Pesticides, une page se tourne !

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19 octobre 2023

Le Conseil d’Etat fait primer la santé et l’environnement

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Nous sommes heureux de vous communiquer qu’après quatre ans de procédures légales, le Conseil d’État a donné raison à Nature & Progrès et à PAN Europe dans une affaire concernant l’utilisation de semences enrobées de néonicotinoïdes en Belgique. Les néonicotinoïdes sont des pesticides qui s’attaquent au système nerveux des abeilles. Ils sont mis en cause dans le déclin massif des colonies d’abeilles et ont été interdits en Europe en 2018. Le Conseil d’Etat a choisi de faire primer la santé et l’environnement en stoppant les octrois de dérogations par l’administration belge !

Pour rappel, en 2018, l’Union européenne a interdit trois types d’insecticides néonicotinoïdes pour protéger le vivant. Cependant, la Belgique a accordé depuis 2018 des dérogations « d’urgence » pour continuer à utiliser ces pesticides, en particulier dans la culture de betteraves. Nous avons contesté la validité de ces décisions devant le Conseil d’État en 2018, 2019 et 2020.

Ce 18 octobre 2023, le Conseil d’État a tranché et a déclaré que « sont annulées les 6 décisions (ndlr : de l’administration belge) autorisant l’utilisation d’insecticides à base de substances actives « néo-nicotinoïdes » interdites dans l’UE pour le traitement, la mise sur le marché, et le semis de semences de betteraves sucrières, de laitue, d’endives, … »[1] Cela signifie que l’utilisation de ces substances est désormais bien interdite en Belgique, plus aucune exception ne peut permettre de réintroduire ces substances interdites en droit européen.

Pour Julie Van Damme, Secrétaire générale de Nature & Progrès

« Le jeu des dérogations est malhonnête et dangereux. Il maintient une partie des agriculteurs dans l’illusion qu’il n’y a qu’une seule manière de faire. Il verrouille la possibilité de se tourner vers les alternatives à large échelle. Depuis des décennies, Nature & Progrès met en avant des pratiques agricoles viables sans recours à ces substances. »

Il faut remonter en 2018, lorsque la Commission européenne avait interdit 3 insecticides néonicotinoïdes afin de protéger les abeilles.[2] Le ministre de l’Agriculture de l’époque avait alors voté contre l’interdiction, craignant une levée de bouclier du secteur betteravier plutôt que de protéger nos pollinisateurs – et donc notre alimentation – et l’entomofaune. Aussitôt l’interdiction décidée au niveau européen, il avait annoncé qu’une dérogation serait donnée pour maintenir leur utilisation en betteraves. Les dérogations se sont alors succédées depuis 2018 (sauf en 2023).

En 2019, Nature & Progrès Belgique, le Pesticide Action Network (PAN) Europe et un apiculteur liégeois ont introduit un recours contre les dérogations accordées par le SPF Santé publique. Le 19 janvier 2023, la Cour de Justice de l’Union européenne avait déjà confirmé que les dérogations nationales pour l’utilisation de pesticides interdits au niveau européen étaient illégales.[3]

Une partie tierce, la confédération belge des betteraviers, ainsi que la société SES Vanderhave, ont également été impliquées dans la procédure. La SES Vanderhave a tenté de préserver ses intérêts commerciaux en soutenant (à titre subsidiaire) que les dérogations ne devraient pas s’appliquer aux pratiques d’exportation des semences contenant ces pesticides, malgré leur haute toxicité et les risques pour les pays importateurs.

Le Conseil d’État a heureusement rejeté ces arguments et a confirmé que la santé et l’environnement sont prioritaires. Ce jugement a des répercussions à l’échelle de l’Union européenne en recadrant les pratiques de dérogations pour les pesticides.

Pour Antoine Bailleux, avocat des parties requérantes :

«  La Cour de justice avait déjà clairement affirmé qu’on ne peut pas se servir de prétendues circonstances exceptionnelles pour autoriser la mise sur le marché de semences enrobées de substances actives interdites au niveau européen. Le Conseil d’Etat enfonce aujourd’hui le clou en annulant des autorisations de ce type octroyées précédemment par la Belgique. Fait remarquable, cette annulation s’étend aussi aux exportations vers les pays tiers. »

Cette décision marque un tournant en marquant un « stop » aux services belges d’homologation des pesticides qui, à tour de dérogations, ont maintenu l’illusion qu’il y avait encore un avenir possible avec ces substances tueuses d’abeille.

Aujourd’hui, nous voyons la confirmation que l’avenir n’est pas dans les pesticides et nous encourageons les administrateurs et les utilisateurs à tourner le dos à ces poisons en les accompagnant dans la mise en place des alternatives.

Tout comme sur le plan juridique où Nature & Progrès et PAN ont tenu bons, notre association n’a jamais lâché la nécessité de soutenir la transition vers une agriculture biologique. C’est pourquoi, au-delà de le plaider, nous reconnaissons et mettons en valeur, celles et ceux qui depuis des décennies ont appris à faire autrement – sans chimie de synthèse mais – avec la nature. Nous documentons leurs pratiques pour une conversion progressive, pas après pas.

