Saga glyphosate : pas de majorité qualifiée. La Commission Européenne a les cartes en main
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16 novembre 2023
Communiqué de presse
MAJ 29/11: le 26 novembre, après échec du vote au Conseil (pas de majorité qualifiée), la Commission avait annoncé qu’elle renouvellerait l’autorisation du glyphosate (avant le 15 décembre – date d’expiration de l’autorisation), c’est chose faite. Le 27 novembre, la Commission Européenne a publié la décision de renouvellement.
Aucune majorité qualifiée en faveur de la ré-approbation du glyphosate ne s’est dégagée
Un deuxième tour de vote des Etats membres sur la proposition de la Commission de ré-approuver le glyphosate pour 10 ans était planifié ce jeudi 16 novembre. Faute de majorité qualifiée le 13 octobre dernier, le sujet continuait de diviser fortement les Etats et l’incertitude pesait sur l’avenir du glyphosate. Ce jeudi matin, le vote a à nouveau abouti au même résultat : pas de majorité qualifiée. La Commission Européenne a maintenant les cartes en main et doit prendre une décision d’ici le 15 décembre.
Le vote sur la ré-approbation de la substance active du glyphosate par les Etats membres réunis au sein du SCOPAFF doit recueillir une majorité qualifiée des voix, c’est-à-dire simultanément recueillir 55% des Etats membres, soit 15 sur 27, lesquels doivent compter pour au moins 65% de la population totale de l’UE.
Ce 16 novembre, en comité d’Appel, aucun majorité qualifiée ne s’est dégagée. La Commission a annoncé dans un communiqué qu’elle allait « maintenant procéder au renouvellement de l’approbation du glyphosate pour une période de 10 ans, sous réserve de certaines nouvelles conditions et restrictions« .
« Alors qu’on peut se réjouir qu’aucune majorité qualifiée ne s’est dégagée, nous déplorons que la Commission Européenne annonce qu’elle décidera d’initiative lorsque l’on sait que la population et la communauté scientifique indépendante sont contre le renouvellement du glyphosate. », pour Virginie Pissoort chargée de campagne et de plaidoyer pour l’association Nature & Progrès.
Pour rappel, le 13 octobre dernier, la Commission avait échoué et sa proposition n’avait pas recueilli la majorité attendue. La Hollande, Malte, la Bulgarie, mais aussi des pays densément peuplés comme l’Allemagne et la France, pesant fortement dans la balance, s’étaient abstenus. La Belgique aussi, faute de consensus au sein de sa majorité parlementaire, s’était abstenue. L’Autriche, le Luxembourg et la Croatie avaient fermement voté « Contre ».
Depuis un mois, la mobilisation de la société civile et de la communauté scientifique s’était encore intensifiée, se basant entre autres, sur une nouvelle étude publiée par le Global Glyphosate Institute qui s’était intensifiée. L’institut Ramizzini a en effet révélé le 25 octobre dernier les premiers éléments d’une importante étude concluant au lien entre l’exposition au glyphosate à très forte dose et le développement de leucémie, dès le plus jeune âge chez les rats. Une nouvelles étude alarmante et qui s’ajoute aux nombreuses études de la communauté scientifique dénonçant le caractère probablement cancérogène du glyphosate pour l’humain, les risques de développement de maladies neurodégénératives comme la maladie de Parkinson, les effets épigénétiques, les dommages au microbiote, mais aussi les impacts pour la biodiversité, la pollution du sol et des eaux, les espèces non ciblées etc [1].
Il était crucial de pouvoir faire basculer des votes d’abstention vers le « Contre », et des votes « Pour » vers l’abstention ou le « Contre », pour barrer la route au glyphosate. La Commission européenne étant habilitée à décider « seule » de la prolongation de l’approbation à défaut de majorité des Etats Membres.
« Notre Belgique ne pèse pas bien lourd dans la balance européenne, il n’empêche obtenir une position engagée « contre » cette substance toxique aurait été un signal fort. Malheureusement, au sein de la majorité gouvernementale fédérale, le Ministre de l’agriculture a refusé d’écouter la science et les citoyens. Il a maintenu le fait que rien ne s’opposait au renouvellement », regrette Virginie Pissoort, responsable de plaidoyer pour Nature & Progrès
L’EFSA avait pourtant souligné qu’il restait des lacunes et des points non résolus au terme des études qu’elle avait analysées, principalement l’évaluation d’une des impuretés présente dans le glyphosate, l’évaluation des risques alimentaires pour les consommateurs et l’évaluation des risques pour les plantes aquatiques. [2]
La Commission Européenne devra prendre une décision pour le 15 décembre au plus tard (date de fin de l’autorisation). Il est temps d’amorcer la transition et d’interdire ce dangereux herbicide. Les alternatives existent. Il en va de notre santé et celle de la terre.
[1] https://stopglyphosate.eu/human-health/ ; https://stopglyphosate.eu/impact-on-the-environment/
; https://stopglyphosate.eu/why-ban-glyphosate/carcinogenicity-and-genotoxicity/
; https://stopglyphosate.eu/why-ban-glyphosate/neurotoxicity/
; https://stopglyphosate.eu/impact-on-the-environment/
[2] Peer review of the pesticide risk assessment of the active substance glyphosate – – 2023 – EFSA Journal – Wiley Online Library