement. De plus, les alternatives existent !
Des citoyens vivant en zones d’agriculture intensive ont prélevé des échantillons de poussière dans leur chambre à coucher de 21 États membres. 30 pesticides ont été analysés parmi les 450 pesticides autorisés dans l’UE. Les échantillons étaient contaminés par une moyenne de 8 pesticides, avec un record de 23 résidus de pesticides pour la Belgique, loin devant l’Italie, avec 13 résidus.
Substances suspectées d’être cancérigènes, substances toxiques pour la reproduction ou encore perturbateurs endocriniens sont au menu du cocktail de pesticides auquel les riverains des zones traitées sont exposés.
Martin Dermine, chargé de mission chez PAN Europe, un des initiateurs de cette ICE et co-auteur de ce rapport: « La Belgique est un des plus gros consommateurs de pesticides en Europe et nous autorisons des pesticides extrêmement toxiques qui sont interdits chez nos voisins. La Vivaldi nous avait annoncé un plan ambitieux de réduction de l’utilisation des pesticides en Belgique mais nous ne voyons rien venir.«
Dans le cadre de l’accord de gouvernement du gouvernement De Croo, un “plan ambitieux de réduction des pesticides” devrait être mis en place (en savoir plus).
Marc Fichers, secrétaire général de Nature & Progrès Belgique d’ajouter: “Cette étude ne fait que confirmer ce que les études wallonnes Expopesten et Propulpp avaient démontré : les pesticides dérivent des lieux de traitement et polluent notre environnement. Qu’est ce qui justifie cette exposition insidieuse aux pesticides ? Pour Nature & Progrès, il faut tourner le dos à ces techniques chimiques du passé et développer les alternatives aux pesticides : elles existent dans la plupart des cas et pour le reste il faut les mettre au point. Optons pour une production alimentaire respectueuse de l’Homme et de l’environnement.”
Comment agir ?
Les citoyens ont maintenant les moyens d’agir en rejoignant l’initiative « Sauvons les abeilles et les agriculteurs » visant à recueillir 1 million de signatures dans toute l’UE d’ici la fin septembre. L’alliance de plus de 200 organisations a jusqu’au 30 septembre pour récolter les signatures nécessaires. Plus de 800 000 signatures ont été recueillies jusqu’à présent !
L’initiative comporte 3 demandes principales : 1. éliminer progressivement les pesticides de synthèse d’ici 2035 2. restaurer la biodiversité dans l’environnement agricole 3. soutien aux agriculteurs dans la transition vers l’agriculture biologique
Communiqué de presse repris sur le site de PAN Europe
Lors de la réunion du conseil AGRIFISH du 28 juin, une grande majorité des États membres a soutenu la proposition de la Commission européenne de fixer le niveau acceptable de dommages causés par les pesticides aux colonies d’abeilles domestiques à 10% de mortalité. Alors que les politiciens affirment que l’accord de 10% est un succès politique, PAN Europe pense que cet accord continuera à nuire aux pollinisateurs européens et aux insectes en général. Ceci est en opposition avec la stratégie de la biodiversité de l’accord vert européen.
Suite au scandale autour de l’intoxication de milliers de ruches à travers l’UE avec des insecticides néonicotinoïdes, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) avait proposé en 2013 une nouvelle méthodologie pour améliorer l’évaluation des risques sur la toxicité des pesticides sur les abeilles. À l’époque, les experts des États membres s’étaient accordés sur une réduction maximale de 7 % de la taille des colonies d’abeilles mellifères due aux pesticides. Le « Bee Guidance Document » n’a jamais été approuvé par les ministres de l’agriculture de l’UE, car ils craignaient que cette approche ne retire trop de pesticides du marché. La décision du Conseil AGRIFISH met donc un terme à une saga de huit ans au cours de laquelle les États membres n’ont cessé de refuser de progresser dans l’amélioration de l’évaluation des risques liés à la toxicité des pesticides pour les abeilles. La précédente évaluation des risques datait de près de 20 ans et avait été en partie co-écrite par l’industrie des pesticides elle-même.
Martin Dermine, responsable des politiques de santé et d’environnement à PAN Europe, a déclaré : « Nous sommes très inquiets car autoriser une réduction de 10% de la taille des colonies d’abeilles domestiques signifie que nous acceptons un impact important de l’utilisation des pesticides sur les insectes. Cela permettra de maintenir sur le marché des pesticides qui sont un des principaux moteurs du déclin des pollinisateurs en Europe« .
En 2013, à l’issue d’une démarche scientifique, l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA) était parvenue à la conclusion qu’après une exposition à un seul pesticide, une colonie d’abeilles domestiques pouvait survivre jusqu’à une réduction de 7% de la taille de la colonie.
Martin Dermine d’ajouter : « L’approche est biaisée : les États membres et la Commission européenne fondent leur décision sur un scénario d’exposition unique alors que dans la vie réelle, nos pollinisateurs sont exposés quotidiennement à des cocktails de pesticides et autres produits chimiques toxiques. Il est également prouvé que les pesticides augmentent la sensibilité des abeilles aux agents pathogènes. Cet aspect n’est pas du tout pris en compte« .
PAN Europe avait demandé une « réduction acceptable » de 5% maximum pour tenir compte du manque de protection lié aux nombreuses lacunes de l’évaluation des risques.
Martin Dermine de conclure : « La Commission européenne et les États membres créent ici une situation d’inégalité de traitement : alors qu’un apiculteur sera obligé d’accepter qu’un autre agriculteur tue jusqu’à 10% de ses abeilles en utilisant des pesticides, que dirait un producteur de porcs si ses porcelets perdaient 10% de leur poids d’un jour à l’autre chaque semaine ?« .
La Commission européenne s’est engagée à commencer à restaurer la biodiversité en Europe d’ici 2030 dans le cadre de la stratégie pour la biodiversité du Green Deal. PAN Europe, conjointement avec environ 200 organisations en Europe dont Nature & Progrès, plaide pour une agriculture respectueuse des abeilles et sans pesticides dans le cadre de l’initiative citoyenne européenne « Sauvons les abeilles et les agriculteurs » qui a recueilli plus de 600 000 signatures dans toute l’UE.
La position de Nature & Progrès
Nature & Progrès est également très active dans ce dossier. Nous ne voulons plus d’une production alimentaire qui exploite la nature ou qui comme ici « évalue / gère » les dégâts qu’elle crée sur le milieu naturel. L’Homme et la nature doivent vivre en symbiose ! De plus, nous avons interpellé les parties prenantes de ce dossier pour qu’elles tournent le dos à une tolérance d’un certain pourcentage de destruction des ruchers.