Habitats & énergie : cycles de rencontres

Cycles de rencontres d’échanges pour mieux comprendre les habitats alternatifs et revendiquer leur reconnaissance sociale et réglementaire.

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L’objectif principal de ce cycle, est d’échanger sur comment surmonter les différents obstacles qui jalonnent le parcours des porteurs de projets et freinent les implantations d’habitats légers ?

Ne restons pas passif ! Rejoignez-nous.

Vous êtes confronté à des obstacles ? Vous souhaitez partager votre expérience, contribuer au processus de reconnaissance, soutenir les porteurs de projets ou participer à la sensibilisation des citoyens ?

Que vous souhaitiez comprendre les obstacles, les dénoncer ou simplement vous impliquer, dans la lutte pour la reconnaissance sociale et réglementaire de l’habitat léger n’attendez pas plus longtemps !

Inscrivez-vous dès maintenant à ce cycle de rencontres et collaborons pour faire notre part.

 

 

Cycle de Biez

Nature & Progrès et les amis de la butte de Biez organisent un cycle de rencontres en vue d’identifier vos besoins et vos attentes. 

  • Date: Mercredi 24 avril
  • Heure: 19h00
  • Lieu: Maison du quartier de Biez, Rue du Beau Site, 32 – 1390 Grez-Doiceau

 

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

Cycle Chaumont-Gistoux

Habitat léger on se compte! Rencontre de partages et d’échanges sur nos projets respectifs. 

  • Date: samedi 16 mars
  • Heure: 19h30
  • Lieu: La Chaumière, Rue de Corroy 2 – 1325 Chaumont-Gistoux

Habitat léger, un art de vivre: Malgré les difficultés, certains projets arrivent à terme! Des habitants légers vous racontent leur parcours inspirant. 

  • Date: vendredi 05 avril
  • Heure: 19h30
  • Lieu: La Chaumière, Rue de Corroy 2 – 1325 Chaumont-Gistoux

Droit à un logement, plaidoyer pour un habitat léger + visite découverte d’un habitat léger. 

  • Date: samedi 20 avril
  • Heure: 10h
  • Lieu: La Chaumière, Rue de Corroy 2 – 1325 Chaumont-Gistoux

 

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

Cycle de Bruxelles

Habitat léger on se compte ! Rencontre de partages et d’échanges sur nos projets respectifs.

  • Date: mardi 23 avril
  • Heure: 19h30
  • Lieu: COWB ASBL, Chemin du Silex, 10-B – 1170 Bruxelles

 

Habitat léger, un art de vivre : Malgré les difficultés certains projets arrivent à terme ! Des habitants légers vous racontent leur parcours inspirant.

  • Date: vendredi 17 mai
  • Heure: 19h30
  • Lieu: COWB ASBL, Chemin du Silex, 10-B – 1170 Bruxelles

 

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

Cycle de Liège

Habitat léger on se compte ! Rencontre de partages et d’échanges sur nos projets respectifs

  • Date: Mercredi 10 avril
  • Heure: de 19h30 à 22h
  • Lieu: Centre liégeois du Beau mur, rue du Beau mur 48 – 4030 Liège

Habitat léger, un art de vivre : Malgré les difficultés certains projets arrivent à terme ! Des habitants légers vous racontent leur parcours inspirant.

  • Date: Vendredi 26 avril
  • Heure: de 19h30 à 22h
  • Lieu: Centre liégeois du Beau mur, rue du Beau mur 48 – 4030 Liège

 

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

Cycle de Waremme

Habitat léger, on se compte! Rencontre de partages et de questionnements des participant.es. 

  • Date: Vendredi 19 avril
  • Heure: 19h00
  • Lieu:  Rue de Grand’Axhe, 45 – 4300 Waremme

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

Cycle de Wanze

Habitat léger, on se compte! Rencontre de partages et questionnements des participant.es. 

  • Date: Lundi 06 mai
  • Heure: 19h00
  • Lieu: Place Faniel, 8 – 4520 Wanze

 

Participation gratuite sur inscription: Hamadou Kandé : 081/32.30.63 ou par mail : hamadou.kande@natpro.be

L’électricité bio, ça existe !

« Il y aura un avant et un après Covid-19« , a-t-on entendu partout. Sûr ? Au-delà des bonnes intentions, changer de cap ne sera pas une mince affaire. Manger local, utiliser davantage son vélo, cultiver son jardin… Cela suffira-t-il ? « Intuitivement, nous savons que non« , affirme Mario Heukemes, responsable de la coopérative COCITER, le fournisseur d’électricité citoyen wallon. Nous avions déjà rencontré Mario en 2016, quand COCITER n’était encore qu’une société naissante. Aux yeux de Nature & Progrès, le modèle qu’illustre COCITER est absolument inégalable tant il donne tout pouvoir aux gens qui ont besoin d’électricité. Nous y revenons donc, en donnant la parole au représentant d’une de ses coopératives coopératrices…

Par Jean-François Cornet

Introduction

Dans la conjoncture particulière que nous vivons aujourd’hui, le modèle coopératif mis en place par COCITER trouve tout son sens et pourrait être une des clés du changement. Nous retrouvons Mario pour faire le point sur l’évolution de COCITER et l’interroger sur la pertinence de cette initiative dans le contexte de l’après-Covid-19.

« Aucun basculement significatif ne s’opérera sans une modification profonde de certains secteurs stratégiques, affirme Mario Heukemes. Ceux-ci sont majoritairement aux mains de multinationales ou de grandes entreprises privées qui ne voient, bien sûr, aucun avantage à ce que le système change. »

Parmi ces domaines stratégiques à réinventer, on trouve entre autres le secteur bancaire, l’agro-alimentaire, la téléphonie mobile ou l’énergie. Ces domaines, beaucoup les pensaient réservés à une élite industrielle. Pourtant des citoyens, regroupés en coopératives, les ont déjà investis et se sont réappropriés les connaissances et les compétences nécessaires, qu’ils mettent ensuite au service de la population. NewB, Paysans Artisans, Neibo, COCITER… : la preuve est faite qu’il n’y a plus de chasse gardée !