Les alternatives existent, nos agriculteurs bio le prouvent chaque jour !

 

 

[1] https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2023/10/257640.pdf , https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2023/10/257641.pdf , https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2023/10/257642.pdf , https://www.natpro.be/wp-content/uploads/2023/10/257643.pdf

[2] Les néonicotinoïdes sont les substances qui ont la même action que la nicotine sur le système nerveux. Tout comme la nicotine, les néonicotinoïdes agissent dans le même sens que l’acétylcholine (ils sont donc ce qu’on appelle des agonistes) ; ils en bloquent les récepteurs, ce qui perturbe le fonctionnement du système nerveux. Systémiques, les néonicotinoïdes envahissent toutes les parties des plantes traitées, y compris les fleurs, les fruits et les graines. Mais ils ne portent pas atteinte qu’aux abeilles : tous les pollinisateurs sont concernés mais aussi pour les milieux aquatiques ainsi que pour certains vertébrés terrestres, notamment les oiseaux et petits mammifères granivores.

[3] https://www.pan-europe.info/press-releases/2023/01/eu-court-justice-no-more-derogations-use-bee-toxic-neonicotinoids

   

La saga des néonicotinoïdes touche à sa fin

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05 octobre 2023

Communiqué de presse

Dernière audience au Conseil d’Etat: la saga des néonicotinoïdes touche à sa fin

Après l’arrêt de la Cour de Justice de l’UE de janvier dernier, une ultime audience a lieu ce jeudi 5 octobre au Conseil d’Etat sur l’affaire des dérogations fournies par la Belgique pour l’utilisation de néonicotinoïdes en betteraves, pesticide hautement toxique pour les abeilles pourtant interdit en 2018 au niveau européen.

Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer chez Nature et Progrès indique: « Cette dernière audience annonce l’issue d’une procédure de 5 ans, pour que la Belgique respecte enfin la réglementation européenne en vigueur. En janvier dernier, la Cour de Justice de l’Union européenne a confirmé notre interprétation, à savoir qu’un pesticide interdit en Europe ne peut recevoir de dérogation, contrairement aux pratiques courantes de l’administration belge ».

Il faut remonter en 2018, lorsque la Commission européenne avait proposé d’interdire 3 insecticides néonicotinoïdes afin de protéger les abeilles. Le Ministre de l’agriculture de l’époque avait alors voté contre l’interdiction, craignant les levées de bouclier du  secteur betteravier plutôt que de protéger nos pollinisateurs et l’entomofaune. Aussitôt l’interdiction décidée au niveau européen, il avait  annoncé qu’une dérogation serait donnée pour maintenir leur utilisation en betteraves. Et, c’est ce qui a été fait, les dérogations se sont même succédées en 2020 et 2021.

Nature et Progrès Belgique, le Pesticide Action Network (PAN) Europe et un apiculteur liégeois ont alors introduit un recours au Conseil d’Etat dès 2019 pour faire annuler cette pratique habituelle de la Belgique, à savoir de donner des dérogations pour un pesticide interdit en Europe. Un recours similaire a été introduit pour les dérogations ultérieures. La confédération belge des betteraviers ainsi que la société SES Vanderhave sont intervenues comme parties tierces dans cette procédure. Cette dernière pratique entre autres l’enrobage de semences avec des néonicotinoïdes qu’elle exporte vers des pays tiers, activité pour laquelle le SPF Santé publique lui a fourni régulièrement des dérogations.

Suite aux arguments soulevés par les associations, le Conseil d’Etat avait envoyé 5 questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’UE afin de préciser les limites du règlement européen sur les pesticides[1]. En janvier 2023, la Cour a conclu[2]  que fournir des dérogations nationales pour l’utilisation d’un pesticide interdit en droit européen pour protéger la santé humaine ou l’environnement était contraire à la loi.

Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe ajoute: « L’impact de notre action a mené à une petite révolution dans tous les pays de l’Union européenne: les insectes, la biodiversité et la santé humaine seront mieux protégés. Il revient maintenant au Conseil d’Etat d’appliquer l’arrêt de la Cour aux 3 recours intentés et d’annuler les dérogations abusives. Quant à l’administration, il lui appartiendra d’appliquer correctement le règlement européen sur les pesticides.

Virginie Pissoort de conclure: ‘Notre action devrait aussi permettre une interdiction de l’exportation de semences enrobées par des néonicotinoïdes vers des pays tiers : ces pratiques s’avérant d’un cynisme total: exporter hors de l’UE ce qui est interdit chez nous ! ».

Ce 5 octobre, après une dernière audience, portant entre autres sur l’exportation vers les pays tiers, l’affaire a été mise en délibération.

