En décembre 2021, grâce à un atelier participatif, le Réseau RADiS (Réseau Alimentaire Dinant Solidaire), mené par Nature & Progrès et la Fondation Cyrys FUP, a défini sa vision et ses missions. Avec le concours de citoyens, nous souhaitons soutenir et développer la transition de la région dinantaise vers une alimentation bio et locale, respectueuse des Hommes et de la Terre, en favorisant la solidarité et l’implication de tous…
Par Sylvie La Spina
Au cœur de nos missions, la sensibilisation des citoyens à l’alimentation bio et locale doit permettre de fédérer une communauté d’acteurs solidaires de la transition écologique et sociétale. Un petit groupe de citoyens, les Radicelles, s’est ainsi constitué pour se pencher sur ces questions. En amont de notre première réunion, nous avons tenté de rassembler un maximum d’idées : comment sensibiliser les citoyens au bio local ? Via quels arguments, quels outils, quelles activités ? Un sondage a été lancé auprès des membres du Réseau RADiS et de Nature & Progrès, et via les réseaux sociaux. Grâce aux trente-neuf participants et aux échanges qui ont eu lieu lors de notre réunion du 20 février, nous avons collecté une foule d’idées, source d’inspiration ! Nous vous en partageons les fruits dans cet article.
Le bio, meilleur pour la santé
Premier argument de nos participants : l’alimentation bio et locale est meilleure pour notre santé. Vu les effets délétères des OGM et des pesticides chimiques de synthèse, dont la plupart sont classés cancérigènes ou perturbateurs endocriniens, on ne peut aujourd’hui plus le nier ! Si l’on manque d’éléments scientifiques pour démontrer un effet du mode de culture sur la qualité nutritionnelle, il est évident qu’une alimentation locale permet d’assurer la fraicheur de nos fruits et légumes, avec une meilleure préservation des vitamines et des éléments essentiels. Les éleveurs témoignent souvent que, depuis qu’ils sont passés en bio, leurs vaches voient bien moins souvent le vétérinaire… Pourquoi n’en serait-il pas de même avec notre médecin ?
« Il faudrait donner davantage d’informations concernant la santé et la dangerosité des produits non bio » – Philippe P.
« Il serait intéressant de partager de données « scientifiques » illustrées sur la différence de valeur nutritive » – Diane O.
Protéger la planète
Les produits chimiques de synthèse sont des poisons pour notre environnement et pour la biodiversité, ce que ne manquent pas de rappeler les participants à notre sondage. Ils mettent aussi en avant l’intérêt écologique du circuit court local via la réduction des pollutions associées aux transports et, de manière générale, la moindre empreinte écologique et carbone de l’alimentation bio locale. Ces arguments liés à l’environnement sont aujourd’hui incontournables et puissants, quand on constate les conséquences des changements climatiques sur notre quotidien. Et si nous apportions aux citoyens des démonstrations, par l’information et… l’observation !
« La terre produit mieux si elle est respectée » – Ariane D.
« Nous pourrions montrer concrètement sur le terrain ce que ça change de produire bio » – Mathilde R.
« Il faudrait informer par la diffusion de films très courts montrant les effets des épandages sur les cultures de produits toxiques, tel que le glyphosate » – Naïma.
Soutenir nos producteurs bio locaux
La relocalisation de notre alimentation bio permet la création d’emplois non délocalisables et renforce l’autonomie alimentaire, l’économie locale et circulaire. De nombreux participants aux réflexions ont partagé leur fierté de contribuer à faire vivre des familles de producteurs, à valoriser leur travail et leur démarche. Le lien direct avec le producteur permet davantage de solidarité et des prix plus équitables. Il est donc important de (re)créer le lien entre les mangeurs et leurs voisins producteurs et artisans.
« Manger local, c’est aider des personnes que l’on connait à vivre de leur passion/travail. Allons visiter des maraichers, des artisans, des transformateurs de produits » – Marie-Christine H.
Et si nous sortions un peu de l’idéologie ?
Santé, environnement et société, nous venons de faire un tour des arguments idéologiques, des convictions qui poussent les personnes les plus sensibilisées à passer à l’action. Mais ces idéaux ne sont-ils pas perçus comme une contrainte par de nombreuses personnes ? « Il faudrait que je mange mieux pour ma santé, il faudrait que je participe à préserver la nature, il faudrait que j’arrête de fumer… Allez, demain, j’arrête ». Ce peut être culpabilisant, s’apparenter à une corvée pour des personnes déjà submergées par les tracas du quotidien et qui aspirent à plus de… plaisir. Parlons-en aussi !
« J’exprime l’importance de mon choix, la cohérence que cela m’apporte et qui m’est nécessaire, la joie que cela me procure. Essayer de convaincre ne marche pas : personne n’aime que quelqu’un d’autre lui dicte ce qu’il doit faire » – Philippe G.
Le plaisir du goût
Goûter, c’est adopter ! Parmi les activités recensées, les ateliers de dégustation sont une manière de mettre en avant le goût et la qualité, mais aussi de stimuler l’envie de cuisiner. La marche gourmande associe le plaisir de la bouche, la convivialité et la découverte du milieu environnant les fermes.
« Des dégustations pour goûter la différence, y compris par des actions de soutien et de promotion des restaurateurs locaux engagés dans le bio local » – Diane O.
