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Aujourd’hui, la Cour de justice de l’UE (CJUE) a publié un jugement préliminaire sur des questions posées par le Conseil d’Etat belge, suite à une plainte de Nature & Progrès Belgique, PAN Europe et un apiculteur belge. La Cour a déclaré que le fait de prévoir des dérogations pour le traitement des semences avec un pesticide interdit et leur utilisation n’est pas conforme au droit européen. Cet arrêt met un terme à près de la moitié des dérogations accordées par les États membres aux pesticides interdits.
Hans Muilerman, en charge des produits chimiques à PAN Europe a déclaré : « PAN Europe se bat contre cette mauvaise administration depuis de nombreuses années. Cette décision historique de la Cour de justice de l’UE met fin à 10 ans d’abus de la part des États membres, avec la bénédiction de la Commission européenne. Grâce à notre action, l’environnement de l’UE deviendra un endroit plus sûr. »
En 2019, Nature & Progrès Belgique, un apiculteur individuel belge et PAN Europe ont déposé une demande d’annulation devant le Conseil d’Etat belge. Cela faisait suite à une dérogation accordée par la Belgique au lobby du sucre pour l’utilisation d’insecticides néonicotinoïdes toxiques pour les abeilles sur les betteraves sucrières. Les plaignants ont suggéré à la Cour belge de poser des questions préjudicielles à la CJUE afin de clarifier les limites de la loi en matière de dérogations.
Marc Fichers, Secrétaire Général de Nature & Progrès Belgique a déclaré : « Ce succès aura un effet à l’échelle de l’UE, pour protéger les abeilles et les insectes dans toute l’UE, ainsi que la santé des citoyens. Les dérogations avec des semences traitées aux néonicotinoïdes sont désormais définitivement interdites. Ce jugement est un soulagement et montre que l’environnement et la santé comptent plus que les intérêts de certaines entreprises de sucre et de pesticides !«
La Commission européenne, la France, la Grèce, la Hongrie et la Finlande ont rejoint la procédure devant la Cour de justice de l’UE. La Belgique, ainsi qu’une entreprise belge de pesticides (SES Vanderhave) et le lobby du sucre belge sont également intervenus pour protéger leurs intérêts.
Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe, a ajouté : « Au cours de la procédure, il a été très choquant de constater que la Commission européenne a continué à protéger les abus du système par les États membres. La Commission a soutenu l’octroi de dérogations pour des pesticides prétendument interdits par l’UE et hautement toxiques pour la santé humaine et l’environnement. Il était évident que la Commission était du côté de l’agrobusiness, plutôt que de la santé des citoyens et de l’environnement ! Les avocats de la Commission européenne ont même affirmé devant les juges européens que les États membres n’accordent une dérogation que lorsqu’il n’existe aucune alternative, ce qui est contraire à la réalité !«
PAN Europe a récemment publié un rapport sur les dérogations accordées par les États membres aux substances pesticides interdites par l’UE : 236 dérogations de ce type ont été accordées au cours des 4 dernières années. Les néonicotinoïdes représentent près de la moitié de ces dérogations (47,5%). Le rapport souligne que les États membres n’évaluent pas la nécessité de ces dérogations et leur conformité avec le droit européen, favorisant ainsi l’agrobusiness au détriment de la protection de la santé des citoyens et de l’environnement.
Me Antoine Bailleux, notre avocat, a ajouté : « Cet arrêt constitue un énorme pas en avant pour la préservation de la biodiversité en Europe. La Cour de justice a clairement indiqué que les pesticides interdits au niveau de l’UE pour des raisons sanitaires ou environnementales ne peuvent être introduites par des moyens détournés au niveau des États membres, ce qui était devenu une pratique courante. Elle a également confirmé que la protection de la santé et de l’environnement l’emporte sur l’objectif d’amélioration de la production végétale. »
Martin Dermine a conclu : « C’est un grand jour pour les pollinisateurs européens et pour notre environnement. La législation européenne sur les pesticides donne la priorité à la santé des citoyens et à l’environnement, mais son application au niveau européen et national laisse à désirer. Ce verdict est un rappel que les administrations et les politiciens sont soumis au respect de la loi, et non aux intérêts de l’industrie des pesticides, ou des lobbies agricoles industriels. »
Informations générales
Les insecticides néonicotinoïdes ont été autorisés dans l’UE dans les années 90. Après 20 ans de dommages sur les populations d’insectes de l’UE, la Commission européenne et les États membres ont partiellement restreint leur utilisation en 2013, aux cultures qui ne sont pas attractives pour les pollinisateurs. Une série d’États membres de l’UE ont immédiatement émis des dérogations pour continuer à les utiliser malgré l’interdiction. En 2018, suite à l’interdiction de toutes les utilisations extérieures, le nombre de dérogations a même augmenté de manière significative.
Communiqué de presse (en français) de la Cour de justice de l’UE, 19/01/2023
« La Cour souligne également l’obligation pour tous les États membres de prendre toutes les mesures nécessaires pour promouvoir une lutte contre les organismes nuisibles à faible apport en pesticides, en donnant la priorité aux méthodes non chimiques chaque fois que cela est possible. Une telle obligation implique que les utilisateurs professionnels de pesticides se tournent vers les pratiques et les produits disponibles présentant le plus faible risque pour la santé humaine et l’environnement pour faire face à un problème parasitaire. »