[1] En particulier l’article 53 du Règlement (UE) 1107/2009

[2] https://www.pan-europe.info/press-releases/2023/01/eu-court-justice-no-more-derogations-use-bee-toxic-neonicotinoids

   

Dérogations illégales de pesticides: Nature & Progrès Belgique et PAN Europe assignent le Ministre Clarinval en justice pour non-respect du règlement sur les pesticides.

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Le 19 janvier dernier, la Cour de Justice de l’UE a clarifié que les Etats membres ne pouvaient pas fournir de dérogation pour l’utilisation de pesticides expressément interdits en Europe. Le même jour, le SPF Santé publique a communiqué sur l’octroi d’une nouvelle dérogation pour l‘Indoxacarbe, un insecticide hautement toxique interdit en EU depuis 2022. Deux courriers envoyés par les 2 associations et demandant au Ministre Clarinval d’annuler ces dérogations sont restés sans réponse. Les 2 organisations assignent le ministre en justice pour non-respect de la loi.

Julie Van Damme, secrétaire générale de Nature & Progrès Belgique :« La santé des citoyens et la qualité de leur environnement doivent être une priorité pour nos politiques, surtout quand on sait que de nombreuses alternatives existent à l’usage de pesticides hautement toxiques. Notre action vise à faire respecter l’arrêt de la Cour.« .

Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe indique: « Il a été clairement établi que la Belgique exerce un lobbying au niveau européen pour restreindre la portée de l’arrêt de la Cour aux seuls néonicotinoïdes. Or, la Commission européenne a récemment confirmé que pour elle, cet arrêt porte sur l’ensemble des pesticides interdits en UE. Le Ministre Clarinval place une nouvelle fois notre pays dans le camp des pays pro-pesticides, qui favorisent les intérêts de l’agrochimie aux dépens de la santé des citoyens et de l’environnement.« 

Notre premier courrier adressé à Mr Clarinval

L’article sur la mise en demeure

En 2018, la Commission européenne a interdit les néonicotinoïdes afin de protéger les pollinisateurs. En 2019, suite à l’octroi d’une dérogation pour l’usage de néonicotinoïdes en betteraves, Nature & Progrès Belgique et PAN Europe ont intenté un recours devant le Conseil d’Etat. Ce dernier a accepté d’envoyer des questions préjudicielles à la Cour de Justice de l’UE afin de clarifier les possibilités d’utilisation des dérogations. Cette dernière a rendu un arrêt le 19 janvier 2023, dans lequel elle indique que fournir une dérogation pour un pesticide expressément interdit pour protéger la santé humaine et l’environnement n’est pas légal.

L’Indoxacarbe est un insecticide interdit d’utilisation en UE depuis mars 2022. Il est particulièrement toxique pour la faune sauvage et les pollinisateurs et présente un risque pour les eaux souterraines. Les études disponibles indiquent une toxicité excessive pour les consommateurs et les travailleurs.

Nature & Progrès Belgique et PAN Europe ont envoyé une première lettre au Ministre Clarinval le 30 janvier 2023 portant à son attention le fait que l’arrêt de la Cour concerne également la dérogation sur l’Indoxacarbe et lui enjoignant d’annuler cette dérogation qui prendra effet en mai 2023.

PAN Europe a eu accès à un courrier envoyé par la Belgique à la Commission européenne et aux autres Etats membres dans lequel le SPF promouvait une interprétation très restrictive de l’arrêt, à savoir, permettant de continuer à fournir des dérogations pour des pesticides hautement toxiques, autres que les néonicotinoïdes. Le 6 mars dernier, la Commission européenne a confirmé devant le Parlement européen que l’arrêt concernait l’ensemble des pesticides interdits en UE, ainsi que dans un courrier envoyé à PAN Europe.

En l’absence de réponse de la part du Ministre Clarinval, Nature et Progrès Belgique et PAN Europe ont envoyé une lettre de mise en demeure au Ministre le 24 février 2023 lui rappelant ses obligations et annonçant une action en justice.

Le 17 mars, les 2 associations ont assigné le Ministre en justice afin de lui imposer de respecter l’arrêt, afin de protéger la santé des citoyens et l’environnement.

Informations générales

Pesticide Action Network (PAN) Europe œuvre au niveau européen pour faire évoluer les législations et leur mise en œuvre trop favorables aux pesticides, et possède une réelle expertise dans le domaine des règlementations. Nature & Progrès Belgique, par son réseau d’agriculteurs Bio, a développé une expertise importante en matière de recensement et de démonstration des alternatives aux pesticides.

PDF FR : Interprétation et application de l’arrêt par la Belgique

PDF EN : BE position on court ruling

Nouvelle dérogation d’un pesticide interdit : Nature & Progrès et PAN Europe mettent en demeure l’état Belge.