Toutes les électricités ne se valent pas

« Nous avons fait nôtre le slogan « Pour changer le monde, changeons déjà d’électricité ! », poursuit Mario Heukemes. Il faut du changement. Mais ce n’est pas gagné. Le dérèglement climatique cause déjà, et causera encore, bien plus de dommages que le Covid-19, on le sait. Alors, à quoi sommes-nous prêts pour changer le monde ? A explorer des chemins de traverse ? A privilégier le collectif ? A renoncer à une consommation low cost ? Quand je choisis mon fournisseur d’électricité, je n’achète pas seulement l’électricité qu’il me vend. Je choisis aussi le modèle économique et social qu’il défend, je soutiens sa façon d’agir sur l’environnement, j’adhère à sa vision de la société future. Je choisi le monde dans lequel je veux vivre. Or quels sont les critères qui nous guident quand nous choisissons notre électricité ? Pour beaucoup d’entre nous, ce sont les prix. Nous soutenons ainsi le modèle low cost dont on a vu, dans d’autres domaines, à quelles aberrations il nous menait. Nous sommes malheureusement encouragés dans ce choix par certaines organisations de consommateurs et des plateformes d’achat groupé. Et tant pis pour la provenance réelle des kWh et la qualité de la production ; et tant pis pour le greenwashing, les promotions aguichantes – qui ne sont que temporaires – et les conditions en petits caractères ! Tant pis aussi pour le modèle économique dont nous sommes, du coup, le support ! Non, toutes les électricités ne se valent pas ! »

C’est aussi l’avis de Greenpeace. Dans son classement des fournisseurs d’électricité en Belgique, l’ONG donne à COCITER la meilleure note et une mention flatteuse : « cette coopérative couvre 100% de ses livraisons par une production d’électricité durable. L’énergie aux mains de la population, c’est l’avenir ! », peut-on lire sur le site de Greenpeace, www.monelectriciteverte.be.

Une électricité d’origine contrôlée

Pourtant, quelle que soit l’origine de l’électricité que nous consommons – renouvelable, nucléaire et autre fossile -, sa qualité est apparemment la même : les ampoules éclairent nos maisons de la même façon, les radiateurs chauffent pareillement, les appareils électroménagers fonctionnent tout aussi bien – ou tout aussi mal. Qu’est-ce qui est différent, alors, avec l’électricité de COCITER ? « Pour nous, explique Mario, ce qui fait la qualité d’une électricité, c’est son origine : d’où vient-elle, comment a-t-elle été produite, par qui, avec quelle conséquence sur l’environnement, sur la planète et ses habitants ? Qui profite des bénéfices engendrés ? Chez COCITER, c’est simple : l’électricité fournie aux consommateurs est celle produite en Wallonie par les coopératives citoyennes. Les coopérateurs des coopératives associées sont les propriétaires de leurs outils de production et de leur fournisseur d’électricité. C’est le circuit court de l’électricité. C’est un modèle unique en Wallonie ! Nous garantissons ainsi une électricité 100% durable, 100% locale, 100% contrôlée et gérée démocratiquement par les citoyens. C’est une électricité d’origine contrôlée. C’est ça, une électricité de qualité ! Nos prix sont dans la moyenne des autres fournisseurs alors que, contrairement à eux, nous n’avons aucune condition du type « factures par Internet obligatoire » ou « paiement trimestriel à l’avance ». Nous sommes encore une jeune société et nous avons des frais que nous n’aurons plus dans quelques années… COCITER vend l’électricité au prix coûtant, seuls les frais de fonctionnement doivent être couverts. Et évidemment, plus les clients seront nombreux, plus ces frais diminueront. »

L’électricité bio, ça existe !

Une salade bio, c’est meilleur pour la santé. Mais c’est aussi meilleur pour la terre, pour la biodiversité, pour la planète. La manière dont le maraîcher l’a cultivée, les soins qu’il lui a apportés, le respect de la nature dont il a fait preuve dans son travail, le circuit court qu’il privilégie, voilà ce qui fait la qualité de sa salade. Il en va de même pour l’électricité, explique Mario Heukemes.

« Notre électricité, c’est comme une salade bio. Nous la produisons localement avec grand soin, avec un maximum de respect pour l’environnement et nous la livrons en circuit court. Et comme le maraîcher, nous travaillons selon les principes de l’économie sociale et durable. En résumé, c’est vraiment de l’électricité bio ! »

COCITER veille également à la diversification de ses sources. Si la production des coopératives partenaires de COCITER reste principalement d’origine éolienne, elle s’est cependant diversifiée ces dernières années. Elle provient maintenant aussi d’une unité de biométhanisation, de panneaux photovoltaïques et de turbines hydrauliques. Cette diversification renforce les capacités et la solidité de l’offre de COCITER. Par ailleurs, de nouvelles coopératives se sont jointes aux coopératives de départ.

« Actuellement, treize coopératives sont partenaires dans COCITER, précise Mario Heukemes. Nous fournissons aujourd’hui cinq mille deux cents ménages et nous produisons suffisamment pour seize mille ménages. De nouvelles unités de production sont en préparation qui nous permettront, dans les années à venir, de fournir encore davantage de ménages. Il n’y a donc aucun risque que nous manquions d’électricité. »

Un fournisseur à taille humaine

Autre nouveauté, chez COCITER, le capital s’est ouvert à d’autres actionnaires qui partagent les mêmes valeurs que les coopératives citoyennes. W.Alter – anciennement, la SOWECSOM, c’est-à-dire la Société wallonne d’économie sociale de la Région wallonne -, la Fondation pour les Générations futures et les Cercles des Naturalistes de Belgiques se sont engagés aux côtés de COCITER.

« C’est un geste fort de leur part, se réjouit Mario. Nos objectifs et nos valeurs sont les mêmes : réappropriation des biens communs, lutte contre les dérèglements climatiques et protection de la biodiversité, gouvernance démocratique, consommation responsable. Leur adhésion, au-delà du soutien financier apporté, représente surtout, pour nous, un bel encouragement. C’est aussi une reconnaissance du travail effectué jour après jour, avec enthousiasme, par les équipes de terrain. »

Les équipes de terrains, parlons-en. La plupart des coopératives citoyennes fonctionnent grâce à des équipes de bénévoles. Mais elles se professionnalisent au fur et à mesure de leur développement et, dès qu’elles le peuvent, elles engagent du personnel salarié. Quant à COCITER, il emploie actuellement six personnes, soit trois « équivalents temps plein » (ETP) et demi. Une structure encore modeste donc, mais qui s’étoffe d’année en année.

« Notre taille nous permet d’être proches et à l’écoute des clients, aime à souligner Mario Heukemes. Quand un client téléphone, ce n’est pas un robot qui l’accueille en lui demandant de taper 1 ou 2… C’est Fabienne ou Guido qui répondent et le dialogue est toujours chaleureux. Nous tenons à cette spécificité de fournisseur à taille humaine. Nos clients ne sont pas juste des « clients », ils participent avec nous au circuit court de l’électricité, nous sommes co-responsables de COCITER. Ça, c’est le cœur de notre projet coopératif : remettre le citoyen au centre de l’activité économique, lui redonner du pouvoir et de la responsabilité. »

Une gouvernance partagée et solidaire

COCITER est une coopérative rassemblant treize coopératives citoyennes wallonnes qui produisent de l’électricité verte. Ce sont donc les coopérateurs de ces coopératives qui sont propriétaires de leur fournisseur. Ce modèle économique permet de garantir un prix juste pour les clients. Quant à la gouvernance interne de COCITER, elle se veut participative.

