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5 juin 2024

Communiqué de presse

Nature & Progrès, PAN Europe et Bond Beter Leefmilieu attaquent la Belgique en justice pour des autorisations illégales de pesticides. Alors que l’UE a mis en place un cadre rigoureux à l’autorisation des pesticides, et en l’occurrence de l’abamectine, la Belgique autorise les pesticides à base de cette substance active bien au-delà du cadre réglementaire. Une illégalité qui fait écho au manque d’engagement de cette législature en termes de réduction des pesticides, malgré la déclaration de gouvernement de 2020.

Ce mardi 4 juin, l’ASBL et les deux ONG ont lancé un recours en annulation devant le Conseil d’État contre l’État belge pour avoir réautorisé trois pesticides hautement toxiques contenant de l’abamectine (les insecticides Acaramik[1], Safran[2] et Vargas[3]), en violation des règles de droit européen. L’objectif premier de la réglementation européenne qui encadre l’autorisation des pesticides est de protéger la santé des citoyens et l’environnement. Vu les risques de l’abamectine, l’UE a posé comme condition que les utilisations d’abamectine soient limitées à des systèmes complètement hermétiques. Au lieu de cela, la Belgique vient d’autoriser des utilisations en plein air et dans les tunnels jusqu’en 2039, au mépris de l’environnement et de la santé des citoyens.

Martin Dermine, directeur exécutif de PAN Europe, a déclaré : « L’abamectine est hautement toxique pour l’environnement et sa génotoxicité pour l’homme est sérieusement mise en doute par différentes études académiques. La Commission européenne a limité son utilisation à des systèmes qui empêchent tout rejet de la substance dans l’environnement, comme des serres. »

 

Cette condition, la Belgique en son ministre de l’Agriculture l’avait approuvée, en janvier 2023, lors du vote au niveau européen. Ils l’avaient aussi reconnue dans une communication externe en juin 2023. Mais à l’heure d’autoriser les produits, ils ont fait sauter les conditions restrictives d’espace fermé, indispensables pour protéger l’environnement, et particulièrement les eaux qui bordent les champs.

Virginie Pissoort, chargée de campagnes à Nature et Progrès Belgique, a déclaré : « Alors que la législation européenne définit clairement une serre comme un système fermé, la Belgique a créé sa propre directive en la matière [4], sous le terme « culture sous protection », se contentant de parois et d’un toit, comme un tunnel de plain-pied, laissant ainsi s’infiltrer les matières et l’énergie par les fenêtres, les entrées ou le sol. Cette option prise par la Belgique de « culture sous protection » est en contradiction avec les exigences européennes. »

Par ailleurs, elle déguise ces trois autorisations sous le vocable de « prolongation » qu’elle octroie pour 15 ans, sans aucune certitude que le travail d’évaluation des risques qu’elle est tenue de mener, condition nécessaire pour renouveler un pesticide pour 15 ans, ait été réalisé et finalisé.

Pour Nature & Progrès « Cette violation du droit européen par la Belgique doit être dénoncée en justice. Après l’octroi par la Belgique de dérogations d’urgence pour des substances actives interdites, ou l’absence d’évaluation comparative pour les pesticides les plus toxiques, c’est en contournant d’autres règles du droit européen, comme les restrictions d’utilisation, que la Belgique se met en porte-à-faux. » Virginie Pissoort, chargée de plaidoyer et de campagnes.

En dépit des ambitions affichées par la Belgique sur la réduction de l’utilisation des pesticides dans la déclaration gouvernementale de 2020, notre pays reste l’un des plus gros consommateurs de pesticides en Europe. [5] Sous la tutelle du ministre fédéral de l’Agriculture, aucune mesure significative n’a été prise pour réduire l’utilisation des pesticides, et les plans de réduction de pesticides sont surtout des études, des mesures, des diagnostics, des évaluations plutôt que de récents projets ambitieux d’affranchir l’agriculture belge de ces produits chimiques délétères.

« C’est un triste bilan que nous tirons en matière de réduction des pesticides sous cette législature. Les chiffres de vente totale des pesticides ne diminuent que marginalement, alors qu’aujourd’hui c’est d’une autre trajectoire que notre agriculture, notre alimentation et notre environnement ont besoin et que la Belgique s’était engagée à suivre dans sa déclaration gouvernementale.»

Il est possible de s’affranchir des pesticides sur le terrain. Mais pour un abandon massif de ces substances, il y a besoin d’un accompagnement des agriculteurs avec un réel investissement de nos responsables politiques, une vision et un engagement sur le long terme.

[1] https://apps.health.belgium.be/fytoweb/pages/public/detail.xhtml?dswid=-943&product=38804466

[2]  https://apps.health.belgium.be/fytoweb/pages/public/detail.xhtml?dswid=-943&product=38805519

[3]  https://apps.health.belgium.be/fytoweb/pages/public/detail.xhtml?dswid=-943&product=38806588

[4]  https://fytoweb.be/fr/guides/phytoprotection/quest-ce-quune-culture-sous-protection

[5] NATPROG_la-belgique-royaume-des-pesticides.pdf