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En dépit de l’arrêt historique rendu par la Cour de Justice de l’Union européenne (UE) en janvier, la Belgique refuse de retirer l’autorisation d’un pesticide interdit dans l’UE. Ce lundi 27 février, Nature & Progrès et PAN Europe ont donc mis en demeure le ministre fédéral de l’agriculture Mr Clarinval. Si la Belgique ne se conforme pas à l’arrêt et à la réglementation sous 15 jours, les organisations saisiront les tribunaux compétents pour qu’elles condamnent cette décision ou toute nouvelle décision contraire à cet arrêt de la Cour.

Le 19 janvier 2023, la Cour de Justice de l’Union européenne a en effet confirmé que le recours à l’article 53 du Règlement européen sur les pesticides pour autoriser des produits contenant des substances actives expressément interdites dans l’Union européenne était illégal, quelle que soit la méthode d’application du produit. Le même jour, la Belgique annonçait l’autorisation temporaire d’un insecticide à base d’indoxacarbe, une substance active dont le renouvellement a été refusé par la Commission européenne en novembre 2021. L’évaluation européenne de cette substance avait notamment relevé un risque élevé pour la santé des consommateurs et des travailleurs ainsi que pour l’environnement.

«Fin janvier, nous avons adressé un courrier au ministre lui demandant d’annuler, sans délai, la dérogation fournie pour l’usage de l’indoxacarbe. Ce courrier étant resté sans réponse, la mise en demeure s’impose pour faire respecter en Belgique l’arrêt de la Cour de l’Union européenne », précise Isabelle Klopstein, chargée de campagne de sensibilisation à Nature & Progrès.

Notre premier courrier adressé à Mr Clarinval

Le 15 février, le journal Politico a révélé que la Belgique faisait pression auprès de la Commission européenne pour que celle-ci ne reconnaisse pas toute la portée de l’arrêt de la Cour et laisse les Etats-membres continuer à autoriser des pesticides interdits au titre de l’article 53. Selon ces Etats-membres, l’arrêt ne s’appliquerait qu’à l’autorisation de pesticides interdits pour traiter des semences (et non pour les autres utilisations).

En outre, le 15 février, le Ministre Clarinval a trompé le Parlement fédéral en affirmant que la dérogation pour l’utilisation de l’indoxacarbe était légale, allant ainsi à l’encontre de l’arrêt de la Cour. Il a également cité sélectivement l’arrêt pour justifier la position de la Belgique en faveur de l’utilisation de pesticides interdits. Nous citons : « Le paragraphe 48 de l’arrêt en objet mentionne les termes devrait primer. Le conditionnel indique que, si la protection de la santé et de l’environnement est effectivement primordiale, elle n’est pas la seule à devoir être prise en considération. C’est sur un subtil équilibre entre la protection de la santé et de l’environnement et la protection des productions végétales que les dérogations d’autorisation sont bâties. » Fin de citation. Pourtant, l’arrêt est très clair : aucun compromis entre protection de la santé et de l’environnement d’une part et les rendements agricoles de l’autre ne peut avoir lieu. Si un pesticide est interdit pour protéger la santé et l’environnement, il ne peut y avoir de dérogation.

La mise en demeure de la Belgique envoyée au Ministre Clarinval demande donc l’annulation de la décision de la Belgique autorisant l’utilisation de l’indoxacarbe dans les 15 jours. Cette décision sera un test crucial pour la capacité de l’Union Européenne à faire respecter les règles de sécurité pour la santé humaine et animale ainsi que pour l’environnement en matière de pesticides.

La Belgique a octroyé 13 dérogations entre 2019 et 2022 pour l’utilisation de substances interdites dans l’UE, faisant de ce pays le 8ème plus mauvais élève des 27.

Informations générales

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PDF FR : Interprétation et application de l’arrêt par la Belgique

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Dérogations pour les pesticides : la Cour de justice de l’UE met fin aux dérogations pour l’utilisation des néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles

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Aujourd’hui, la Cour de justice de l’UE (CJUE) a publié un jugement préliminaire sur des questions posées par le Conseil d’Etat belge, suite à une plainte de Nature & Progrès Belgique, PAN Europe et un apiculteur belge. La Cour a déclaré que le fait de prévoir des dérogations pour le traitement des semences avec un pesticide interdit et leur utilisation n’est pas conforme au droit européen. Cet arrêt met un terme à près de la moitié des dérogations accordées par les États membres aux pesticides interdits.

Hans Muilerman, en charge des produits chimiques à PAN Europe a déclaré : « PAN Europe se bat contre cette mauvaise administration depuis de nombreuses années. Cette décision historique de la Cour de justice de l’UE met fin à 10 ans d’abus de la part des États membres, avec la bénédiction de la Commission européenne. Grâce à notre action, l’environnement de l’UE deviendra un endroit plus sûr. »

En 2019, Nature & Progrès Belgique, un apiculteur individuel belge et PAN Europe ont déposé une demande d’annulation devant le Conseil d’Etat belge. Cela faisait suite à une dérogation accordée par la Belgique au lobby du sucre pour l’utilisation d’insecticides néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles sur les betteraves sucrières. Les plaignants ont suggéré à la Cour belge de poser des questions préjudicielles à la CJUE afin de clarifier les limites de la loi en matière de dérogations.