« Chaque coopérative associée, explique Mario, participe aux décisions et aux orientations stratégiques de la société. Quelle que soit sa taille et l’avancement de ses projets de production, quel que soit son apport financier à la structure commune, chacune a la possibilité de participer aux discussions au sein des instances de décisions. Le principe d’organisation en cercles permet à celles et ceux qui le souhaitent de s’investir dans un ou plusieurs aspects de la gestion qui lui tiennent à cœur. C’est un modèle exigeant mais qui permet à tous les associés de trouver leur place dans le fonctionnement de la société. »

La crise du Covid-19 nous l’a rappelé, parfois douloureusement : notre modèle économique et social a trop longtemps négligé l’humain et le collectif. Deux valeurs qui fondent COCITER, fournisseur atypique, bien en phase donc avec la société résiliente dont nous avons besoin.

COCITER – le Comptoir Citoyen des Energies renouvelables
www.cociter.be – 080/68.57.38

Pollution lumineuse, un fléau dans l’ombre

Alors que diverses activités humaines préjudiciables pour l’environnement et la biodiversité sont largement médiatisées, les impacts – pourtant désastreux ! – engendrés par la pollution lumineuse sont trop souvent passés sous silence. La « fée électricité » n’a pas apporté que des bienfaits, loin de là, elle est aussi responsable de véritables gouffres économiques et financiers. Et la mauvaise éducation de l’humain « qui se croit tout seul sur terre » est cause de bien des dérèglements encore trop insoupçonnés…

Par Morgane Peyrot

Introduction

Parmi les nombreux dangers qui pèsent sur la planète, les répercussions écologiques du réchauffement climatique, de l’agriculture intensive et de l’usage des pesticides, ou encore les invasions biologiques d’espèces exotiques envahissantes, sont régulièrement – et à juste titre – pointés du doigt. Nonobstant les effets d’une menace insidieuse et de plus en plus grandissante : la pollution lumineuse. Inhérent à l’augmentation de la période d’activité des sociétés humaines et largement répandu à travers le globe, l’éclairage artificiel des lieux et des monuments publics, des autoroutes et même des enseignes publicitaires, apparaît dans nos pays industrialisés comme un phénomène quotidien relativement banal.

Si l’existence de ces sources lumineuses procure parfois une sensation de confort et de sécurité, leurs nombreux effets délétères, immédiats ou à long terme, sont souvent méconnus du grand public. Outre l’entrave à l’observation du ciel, dénoncée massivement par les astronomes auprès des pouvoirs publics depuis les années septante, l’éclairage artificiel, devenu excessif, a de sérieux impacts sur la faune et flore, les dépenses économiques et énergétiques, ainsi que la santé humaine. Une réalité d’autant plus inquiétante que le nombre de points lumineux augmente d’environ 2% par an, à l’échelle mondiale, et de 10% par an, en Europe (1).

Un désastre pour la biodiversité

L’éclairage artificiel, envahissant et abusif, a des conséquences sans précédent sur la faune et la flore. Si, en tant qu’êtres humains, nous avons une activité diurne, notre « modèle » ne s’applique pas pour autant à la majorité des êtres vivants auxquels nous l’imposons. Concernant les animaux, d’après Romain Sordello, ingénieur expert en biodiversité « une étude parue en 2010 indiquait que 30% des mammifères et plus de 60% des invertébrés sont partiellement ou essentiellement nocturnes« . Quant aux végétaux, dont la condition impose l’immobilité, impossible de s’y soustraire. Ainsi paient-ils pour notre confort le prix d’un lourd tribut… Plantes et insectes, reptiles, amphibiens, oiseaux, chauves-souris ou autres mammifères et poissons jusqu’au plancton, aucun d’entre eux n’est épargné ! Interférant avec le cycle naturel du jour et de la nuit, l’éclairage artificiel dérègle l’horloge interne et altère ainsi de nombreuses fonctions biologiques essentielles telles que la croissance, la reproduction ou la régulation hormonale. Les activités saisonnières telles que la migration des oiseaux en sont complètement perturbées. De même que la floraison ou la sénescence – vieillissement et chute – des feuilles, mécanisme naturel qui intervient chez de nombreuses plantes pour résister aux rigueurs de l’hiver. L’illustration édifiante d’une étude publiée par la British Ecological Society, prouve à quel point la pollution lumineuse peut affecter le cycle des arbres.

En outre, la formation de halos lumineux au-dessus des zones urbaines crée de véritables barrières ou pièges écologiques : les espèces naturellement repoussées par la lumière -phototaxie négative – comme certaines chauves-souris, ne peuvent plus rejoindre leur habitat, tandis que les espèces attirées par la lumière – phototaxie positive – modifient leur comportement et connaissent souvent une issue fatale. Les insectes en sont particulièrement victimes : papillons, mouches, moustiques et coléoptères, peuvent être attirés par une source lumineuse jusqu’à sept cents mètres de distance. En période estivale, ils meurent chaque nuit par centaines, en tournant autour des lampes, à force d’épuisement, de brûlures occasionnées par la chaleur ou encore par prédation. Après les insecticides, l’éclairage artificiel serait la principale cause de mortalité chez les insectes, encore dénoncée pas plus tard qu’en janvier par une étude publiée dans la revue Biological Conservation. Les ravages de l’attraction lumineuse touchent aussi sévèrement les oiseaux, dont le taux de mortalité par collision – avec les phares des véhicules ou bâtiments éclairés – augmente drastiquement, surtout en période de migration. De plus, la plupart des animaux se repèrent la nuit grâce aux étoiles, malheureusement dissimulées par la lumière artificielle, ce qui altère considérablement leurs facultés d’orientation. Par exemple, les jeunes tortues marines qui, après l’éclosion, attendent l’horizon nocturne pour gagner le grand large, ne trouvent pas leur chemin et meurent le lendemain sur la plage, assaillies par les prédateurs ou déshydratées par la chaleur. Les rapports proies-prédateurs sont quasiment toujours concernés, conduisant à une réduction des effectifs de population plus brutale et rapide que prévu. Au demeurant insignifiant, l’éclairage artificiel est un fléau pour la biodiversité qui signe, chaque nuit, le bilan d’une véritable hécatombe.