Le plaisir de cuisiner
Choisir une alimentation bio et locale nous encourage à respecter les saisons et nous invite à davantage de créativité en cuisine. La qualité des produits donne envie de cuisiner et de partager les bons repas avec son entourage ! Le manque de savoir-faire est souvent un obstacle : de nombreuses personnes n’ont pas appris à cuisiner et sont assez démunies devant les légumes et les pièces de viande des producteurs locaux. Des ateliers culinaires sont une solution alliant partage et convivialité ; on peut même y donner des astuces pour économiser le temps en cuisine, lui aussi précieux.
« Il est essentiel d’amener les gens à retrouver du plaisir derrière les fourneaux ! » – Sandrine D.
« Manger bio local met des limites qui nous rendent le plaisir de varier davantage notre alimentation au fil des saisons et d’inventer de nouvelles recettes » – Benoit V.
« Des recettes simples à réaliser et à bas coût » – Joëlle R.
Le plaisir de retrouver le lien
L’alimentation bio locale est créatrice de liens entre les personnes, elle reconnecte les citoyens au milieu rural et naturel. Les maraîchers proposant de l’autocueillette permettent une activité conviviale en famille au milieu des légumes et des fleurs. Un petit tour à la boucherie de la ferme, c’est le rendez-vous avec les animaux qui paissent aux alentours. Les chantiers participatifs sont l’occasion de mettre la main à la pâte dans une ambiance conviviale. D’ailleurs, l’accueil social à la ferme et la zoothérapie prouvent combien la reconnexion avec le milieu rural fait du bien au moral !
« Ça reconnecte les gens à la nature, ça reconnecte les gens aux autres » – Céline B.
Et pourquoi ne pas manger bio local ?
Si beaucoup d’arguments nous poussent à choisir une alimentation bio locale, certains freins existent également. Nous les avions inventoriés dans le cadre de nos réflexions sur l’accessibilité de l’alimentation bio locale pour tous : le prix, le temps, la capacité physique, la mobilité, l’estime de soi, le savoir-faire, les infrastructures et l’information. Et si nous imaginions des actions permettant de démonter ces freins ?
Le bio, trop cher ?
C’est la principale pierre d’achoppement de l’alimentation bio locale : son prix ! Sans refaire ici tout le débat sur la question, on peut imaginer des actions sur ce thème. En premier lieu, pour informer sur les écarts de prix souvent exagérés dans l’imaginaire collectif. En second lieu, pour relativiser cette hausse du prix par rapport aux coûts cachés de l’alimentation industrielle, liés à l’environnement et à la santé. Et enfin, parce que le budget de certains reste malheureusement limité et limitant, pour donner des pistes afin de parvenir malgré tout à opter pour le bio local.
« Le prix rebute encore car les gens n’ont pas conscience que de l’argent investi localement leur revient indirectement au travers du développement local. Conscientiser au fait que les choix de consommation sont le meilleur moyen de créer le monde qu’ils veulent » – Audrey D.
« Donner des pistes pour que le coût reste raisonnable tout en sensibilisant au fait que c’est normal de dédier une bonne partie de son budget à l’alimentation qui est un besoin primaire ! » – Mathilde R.
« Le bio local permet de se nourrir sainement sans se ruiner pour autant que les familles acceptent de revenir à des recettes et en-cas simples, composés de produits de base qui ont toujours existé dans nos régions » – Philippe G.
Informer !
Manger bio local ? D’accord. Mais où se procurer ces bons produits, comment rencontrer les artisans de ma région ? Comment connaitre les fruits et légumes de saison ? Une information peut être un petit coup de pouce pour passer à l’action !
« Un livret recueil des producteurs et revendeurs bio locaux » – Caroline P.
« Nous pourrions mettre en place une formation sur le rythme des saisons. Il n’y a pas de fraises à Noël ni de tomates » – Jacqueline G.
Faire tache d’huile
Faites ce que je fais, pas ce que je dis ! Montrons à nos voisins, à nos amis, à notre famille, notre engagement dans le bio local. Non, non, ce n’est pas un mouvement marginal « de niche », nous sommes nombreux à nous inscrire dans cette démarche, faisons-le savoir ! Invitons notre entourage dans la bienveillance, en veillant à ne pas mettre de pression, ni à culpabiliser.
« Comme avec les enfants, ils copient ce qu’on fait, pas ce qu’on dit. Donc, je montre à mes voisins, à mes collègues, à mes amis, à mes enfants » – Laurence.
« Vente ou distribution d’autocollants « Je mange bio et local » à mettre sur ses fenêtres (maisons, voitures) pour montrer l’adhésion de certains et faire petit à petit tache d’huile » – Ariane D.
Diversifier pour toucher
A chacun ses affinités, ses préoccupations, ses envies, ses freins ! La diversité des actions et des activités mises en place pour sensibiliser les citoyens permet de toucher des personnes aux horizons très différents. N’oublions pas les activités ludiques sous forme de jeux : la convivialité est la pièce maîtresse pour attirer et fidéliser les personnes, leur donner goût à une autre manière de s’alimenter et de se relier aux autres.
« Vouloir sensibiliser tout le monde revient souvent à ne toucher personne (ou quasi !). Chaque groupe de personnes peut être sensibilisé par un aspect différent : par exemple, « nourriture saine » pour les parents ayant de jeunes enfants (il me semble que c’est une raison souvent avancée) » – Patricia G.
Et la suite ?
Les Radicelles se lancent maintenant dans l’action ! Nous élaborons ensemble un programme de visites de fermes, pendant toute la belle saison 2022, qui se clôturera par un événement convivial au mois de septembre. N’hésitez pas à nous rejoindre, en région dinantaise – www.reseau-radis.be -,