Marc Fichers, Secrétaire Général de Nature & Progrès Belgique a déclaré : « Ce succès aura un effet à l’échelle de l’UE, pour protéger les abeilles et les insectes dans toute l’UE, ainsi que la santé des citoyens. Les dérogations avec des semences traitées aux néonicotinoïdes sont désormais définitivement interdites. Ce jugement est un soulagement et montre que l’environnement et la santé comptent plus que les intérêts de certaines entreprises de sucre et de pesticides !« 

La Commission européenne, la France, la Grèce, la Hongrie et la Finlande ont rejoint la procédure devant la Cour de justice de l’UE. La Belgique, ainsi qu’une entreprise belge de pesticides (SES Vanderhave) et le lobby du sucre belge sont également intervenus pour protéger leurs intérêts. 

Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe, a ajouté : « Au cours de la procédure, il a été très choquant de constater que la Commission européenne a continué à protéger les abus du système par les États membres. La Commission a soutenu l’octroi de dérogations pour des pesticides prétendument interdits par l’UE et hautement toxiques pour la santé humaine et l’environnement. Il était évident que la Commission était du côté de l’agrobusiness, plutôt que de la santé des citoyens et de l’environnement ! Les avocats de la Commission européenne ont même affirmé devant les juges européens que les États membres n’accordent une dérogation que lorsqu’il n’existe aucune alternative, ce qui est contraire à la réalité !« 

PAN Europe a récemment publié un rapport sur les dérogations accordées par les États membres aux substances pesticides interdites par l’UE : 236 dérogations de ce type ont été accordées au cours des 4 dernières années. Les néonicotinoïdes représentent près de la moitié de ces dérogations (47,5%). Le rapport souligne que les États membres n’évaluent pas la nécessité de ces dérogations et leur conformité avec le droit européen, favorisant ainsi l’agrobusiness au détriment de la protection de la santé des citoyens et de l’environnement.

Me Antoine Bailleux, notre avocat, a ajouté : « Cet arrêt constitue un énorme pas en avant pour la préservation de la biodiversité en Europe. La Cour de justice a clairement indiqué que les pesticides interdits au niveau de l’UE pour des raisons sanitaires ou environnementales ne peuvent être introduites par des moyens détournés au niveau des États membres, ce qui était devenu une pratique courante. Elle a également confirmé que la protection de la santé et de l’environnement l’emporte sur l’objectif d’amélioration de la production végétale. »

Martin Dermine a conclu : « C’est un grand jour pour les pollinisateurs européens et pour notre environnement. La législation européenne sur les pesticides donne la priorité à la santé des citoyens et à l’environnement, mais son application au niveau européen et national laisse à désirer. Ce verdict est un rappel que les administrations et les politiciens sont soumis au respect de la loi, et non aux intérêts de l’industrie des pesticides, ou des lobbies agricoles industriels. »

Informations générales

Les insecticides néonicotinoïdes ont été autorisés dans l’UE dans les années 90. Après 20 ans de dommages sur les populations d’insectes de l’UE, la Commission européenne et les États membres ont partiellement restreint leur utilisation en 2013, aux cultures qui ne sont pas attractives pour les pollinisateurs. Une série d’États membres de l’UE ont immédiatement émis des dérogations pour continuer à les utiliser malgré l’interdiction. En 2018, suite à l’interdiction de toutes les utilisations extérieures, le nombre de dérogations a même augmenté de manière significative.

 

Communiqué de presse (en français) de la Cour de justice de l’UE, 19/01/2023

« La Cour souligne également l’obligation pour tous les États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une lutte contre les organismes nuisibles à faible apport en pesticides, en donnant la priorité aux méthodes non chimiques chaque fois que cela est possible. Une telle obligation implique que les utilisateurs professionnels de pesticides se tournent vers les pratiques et les produits disponibles présentant le plus faible risque pour la santé humaine et l’environnement pour faire face à un problème parasitaire. »

Fin des dérogations pour les néonicotinoïdes : c’est bien mais Nature & Progrès en veut plus

abeilles néonicotinoïdes

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Le Ministre fédéral de l’Agriculture David Clarinval a enfin posé un geste pour l’environnement : fini les dérogations abusives pour les semis de betteraves à sucre enrobés de néonicotinoïdes, ces pesticides tueurs d’abeilles. Nature & Progrès et PAN Europe (Pesticide Action Network Europe) saluent la démarche mais en veulent plus. Nous attendons du Ministre qu’il mette un terme aux dérogations fournies pour l’exportation de semences traitées aux néonicotinoïdes ainsi que toute dérogation aux restrictions européennes sur les nouveaux néonicotinoïdes. 