Risques sanitaires, pour l’être humain également

Nos congénères non humains ne sont pas seuls à subir les conséquences de la pollution lumineuse qui constitue un réel problème de santé publique. Elle s’observe en particulier dans nos maisons, par l’exposition croissante et prolongée à la lumière artificielle des LED, ordinateurs, portables et écrans en tous genres, qui émettent de la lumière bleue, des longueurs d’ondes comprises entre 380 et 500 nm. Interprétée par notre cerveau comme la lumière du jour, celle-ci dérègle nos rythmes circadiens et détériore la qualité de notre sommeil, en inhibant la production d’une hormone importante liée à l’endormissement : la mélatonine. Or un sommeil manquant ou défaillant favorise l’apparition de maladies cardiovasculaires, psychiques – la dépression – ou chroniques, comme le diabète et l’obésité. Les LED sont, entre autres, reconnus pour provoquer ou aggraver les problèmes de vue. Dès 2010, l’ANSES alerta sur la lumière bleue des LED qui affecte la rétine des plus jeunes, dans un rapport auquel fait suite un dossier de presse éloquent de 2019 (2). Enfin en 2018, une étude européenne, menée par le Barcelona Institute for Global Health (3), établit un lien entre l’exposition nocturne à la lumière bleue et un risque accru de cancer du sein et de la prostate.

Un gouffre énergétique et financier

L’éclairage artificiel ne cesse d’augmenter, impliquant des dépenses excessives et, de surcroît, un bilan énergétique catastrophique pour la planète. En France, par exemple, le nombre de points lumineux est passé de 7,2 millions, en 1990, à 9,5 millions, en 2015, et serait aujourd’hui de 11 millions. D’après l’ADEME, l’éclairage public correspond à 41% de la consommation et 37% de la facture d’électricité des communes, soit une bonne partie de leur budget énergie, et génèrerait près de 670.000 tonnes de CO2 par an (4). Tout cela sans compter l’approvisionnement, les équipements et le transport des systèmes d’éclairage, qui entraînent également des émissions de gaz à effet de serre, et ont un coût financier. De plus l’électricité, principalement produite à partir de sources nucléaire – uranium – et d’énergies fossiles, comme le gaz ou le charbon, participe à l’épuisement de ces ressources naturelles qui ne se trouvent pas en quantité illimitée dans le sol. Cette tendance à augmenter sans cesse l’éclairage artificiel relève de l’entêtement, lorsqu’on sait que plus de la moitié du parc d’éclairage public n’est plus aux normes – y subsistent, par exemple, des lampes à vapeur de mercure – et surconsomme de l’énergie. Alors même que les connaissances ont aujourd’hui évoluées en matière d’installations et qu’un investissement dans la rénovation serait plus profitable. Selon l’UNEP (United Nations Environment Program), le seul passage aux nouvelles technologies de l’éclairage permettrait d’économiser, à l’échelle mondiale, cent quarante milliards de dollars et de réduire les émissions de CO2 de 580 millions de tonnes par an (5) – encore faut-il évidemment que ces « nouvelles technologies » ne résident pas uniquement dans l’installation déraisonnée de LED, bien moins vertes qu’il n’y paraît pour la biodiversité… Un gaspillage accru, auquel s’ajoutent une puissance d’éclairage et un nombre de lampadaires trop élevés par rapport aux besoins, ou encore l’éclairage de zones très peu – voire pas du tout – fréquentées la nuit. De nombreux progrès restent donc à faire pour réduire les impacts de la pollution lumineuse…

Si la pollution lumineuse occasionne de sérieux dégâts, elle pourrait malgré tout être facilement limitée, ne serait-ce qu’en pratiquant l’extinction de l’éclairage public. Une mesure évidente et relativement simple à mettre en place, qui semble pourtant avoir du mal à être appliquée, notamment par crainte d’insécurité. En effet, en France, le décret du 30 janvier 2012 a imposé l’extinction des publicités et enseignes lumineuses de 1 heure à 6 heures du matin, suivi par l’arrêté du 25 janvier 2013, relatif à l’extinction de l’éclairage nocturne des bâtiments non résidentiels. Cependant, aucune loi n’a jamais étendu ces prescriptions aux parcs d’éclairages publics des communes dont les efforts, bien que louables, apparaissent encore insuffisants…

Réduire la voilure

Le dispositif de prise en compte et de réduction de la pollution lumineuse s’améliore quelque peu, avec l’arrêté du 27 décembre 2018 qui impose des prescriptions techniques pour les paramètres d’éclairage. Ce dernier prévoit notamment l’interdiction de l’éclairage en direction du ciel et des seuils de températures de couleurs à respecter, la nuisance d’une source lumineuse étant plus ou moins aggravée selon sa teinte – par exemple, la lumière bleue des LED. Pour la biodiversité, l’instauration d’une « trame noire » émerge, depuis quelques années, à l’échelle du territoire. Ce nouvel outil, proposé par le Ministère de la transition écologique et solidaire, est voué à limiter la dégradation et la fragmentation des habitats en assurant la continuité écologique des milieux, à l’instar de la trame verte et bleue.

En Belgique, aucun décret relatif à la pollution lumineuse n’a jamais vu le jour. Cependant, en mai 2019, l’ASCEN (Association pour la Sauvegarde du Ciel et de l’Environnement Nocturnes) et l’Observatoire Centre Ardenne ont signé une première charte contre la pollution lumineuse. La ville de Wavre a également mis en place un système d’éclairage intelligent basé sur des détecteurs de mouvement qui restreignent ainsi son usage aux besoins réels. D’autres initiatives fleurissent, de part et d’autre, mais il nous faudra encore dépasser une entrave psychologique de taille avant d’espérer que l’Europe rende à la nuit l’obscurité : la peur du noir ! Une peur primitive qui trouve son origine dans la crainte d’attaques de bêtes sauvages… Dans les temps modernes, il s’agit surtout d’une crainte relative à la hausse des accidents et de la criminalité. Plusieurs études prouvent pourtant que le nombre d’accidents est réduit dans un environnement moins éclairé, notamment sur les routes, les conducteurs étant plus attentifs dans ces conditions. Concernant la criminalité et la délinquance, l’éclairage des lieux publics ne prévient pas mais favorise au contraire les rassemblements à vocation agressive. Enfin, plus de 80% des vols et agressions ont finalement lieu… en plein jour (6) ! Plusieurs contrevérités ont, malgré tout, la peau dure…

Une lutte citoyenne, une de plus…

En attendant une possible évolution de la législation, chacun peut agir pour endiguer – ou, du moins, ne pas aggraver – les conséquences multiples de la pollution lumineuse, en évitant le plus possible d’y prendre part. Veillez, par exemple, à limiter l’installation d’éclairages extérieurs et préférez, si possible, installer des détecteurs de présence afin de vous assurer que vos éclairages ne fonctionnent qu’en temps voulu. Dans le cas contraire, pensez évidemment à éteindre toutes les lumières si elles sont inutiles, de la même manière que vous le feriez dans votre maison. Tentez de vous diriger vers des ampoules moins puissantes et moins nocives pour la faune – ampoule à sodium basse pression, par exemple – en évitant, à tout prix, la lumière bleue des LED ou en choisissant des LED ambrées – moins courantes mais tout de même accessibles dans le commerce. Malgré leur côté agréable et festif, limitez aussi l’usage des décorations de Noël ! ?’hésitez pas, enfin, à vous rapprocher des associations nationales de protection du ciel : ANPCEN – www.anpcen.fr – en France ou ASCEN – www.ascen.be – en Belgique. Informez-vous lors de leurs évènements et prenez part à leurs actions. Alertez également vos proches et vos voisins sur cette problématique : une prise de conscience collective sera le meilleur moyen d’agir !

Notes :

(1) D’après les données du site NuitFrancewww.nuitfrance.fr -, plateforme d’information sur le thème de la nuit, développée par l’ingénieur expert en biodiversité Romain Sordello

(2) Effets sur la santé humaine et sur l’environnement des systèmes utilisant des LED, ANSES, dossier de presse du 14 mai 2019

(3) Evaluating the Association between Artificial Light-at-Night Exposure and Breast and Prostate Cancer Risk in Spain (MCC-Spain Study), Environemental Health Perspectives, vol.126, No. 4, Avril 2018

(4) Source : ministère de la transition écologique et solidaire

(5) Source : AFE (Agence Française de l’Eclairage)

(6) Selon les chiffres disponibles de l’Observatoire national de la délinquance et des ripostes pénales (ONDRP)

Comment les communes accueillent-elles l’habitat léger ?

L’habitat léger apporte de nombreuses solutions originales, à condition bien sûr de bénéficier des précieux conseils qui permettent d’en éviter les pièges, c’est ce que nous vous indiquions dans la cadre de précédents articles… Mais où s’installer ?, demandions-nous aussi dans les pages de Valériane n°140 ? Nous apportons de nouveaux éclairages dans le cadre d’une conversation – par vidéoconférence, Covid-19 oblige – avec Thibault Céder, de l’Union des Villes et Communes, que nous avions déjà accueilli lors du salon Valériane 2019. Extraits.

Par Dominique Parizel et Hamadou Kandé

Introduction

Mention « grande distinction », tout d’abord, pour l’excellent dossier publié dans Le mouvement communal n°948, de mai 2020, que vous pouvez consulter aisément sur le site Internet de l’Union des Villes et Communes (1). Il s’intitule « L’habitat léger en dix questions« , comprend un récapitulatif de toutes les questions importantes en la matière et devrait rapidement devenir un outil essentiel d’information et de sensibilisation des mandataires et des agents communaux.

« La question de l’habitat léger est récente, précise Thibault Céder, et la façon dont elle est appréhendée est assez différente d’une commune à l’autre. Certaines connaissent bien les questions liées au gens du voyage, ou celles qui sont inhérentes au plan HP – pour habitat permanent -, qui concerne nos concitoyens domiciliés dans des parcs touristiques. Elles sont souvent spécifiques aux communes concernées alors que l’habitat léger – un tout nouveau mode d’habitat – posera des questions transversales à toutes les communes. Toutes devront donc les examiner pour déterminer comment elles vont s’y prendre pour l’intégrer. »

Des questions nouvelles liées à l’habitat

Une dizaine de communes, pas plus, ont déjà eu l’occasion d’entamer leur réflexion sur l’habitat léger. Nous ne vous présentons plus Benoît Piedboeuf, maïeur de Tintigny, que nous avons également eu le plaisir d’accueillir à Valériane ; nous n’évoquerons plus l’expérience du « légendaire » quartier de la baraque, à Louvain-la-Neuve… Nous citerons peut-être la commune de La Louvière qui a récemment accueilli un « festival de l’habitat léger »…

« La grande majorité des communes découvre la question dans le cadre nouvellement fixé, poursuit Thibault Céder, qui ne donne guère d’assurance spécifique sur le long terme. Or chaque commune a ses propres contraintes : contraintes de territoire, zones éventuellement compatibles avec l’habitat léger, questions plus spécifiques liées à Natura 2000, à des zones inondables, à des zones forestières, etc. Et, bien sûr, il y a les inévitables questions politiques : c’est neuf et ce type d’habitat véhicule encore beaucoup de stéréotypes. Je compare volontiers cette question à celle du parement en bois des habitations, dont peu de communes prévoyaient l’intégration. Or, à présent, l’architecture contemporaine en intègre dans pratiquement toutes les nouvelles maisons ; cela ne pose plus le moindre problème. Une large explication et une sensibilisation sont passées par là pour que l’intérêt de l’autoriser soit bien compris par tous. Quelques années seront donc encore nécessaires avant que la question de l’habitat léger et l’intérêt qu’il présente pour un certain type de population soit intégré par tous. Si les communes se posent les bonnes questions, il me paraît certain que les bonnes réponses arriveront petit à petit… Toutes constatent l’émergence de questions nouvelles liées au fait d’habiter, d’une manière générale : questions liées à la densité, questions liées à la dépendance des personnes âgées, etc. Est-ce que l’habitat léger ne pourrait pas rejoindre, par exemple, l’ »habitat kangourou » pour faciliter l’encadrement de personnes âgées, en se posant de manière temporaire au fond du jardin d’un plus jeune ? Ces jeunes, eux-mêmes, y auront peut-être recours qui ne souhaitent plus s’endetter sur le long, aspirent à un retour à la nature, au circuit court, à la permaculture, etc. Nous nous adressons aujourd’hui à un public déjà acquis à la philosophie de l’habitat léger mais de nouveaux publics sont potentiellement concernés. Je pense, par exemple, aux étudiants ; i faut maintenant sensibiliser ces publics tout autant qu’il faut adapter l’habitat léger à leurs besoins mais son principe de modularité leur conviendra très bien, tant pour des questions financières que pour des questions de dépendance, d’indépendance ou d’interdépendance. Il peut, par exemple, permettre très facilement le regroupement de services ; il offre peu d’espace mais ses coûts sont limités ; il permet le regroupement rapide de communautés dont les besoins sont comparables…

L’habitat léger doit évidemment s’efforcer de sortir de la caricature qui en fait encore l’apanage d’une certaine forme de marginalité. Il n’est évidemment pas question non plus de parquer les vieux dans des campings, alors qu’ils avaient une belle maison… L’habitat léger est une piste d’avenir pour certains pans de la population mais à condition de s’inscrire dans la mixité, dans la pluralité des habitats… Certains de ses avantages peuvent déjà être facilement montrés : il permet, par exemple, d’habiter là où l’on cultive quelques hectares de maraîchage bio ou de permaculture. Il permet de lancer sérieusement un projet de vie, d’associer décemment vie quotidienne et travail, même si on n’a que peu de moyens… Notons cependant qu’un problème de financement peut se poser car, au niveau des banques, très peu de prêts semblent envisageables pour ce type de biens. Les prêts hypothécaires ne fonctionnement pas et les prix des habitats légers sont quand même trop élevés pour de simples prêts à la consommation. Peut-être faudrait-il interpeller les banques éthiques sur cette question ? »