Cela fait vingt ans que Nature & Progrès agit pour protéger les abeilles des dégâts occasionnés par l’utilisation des insecticides néonicotinoïdes, malgré l’entêtement du secteur betteravier et des autorités. Au terme de nombreuses actions, trois insecticides tueurs d’abeilles (le thiaméthoxame, l’imidaclopride et la clothianidine) ont finalement été interdits par l’Europe en 2018, suivis en avril dernier par le sulfoxaflor, insecticide au même mode d’action susceptible d’occasionner les mêmes dégâts environnementaux.

La Belgique a honteusement passé outre ces interdictions, les autorisant en plein champs sous le régime des dérogations… Il était temps que le pays s’aligne sur les décisions européennes adoptées dans l’intérêt de l’environnement et des polinisateurs !

En Belgique, l’enrobage des semences de betteraves sucrières par des néonicotinoïdes est chose courante en agriculture conventionnelle pour lutter contre la jaunisse de la betterave transmise par les pucerons. Un problème évitable pour la biodiversité lorsque l’on sait que des alternatives efficaces existent.

Si un pesticide nuit aux insectes polinisateurs, qu’est-ce qui justifie que la Belgique l’autorise ailleurs ?

Si le Ministre de l’Agriculture montre le souhait de ne plus polluer le pays, il serait logique de prendre les mêmes mesures à l’extérieur. Pourtant, deux autorisations d’urgence (Thiamétoxam et Imidaclopride) vient une nouvelle fois d’être octroyée pour le traitement et l’exportation de semences traitées aux néonicotinoïdes vers des pays tiers, dont les pays européens. Comment se satisfaire d’une victoire aussi peu glorieuse ?

En 2022, SOS Faim a lancé la campagne choc « Interdits ici, exportés là-bas : mortels partout ! ». Elle se penche sur la question des exportations de pesticides interdits et le rôle majeur que joue la Belgique dans ce commerce toxique et immoral, causant, dans le monde, un désastre humain et écologique.

Qu’en est-il des autres pesticides interdits plus récemment comme le sulfoxaflor ?

Nature & Progrès et PAN Europe sont également préoccupées par la possible autorisation temporaire de cet insecticide de type néonicotinoïde utilisé en betterave, et tout aussi nocif, sinon plus car appliqué par pulvérisation. La Commission européenne a limité son utilisation aux serres permanentes en avril 2022. Le Ministre pourrait néanmoins décider d’octroyer de nouvelles dérogations au sulfoxaflor en 2023 comme il l’a déjà fait cette année. En soutenant la décision de restriction européenne, le Ministre reconnaissait pourtant qu’un risque pour les abeilles lié à l’utilisation du sulfoxaflor en plein air ne pouvait pas être exclu.

Vers des moyens de lutte alternatifs

Les dérogations, octroyées sous la pression de l’industrie sucrière pour garantir ses rendements, ont donné un faux message aux agriculteurs betteraviers : il n’existerait soi-disant pas d’autres solutions que les néonicotinoïdes pour protéger leurs cultures.

Or, les alternatives aux néonicotinoïdes sont diverses et reposent en grande partie sur la combinaison de plusieurs méthodes préventives, associées à des mesures bien connues en bio, comme celles utilisées par les producteurs de la coopérative belge Organic Sowers (Orso). Pour préparer la culture à affronter ces menaces, les producteurs d’Orso utilisent notamment la technique du faux semis, l’allongement des rotations – de cinq à sept ans – et l’intégration de cultures de printemps et d’automne. Le choix d’une variété plus résistante aux maladies est fortement préconisé – même s’il n’y a pas encore de véritables variétés résistantes, comme on peut les trouver en pommes de terre avec les variétés robustes, par exemple.

Les étapes à venir

En 2019, 2020 et 2021, Nature & Progrès et PAN Europe ont déposé 3 recours devant le Conseil d’Etat contre les dérogations successives de néonicotinoïdes interdits au niveau européen mais autorisés en Belgique. Conformément aux demandes des 2 associations, le Conseil d’Etat a demandé l’avis de la Cour de Justice de l’Union européenne pour mieux clarifier les limites du système de dérogations, et notamment la possibilité d’en fournir tous les ans ou bien de fournir des dérogations pour des pesticides supposés interdits car hautement toxiques. Après l’avis de l’Avocate générale de septembre dernier, un arrêt de la Cour est attendu pour le 19 janvier. Après ces dates, l’affaire reviendra devant le Conseil d’Etat qui devra trancher sur la validité des dérogations de néonicotinoïdes en Belgique.

 

Les grandes dates de l’histoire des néonicotinoïdes

  • 2001 : les premières recherches sur la toxicité des néonicotinoïdes sur les abeilles sortent. La toxicité de l’imidaclopride est reconnue pour la première fois.
  • 2006 : l’indifférence des pouvoirs publics belges amène Nature & Progrès à organiser une grande journée d’étude à Namur. L’association renouvelle sa demande d’application urgente du principe de précaution et de suspension immédiate de l’imidaclopride sur tout le territoire belge.
  • 2007 : A la Direction Générale de la Santé des Consommateurs de la Commission européenne, on se dit prêt à revoir les méthodes d’évaluation, sur un avis “d’expert”. Un groupe de travail « Risques des pesticides pour les abeilles » se réunit. Trois malheureux citoyens apiculteurs se retrouvent en face de sponsors qui ne sont autres que BASF-Agro, Syngenta, BayerCropscience, etc. Les sous-groupes (dont 2 des 3 présidents sont issus de compagnies phytopharmaceutiques) comptent au moins deux participants issus desdites compagnies.
  • 2012 : enfin, un groupe de travail de l’EFSA rédige un avis scientifique constatant que la toxicité des pesticides mis sur le marché n’a pas été correctement évaluée.
  • 2013 : Suite à l’avis de l’EFSA sur les risques associés à l’utilisation de trois néonicotinoïdes (clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame), la Commission européenne interdit le 29 avril 2013 leur usage pour les cultures attractives pour les abeilles. Collaborant désormais avec PAN Europe, Nature & Progrès se réjouit de la décision européenne. Leur utilisation par les particuliers n’est désormais plus non plus autorisée.
  • 2015-2016 : la France et l’Allemagne interdisent les néonicotinoïdes. La Belgique, elle, discute toujours, forte d’un secteur betteravier pour qui le devenir des abeilles importe peu.
  • 2018 : l’EFSA publie enfin une évaluation montrant que la plupart des utilisations de néonicotinoïdes présentent un risque pour les abeilles sauvages et mellifères. Les États membres de l’UE adoptent la proposition de la Commission interdisant 3 néonicotinoïdes : clothianidine, imidaclopride et thiaméthoxame. Bien entendu, une interdiction européenne d’utiliser un pesticide est toujours assortie d’une possibilité de dérogation… Le Ministre fédéral de l’Agriculture de l’époque, Denis Ducarme, autorisa dans la foulée, sur la base de la dérogation de cent vingt jours, les trois néonicotinoïdes incriminés en cultures de betteraves, chicorées, carottes et laitues… C’en est trop pour Nature & Progrès et PAN Europe. Les associations déposent une requête en annulation de la dérogation Ducarme. C’est la justice qui tranchera !
  • 2022 : après 3 années consécutives de dérogations, en novembre 2022 une nouvelle ère s’ouvre sans néonicotinoïdes en Belgique. Affaire à suivre !

Quatre nouvelles dérogations belges pour le pesticide flupyradifurone

La Belgique octroie quatre nouvelles dérogations pour l’usage de produits pesticides à base de flupyradifurone, l’un des insecticides de type néonicotinoïde nouvelle génération mis sur le marché en 2015.

Abeille sur pommier

Ces produits sont déjà autorisés en plein air pour la production de houblon ou de fruits (raisin, pomme, poire, etc.) et sous serre pour certains légumes (courgette, aubergine, etc.) ou petits fruits (fraise, framboise, mûre, etc.). Pourtant, la dérogation – dite d’urgence phytosanitaire et relevant de la législation européenne sur les pesticides – permet d’étendre l’application de flupyradifurone à plusieurs variétés de choux (chou-fleur, chou-rave, chou de Bruxelles, chou brocoli, etc) pendant une période de 120 jours comprise entre le 1er juin et le 28 septembre 2022.

Une substance neurotoxique

Tout comme le sulfoxaflor, dont l’homologation européenne est en sursis, le flupyradifurone est une substance neurotoxique perturbant le fonctionnement du système nerveux de l’insecte ravageur ciblé (ici, le puceron et la mouche blanche) pour l’éradiquer, avec, au passage, des effets collatéraux sur d’autres insectes non visés et inoffensifs pour les cultures traitées, en particulier les pollinisateurs. Comme ce fut le cas pour les néonicotinoïdes de 1ère génération (imidaclopride, thiaméthoxame, clothianidine et fipronil) dorénavant interdits au niveau européen, les preuves scientifiques de la toxicité du flupyradifurone pour les abeilles s’accumulent.

La littérature scientifique a déjà identifié des perturbations majeures consécutives à une exposition au flupyradifurone avec un impact sur :

  • le comportement alimentaire (consommation de nectar) et de butinage,
  • la thermorégulation
  • Et la motricité de ces précieuses butineuses…

…diminuant ainsi encore davantage leur chance de survie. Pour certaines abeilles sauvages, en particulier l’abeille Megachile rotundat, le flupyradifurone présente une toxicité aigüe plus de 15 fois supérieure à celle des abeilles domestiques. Plus de 1.400 espèces d’abeilles sauvages sont des Megachile rotundat et beaucoup d’entre elles butinent les cultures et les fleurs sauvages à proximité des parcelles agricoles. De nombreuses plantes attractives pour les abeilles domestiques sont également visitées par les Megachile, qui pourraient donc être exposées à des doses de flupyradifurone présentant une toxicité aiguë, tant dans les champs agricoles qu’en dehors.