Une expérience encore parcellaire

« Mais à cette ouverture, avertit Thibault Céder, correspondent aussi des craintes qui sont autant de freins. Que devient, par exemple, l’habitat léger, une fois que les personnes qui l’ont installé ne sont plus là ? Qui le reprend et à quelles conditions ? Un nouvel occupant ne va-t-il pas le transformer en quelque chose qui n’était pas convenu avec le voisinage ? Bref, comment donner à la commune des assurances dans le temps au sujet d’un projet précis ? Les yourtes, par exemple, font beaucoup parler d’elles… Certaines s’intègrent idéalement puis, quand l’occupant initial part, la yourte est subitement transformée en crèche ou en RBNB (2) et la relation avec le voisinage s’en trouve évidemment considérablement modifiée… Une yourte est rarement pensée en fonction de son isolation phonique et ceux font ce choix de vie sont plus souvent à l’extérieur que la moyenne des gens. Cela peut poser problème, au niveau du « vivre ensemble », avec la résonnance liée aux façades arrière des maisons à l’intérieur d’un îlot urbain. Certaines questions qu’on ne s’était jamais posées appellent donc des solutions nouvelles : soit on modifiera les yourtes, soit elles ne seront plus autorisées dans de tels endroits… Toutefois, une fois le permis délivré, il l’est de manière définitive. Seule l’expérience acquise permet donc aux communes d’être attentives au devenir des projets… Je pense que la crainte d’éventuels « quartiers ghettos » n’est plus guère présente que dans celles qui avaient connu le plan HP. Mais là aussi seule l’expérience acquise permet d’éviter que l’octroi de permis pour des habitations légères soit finalement préjudiciable à l’ordre ou à la sécurité publique… L’habitat léger concernant toutefois une habitation éparse sur un terrain donné, cela semble aisément évitable ; il s’agit essentiellement d’un habitat ponctuel même s’il est imaginable que des familles se regroupent dans le cadre d’un habitat léger groupé mais je n’en connais pas encore d’exemple. D’importantes questions restent donc à régler : elles ont trait à l’intégration urbanistique et aux rapports avec le voisinage Des règles de salubrité adéquates, une fois qu’elles seront définies, devraient également éloigner le spectre du bidonville. »

Le code du logement reconnaît l’habitat léger et lui assigne des objectifs précis. Toutefois, le ministre de l’aménagement du territoire n’a pas encore pris en compte cette question de l’habitat léger et doit donc modifier son code pour permettre la délivrance de permis, dans certains endroits précis. Tout cela sera défini… dans les prochaines années !

« Pour le moment, dit Thibault Céder, avec le code CoDT – pour Code de développement territorial – qui n’aborde pas directement la question de l’habitat léger, eh bien, on bricole. La nouvelle notion doit encore être intégrée dans les législations existantes et cela laisse parfois un grand vide. C’était prévu pour cette année… avant la crise du Covid-19 ! »

De nouveaux atouts entre les mains des communes

« L’habitat léger peut-il se mettre au service du logement social ? Une expérience à été tentée à Walhain, explique Thibault Céder, où il est utilisé pour des logements d’urgence : plutôt que de construire un seul logement en dur, vu les subsides disponibles, il a semblé préférable de s’orienter vers plusieurs logements légers afin de venir en aide à davantage de personnes…Toutefois, si une telle solution s’étend à des logements plus pérennes, comme les logements sociaux, surgira le problème d’appréhension du logement par l’habitant, qui reste très différente de celle d’un logement classique. Il faut être prêt à partager une philosophie nouvelle or la législation sociale ne permet pas, à l’heure actuelle, le choix du logement ; on est juste prioritaire dans une liste et, si un logement se libère, il est proposé. Être subitement appelé à vivre dans une yourte pourrait donc surprendre… Mais apprendre à bien habiter est sans doute un problème très général, du logement social notamment.

Les communes, dans le cadre de l’habitat léger, pourraient être amenées à associer des métiers que nous connaissons bien – menuisiers, ferronniers… -, ce qui offrirait des possibilités de mise à l’emploi…

« Cette question se posera immanquablement avec la crise que nous traversons, confirm Thibault Céder. Les problèmes économiques vont se multiplier et beaucoup plus de personnes, qualifiées ou non, seront en attente d’un travail. Le circuit court, qu’il s’agisse d’agriculture, de construction ou d’autre chose, sera une opportunité intéressante pour relancer l’économie locale. La volonté politique me semble réelle, au niveau de la région en tout cas, d’avancer vers l’économie circulaire. La crise sera un accélérateur pour éviter d’aller chercher ailleurs ce que nous sommes capables de faire nous-mêmes. Mais il y a un an seulement que la sensibilisation et la vulgarisation sont à l’œuvre dans les communes, auprès des agents et des mandataires, à propos de l’habitat léger… Les réponses qu’ils donnent aux questions que les citoyens se posent sont donc en cours d’élaboration, notamment avec l’aide de l’Union des Villes et Communes. Un bourgmestre ou un agent bien informés seront, à n’en pas douter, de bon conseil en la matière… »

Notes :

(1) http://www.uvcw.be/no_index/files/2587-mouvement-communal-948—mai-2020.pdf

(2) A l’origine, Airbnb est le nom d’une plateforme Internet payante de location et de réservation de logements de particuliers, créée à San Francisco, en 2008.

Habitats Sur Pattes (HSP) : Bien habiter la yourte…

L’habitat léger apporte de nombreuses solutions originales, à condition bien sûr de bénéficier des précieux conseils qui permettent d’en éviter les pièges. N’importe quelle yourte, par exemple, ne peut pas devenir un habitat permanent sous le climat belge… Rencontre avec Damien Craps, Guillaume Coupé et Dorian Fastré, chez Habitats Sur Pattes (HSP), afin de mieux comprendre à quelles conditions bien habiter une yourte 

Par Dominique Parizel et Hamadou Kandé

Introduction

Une précision s’impose : le boum actuel de l’habitat léger fait que des pionniers de la yourte, comme HSP, sont aujourd’hui incapables de suivre la demande. Leur agenda est donc rempli pour un an au moins ! N’y aurait-il pas là un criant besoin de former des artisans ?