Flupyradifurone : les preuves scientifiques sont nombreuses

En permettant la pulvérisation de ces produits en plein champ et sans aucune mesure de réduction des risques (autre qu’une zone tampon de 20 mètres), l’Etat belge choisi d’ignorer les nombreuses preuves scientifiques disponibles alors qu’il devrait au contraire soigneusement évaluer toute nouvelle étude afin de compenser les lacunes du système actuel d’évaluation des risques pour préserver la biodiversité et les abeilles. Il aura fallu environ 25 ans pour interdire au niveau européen les utilisations de l’imidaclopride, du thiaméthoxame, de la clothianidine et du fipronil. Avec l’arrivée de nouveaux néonicotinoïdes, quelle chance reste-t-il aux abeilles quand l’Etat belge continue d’octroyer chaque année des dérogations temporaires à l’interdiction européenne pour ces anciens néonicotinoïdes ?

Le sulfoxaflor bientôt interdit en Europe et toujours autorisé en Belgique

abeille sulfoxaflor

© Adobe Stock, tous droits réservés (sulfoxaflor)

La Commission européenne va interdire l’épandage en plein champ de produits pesticides à base de sulfoxaflor. Cette substance active de type néonicotinoïde, dont l’homologation européenne devait courir jusqu’en 2025, va être retirée du marché en raison de préoccupations concernant sa toxicité élevée pour les abeilles. L’utilisation de ce pesticide en agriculture sera bientôt limitée aux serres permanentes, au même titre que d’autres insecticides de la famille des néonicotinoïdes. Le règlement d’interdiction devrait être adopté par la Commission européenne au printemps 2022.

Par cette interdiction, la Commission européenne fait application du principe de précaution devant l’absence de données scientifiques concluantes et l’impossibilité d’exclure tout risque inacceptable pour l’environnement, en particulier pour les pollinisateurs. Jusque-là, la proposition d’interdiction de cette molécule par la Commission européenne n’avait pas pu aboutir faute d’une majorité suffisante d’Etats membres lors des votes en comité technique (Scopaff) et en comité d’appel de février et mars 2022. La Belgique s’était d’ailleurs abstenue de voter.

Nature & Progrès et PAN Europe agissent

Initialement opposé à une interdiction européenne du sulfoxaflor en extérieur, le Ministre fédéral de l’Agriculture, David Clarinval, a entre-temps renouvelé pour la saison printemps/été 2022, l’agrément en urgence de deux produits à base de sulfoxaflor pour les cultures de betteraves sucrières. Car, si en vertu de la législation européenne encadrant la mise sur le marché de produits phytosanitaires, l’autorisation et l’interdiction des molécules actives utilisées pour fabriquer des pesticides agricoles se décident au niveau européen, les Etats membres restent compétents pour octroyer l’autorisation de produits pesticides sur leur territoire. Ils peuvent notamment décider de permettre en urgence la vente et l’utilisation de certains pesticides chimiques de synthèse non autorisés lorsqu’ils jugent qu’aucune autre alternative raisonnable n’est disponible pour protéger les cultures.

Nature & Progrès Belgique, le Pesticide Action Network (PAN) Europe, et un apiculteur liégeois ont d’ailleurs introduit plusieurs recours devant le Conseil d’Etat et la Cour de justice européenne suite à des dérogations belges que l’asbl considère comme abusives et illégales.

En 2015, la Commission européenne avait autorisé la commercialisation de produits insecticides contenant du sulfoxaflor, alors même que depuis 2013, l’usage en plein champ d’autres néonicotinoïdes (le thiamethoxame, l’imidaclopride et la clothianidine), utilisés pour le traitement des semences et expressément interdits pour les cultures en plein champ depuis 2018, faisait déjà l’objet de certaines restrictions… à cause de leur toxicité aigüe, notamment pour les abeilles. A l’époque, la décision prise par l’autorité européenne nous était apparue pour le moins paradoxale. En effet, aucune des restrictions et mesures d’atténuation des risques applicables à l’utilisation de ces trois néonicotinoïdes n’étaient reprises dans l’acte d’autorisation du sulfoxaflor. Dès 2015, ce nouvel insecticide, de la famille des néonicotinoïdes (du fait de son mode d’action : il agit sur les récepteurs nicotiniques), pouvait donc être pulvérisé sans restriction pendant toute la période de production agricole, y compris lors de la floraison des cultures pollinisées par les insectes, et notamment les abeilles.

Un dossier en cours depuis 2015

Cela fait de nombreuses années que Nature & Progrès fait du dossier « Sulfoxaflor » une priorité. Grâce au soutien sans faille de ses membres et donateurs, l’association reste très attentive à l’évolution de la situation. Il serait en effet inadmissible que le Ministre fédéral de l’Agriculture octroie à nouveau une dérogation à l’interdiction européenne, au détriment des abeilles.