« Nous sommes trois indépendants, dit Damien Craps, qui avons appris la technique de la yourte sur le tas. Je suis agronome forestier de formation, Dorian menuisier, et Guillaume jardinier et élagueur… Guillaume et moi sommes là depuis le début, Dorian nous a rejoints, il y a deux ans. Nous sommes passés du léger en général – incluant une approche artistique et philosophique – à la yourte spécifiquement car il est vraiment difficile de toucher à tout… »

Un encadrement pour auto-constructeurs

« Au départ, poursuit Damien, nous tenions à ce que nos clients viennent construire leur yourte dans notre atelier afin de nous assurer qu’ils recourraient aux bonnes techniques et utilisaient les matériaux adéquats avec les bons outils. C’était très difficile à gérer parce qu’une yourte prend beaucoup de place et que nous ne pouvions quasiment plus travailler dans notre atelier qui était toujours occupé. Nous pourrons sans doute recommencer à le faire si nous parvenons à développer notre pôle de formation, en acceptant, par exemple, deux projets à la fois et en les accompagnant, chez nous, de A jusque Z… Pour l’instant, nous suivons parfois jusqu’à cinq projets à la fois, en proposant à nos clients de réaliser eux-mêmes pratiquement tous les éléments de leur yourte, hormis la toile extérieure, les encadrements et la couronne qui demandent trop de compétences techniques. Certaines choses nécessitent, bien sûr, une mise en route dans cette formule d’auto-construction. Nous nous rendons, par conséquent, chez le client pendant une journée pour lui montrer comment réaliser, par exemple, un quartier de plancher. Des plans et des modes opératoires sont également disponibles mais la suite des opérations dépend des compétences de chacun – certains sont déjà chevronnés et d’autres moins. Nous restons, bien entendu, disponibles par téléphone, et il arrive aussi que nous devions intervenir, en cours de route, pour modifier certaines erreurs… Nous nous retrouvons enfin, le jour du montage, pour tout assembler ensemble, chacun arrivant avec ses éléments… Nous fournissons tous les matériaux – bois, toiles, isolants, quincaillerie… – et il est possible de faire de grosses économies en faisant appel à des revendeurs de châssis d’occasion. Nous allons cependant proposer nos propres châssis standard car il y a aussi des délais raisonnables à respecter pour élaborer les plans, car il faut être parfaitement sûr qu’ils ne prennent pas l’eau, etc. Pour l’heure, nous travaillons toujours chaque projet individuellement. Rien n’est encore vraiment systématisé mais nous nous rendons bien compte qu’il serait beaucoup plus simple de proposer des yourtes-types, notamment pour être en mesure de baisser nos prix et de rendre ce type d’habitat beaucoup plus accessible. Il est vraiment inutile de refaire, à chaque fois, toute une série de travaux… Nos amis de BeYourte ont déjà adopté cette optique, depuis quelques années, et je pense qu’ils en sont assez satisfaits. Nous ne voulons pas nous éloigner de l’idée d’un accompagnement individualisé mais nous ressentons aussi le besoin d’optimiser certains aspects du travail… »

Des "yourtes à la Belge"…

« En Belgique, précise Damien, une première vague nous a amené les petites yourtes mongoles – cinq ou six mètres de diamètre – qui se sont dégradées au bout de deux ou trois ans… Elles posaient aussi un gros problème de luminosité, n’ayant qu’une seule porte avec un volet qui venait encore l’obstruer et, une fois ce volet fermé, il y faisait noir comme dans un four. Je n’apprendrai à personne, qu’en Belgique, il est souvent indispensable de préserver le peu de lumière qui est présente. Notre moral en dépend… Les Mongols, qui vivent dans la plaine, ouvrent tout le toit, dès le matin, ce qui ne serait que rarement envisageable, ni même utile, chez nous… Nous avons donc opté pour un modèle de yourte comprenant un minimum de trois ouvertures, pour des raisons de lumière mais aussi de circulation d’air car le principal problème d’une yourte est la surchauffe, en été, quand il n’y a pas de vent. Une yourte n’a aucune inertie et se remet, dès que la source de chaleur s’arrête, rapidement à la température et au taux d’humidité de l’air extérieur. La yourte traditionnelle mongole à une seule ouverture pose donc également un problème de circulation d’air… Nous proposons exclusivement des yourtes d’habitat et, pour y vivre confortablement, il ne faut tergiverser ni sur l’isolant ni sur la couverture extérieure. Nos yourtes sont donc de véritables « yourtes à la Belge » et ceux qui achètent, par exemple, la leur dans le sud de la France – même si elles y sont quelques milliers d’euros moins chères – pour la remonter ensuite en Belgique, ne sont pas à l’abri de surprises désagréables. Autant savoir… »

« Dans nos yourtes, poursuit Dorian, pas de peaux bien sûr mais des toiles acryliques pour ce qui est des couches extérieures – murs et toit – et un coton esthétique pour l’intérieur, ainsi qu’un freine-vapeur du même type que celui qu’on place dans n’importe quelle maison ordinaire. Entre les deux, une belle épaisseur d’isolation en laine de chanvre : dix centimètres pour les murs et le double pour le toit. »

« La structure bois, enchaîne Guillaume, peut être réalisée relativement facilement en auto-construction ; elle représente environ un tiers du budget. Mais le poste le plus important, c’est la couverture et le plancher, lequel demande également une importante isolation. Il s’agit de caissons, d(une structure en bois prise en sandwich entre un OSB, qui vient par en-dessous, et un plancher ordinaire. Ces caissons sont remplis avec un isolant en vrac – typiquement, de la ouate de cellulose – mais beaucoup d’autres solutions sont possibles… »

Matériaux locaux pour savoir-faire local

« L’échec de la filière chanvre wallonne est évidemment très regrettable pour nous, dit Damien. Nous travaillons donc avec un fournisseur français qui est quasiment en situation de monopole… Pareil pour les toiles acryliques, des toiles nautiques traitées pour les mousses et résistantes à la salinité et aux UV, pour lesquelles il n’y a guère que deux fabricants. Un tel choix est toutefois stratégique, de notre part, car ces toiles tiennent une dizaine d’années sous le climat particulièrement humide de la Belgique, alors que les autres toiles fréquemment utilisées – cotons, poly-cotons, voire même nubuck – n’y résistent que deux ou trois ans… Nous optons donc volontairement pour un matériau cher mais qui peut éviter bien des déboires : si le confort de vie dans la yourte n’est pas optimal, répétons-le, ses occupants, c’est compréhensible, l’abandonneront assez vite… Réaliser la couverture est un véritable travail de couture qui demande un réel savoir-faire afin que d’aussi grandes surfaces soient étanches et résistantes. Nous travaillons avec une machine des années trente qui était utilisée dans une sellerie, en Autriche ! Elle marche très bien mais ne pardonne rien et nous allons, sans doute, devoir passer bientôt à quelque chose de plus automatique… Nos bois, enfin, nous sont fournis par un scieur qui n’utilise que du bois local, en fonctionnant surtout avec de petites parcelles privées qui ne sont pas certifiées. Pour un circuit aussi court, se faire certifier n’aurait aucun sens… »

« La demande étant croissante, il va y avoir du travail pour des menuisiers, se réjouit Dorian, même si la spécificité de la yourte pourrait être mieux abordée dans les écoles techniques. Nous sommes les seuls à faire du rond, là où tout le monde ne pense qu’à angle droit. Mais, ceci étant dit, une yourte se fabrique à l’aide d’outils de menuiserie classiques, même s’il faut sans doute adapter les gabarits pour faire des formes rondes… C’est d’ailleurs comme cela que je suis arrivé chez HSP : je suis un ancien client qui a réalisé sa propre yourte en utilisant ses compétences de menuisier. J’ai tout fait moi-même, sauf la toile extérieure qui a été réalisée par Guillaume… »

Habitat léger, habitat mobile ?

« Une échelle de mobilité semble croiser une échelle de prix dans l’habitat léger, constate Damien : moins on est mobile, plus le prix au mètre carré est modique, avec des techniques intéressantes, comme le terre-paille, par exemple, qui est impossible à déplacer. A l’opposé, la roulotte est très mobile mais son prix au mètre carré est énorme. Des roulottes équipées et autonomes peuvent monter jusque quatre-vingt mille euros ! La yourte est un entre-deux : ni complètement mobile, ni complètement chère… Entre cinq et sept cents euros du mètre carré, en fonction des matériaux choisis. Une grosse yourte de soixante-trois mètres carrés tournera donc aux alentours de quarante mille euros… Complètement démontable ! Même si se transporter est une chose fatigante ; quelqu’un m’a dit, un jour, qu’il fallait pouvoir se poser pendant un an et demi, au minimum… Le client doit donc interroger prioritairement ce désir de mobilité. Installer une yourte le temps de la rénovation d’une maison peut, par exemple, être un choix intéressant, si on envisage de la revendre ensuite, ce qui est un de ses gros avantages. Une yourte, cela se revend très bien… D’autres misent plutôt sur la yourte comme choix de vie à long terme, la plupart des gens confessant qu’ils n’ont aucune envie de la déplacer. Malgré cela, plupart des habitants de yourtes conservent encore et toujours l’idée qu’on les forcera un jour à se partir, que leur situation est donc forcément temporaire… »

« Pouvoir démonter et remonter reste une demande importante de notre clientèle, rétorque Guillaume, mais si nous devons aider au remontage d’une yourte, nous voulons aussi la démonter car les gens vont souvent trop vite en besogne, exactement comme un enfant qui mélange les pièces de son lego… Comptez cinq heures pour un démontage, deux jours pour le premier montage d’une grosse yourte – huit ou neuf mètres de diamètre -, les suivants pouvant aller plus vite. Nous privilégions les formules participatives et nous ne savons donc jamais exactement comme cela va se passer : on peut tomber sur quelques vrais pros aussi bien que sur une joyeuse bande de filles et de garçons qui n’ont jamais vu un tournevis de leur vie… »

« Cette dimension participative fait partie intégrante de l’idée de yourte, dit Damien. Faire une yourte tout seul, sans famille et sans amis, est un projet voué à l’échec. On ne peut ni la monter, ni la déplacer tout seul. Cela n’a pas de sens, a fortiori, s’il n’y a que de l’argent à défaut de bras… Une attention particulière doit aussi être développée à son égard : il faut pouvoir retendre une corde, de temps en temps, ou refaire un joint de silicone, il faut être un minimum acteur, être capable de l’écouter et de la comprendre… Faire soi-même, même peu, transforme radicalement le regard de l’habitant sur son habitat, lui amenant une sorte de fierté qui fait souvent plaisir à voir, une forme d’appropriation qui peut aller jusqu’au viscéral… C’est pourquoi nos clients, jusqu’ici, sont aussi notre meilleure publicité ! Nous ne voulons donc pas, quant à nous, faire de la maintenance à la place de ceux qui habitent… Nous ne travaillons pas non plus pour les « marchands de sommeil » qui ne pensent qu’à louer bien cher un gîte pas cher. C’est notre hantise et nous avons appris à les repérer de loin. La vague de l’habitat léger ne doit pas conduire à une implantation, voire une importation massive et à bas prix de logements de basse qualité pour pallier la crise du logement. Nous, nous faisons des yourtes pour des gens qui deviennent des amis. Pas pour le nouveau business du léger… »

Des yourtes bien conçues pour limiter les risques…

« Des assureurs assurent nos clients, affirme Damien, même si on ne sait pas encore exactement comment ils les indemniseront s’ils sont, un jour, appelés le faire. Mais quels sont les risques ? Disons, d’abord, qu’il est très facile d’entrer par effraction dans une yourte ; il faut donc bien choisir le lieu où on l’implante. Autre problème trop souvent négligé : le poids de la neige sur la structure. Certaines d’entre elles, trop légères, peuvent littéralement imploser et s’écraser. Il faut également éviter de s’installer trop près des arbres car un arbre ou une grosse branche qui tombent peuvent faire de gros dégâts… » »Le risque d’incendie, enfin, est réel, poursuit Dorian. Mais si les choses sont bien faites, le risque sera limité. Seul celui qui connaît bien son poêle doit aussi faire le feu dans sa yourte, car le risque est moins lié à la yourte elle-même qu’à l’utilisation qui est faite du poêle… »

« A l’image de la yourte, le système de chauffage doit également être facile à déplacer, poursuit Damien. Si on choisit de s’installer à demeure, les possibilités de chauffage seront évidemment beaucoup plus nombreuses. Pour l’environnement, l’idéal est d’opter pour un poêle de masse – genre poêlito ou rocket stove – car un simple poêle, de manière générale, doit tourner avec tout l’oxygène possible. Or si on le laisse ouvert, il fera vite trop chaud dans une yourte bien isolée. Mais, à l’inverse, limiter l’apport en oxygène créée des combustions incomplètes, génère des particules lourdes… et pollue énormément ! Nous préconisons aussi une sortie centrale car placer le foyer au centre de la yourte augmente le confort – avec une température plus homogène – et le rendement – en récupérant une bonne partie de la chaleur dans la longueur de la buse. A l’inverse d’une sortie latérale, la sortie centrale – à plus forte raison si elle monte à un mètre cinquante au-dessus de la faitière, comme c’est la norme dans la construction – permet aussi de limiter les dégâts à la toile si de petites particules incandescentes viennent à être rabattues par le vent. Une sortie latérale requiert, quant à elle, un système d’ancrage compliqué et inesthétique qui est ainsi évité…

Nous sommes souvent sollicités pour placer des yourtes dans des écoles et dans des lieux publics mais, la législation étant inexistante dans ce cas, les responsables se rassurent en nous imposant de la laine de roche, par exemple, qui est un matériau particulièrement désagréable à mettre en œuvre et dont les particules peuvent polluer l’air. La yourte est une structure organique, dynamique. Or les normes anti-feu ne sont pensées aujourd’hui qu’avec des matières minérales. Quelles sont donc les évolutions possibles ? Des yourtes complètement « minérales », avec des armatures métalliques, qui rassureront ceux qui accueillent du public. Ou, au contraire, l’acceptation de leur nature organique qui devra induire un changement de comportement de la part de ses utilisateurs ? L’avenir nous l’apprendra… »

Infos : habitatsurpattes@gmail.comwww.habitatsurpattes.be